dimanche 22 Novembre 2020 à 10h35
Histoire magnifique
« Retire-toi ; je ne suis plus d'humeur de recevoir tes caresses. »
La pauvre petite chienne, qui ne l'entendait pas, le tirait par son habit pour l'obliger à la regarder au moins. Cela impatienta Chéri, qui lui donna un grand coup de pied. Dans le moment la bague le piqua, comme si c'eût été une épingle : il fut bien étonné, et s'assit tout honteux dans un coin de sa chambre. Il disait en lui-même, je crois que la fée se moque de moi ; quel grand mal ai-je fait pour donner un coup de pied à un animal qui m'importune ? À quoi me sert d'être maître d'un grand empire, puisque je n'ai pas la liberté de battre mon chien ?
« Je ne me moque pas de vous, dit une voix, qui répondait à la pensée de Chéri, vous avez fait trois fautes, au lieu d'une. Vous avez été de mauvaise humeur, parce que vous n'aimez pas à être contredit, et que vous croyez que les bêtes et les hommes sont faits pour obéir. Vous vous êtes mis en colère, ce qui est fort mal : et puis, vous avez été cruel à un pauvre animal qui ne méritait pas d'être maltraité. Je sais que vous êtes beaucoup au-dessus d'un chien ; mais si c'était une chose raisonnable et permise, que les grands pussent maltraiter tout ce qui est au-dessous d'eux, je pourrais à ce moment vous battre, vous tuer, puisqu'une fée est plus qu'un homme. L'avantage d'être maître d'un grand empire, ne consiste pas à pouvoir faire le mal qu'on veut, mais tout le bien qu'on peut. »
Chéri avoua sa faute, et promit de se corriger mais il ne tint pas sa parole. Il avait été élevé par une sotte nourrice qui l'avait gâté quand il était petit. S'il voulait avoir une chose, il n'avait qu'à pleurer, se dépiter, frapper du pied ; cette femme lui donnait tout ce qu'il demandait, et cela l'avait rendu opiniâtre. Elle lui disait aussi, depuis le matin jusqu'au soir, qu'il serait roi un jour, et que les rois étaient fort heureux, parce que tous les hommes devaient leur obéir, les respecter, et qu'on ne pouvait pas les empêcher de faire ce qu'ils voulaient. Quand Chéri avait été grand garçon, et raisonnable, il avait bien connu, qu'il n'y avait rien de si vilain que d'être fier, orgueilleux, opiniâtre. Il avait fait quelques efforts pour se corriger ; mais il avait pris la mauvaise habitude de tous ces défauts ; et une mauvaise habitude est bien difficile à détruire. Ce n'est pas qu'il eût naturellement le cœur méchant. Il pleurait de dépit quand il avait fait une faute, et il disait, « je suis bien malheureux d'avoir à combattre tous les jours contre ma colère et mon orgueil : si on m'avait corrigé quand j'étais jeune, je n'aurais pas tant de peine aujourd'hui » . Sa bague le piquait bien souvent, quelquefois il s'arrêtait tout court ; d'autres fois, il continuait, et ce qu'il y avait de singulier, c'est qu'elle ne le piquait qu'un peu pour une légère faute ; mais quand il était méchant, le sang sortait de son doigt. À la fin cela l'impatienta, et voulant être mauvais tout à son aise, il jeta sa bague. Il se crut le plus heureux de tous les hommes, quand il se fut débarrassé de ses piqûres. Il s'abandonna à toutes les sottises qui lui venaient à l'esprit, en sorte qu'il devint très méchant, et que personne ne pouvait plus le souffrir.
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dimanche 22 Novembre 2020 à 10h35
Histoire magnifique
lundi 17 Aout 2020 à 00h25
Assez long, mais riche en enseignements.
samedi 18 Avril 2020 à 14h15
Bien
dimanche 24 Novembre 2019 à 09h14
Tros bien
mercredi 15 Mai 2019 à 19h11
trop bien