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[[Image:Maggiolo - Portolankarte - 1541.png|thumb|Un portulan de 1541]]
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[[Fichier:Carte Portulan du Maghreb.jpg|vignette|Carte-portulan anonyme originaire du Maghreb, fabriqué en papier au début du {{s-|XIV}} ; il s'agit de l'un des plus vieux portulans découverts]]
[[Fichier:Carte Portulan du Maghreb.jpg|vignette|Carte-portulan anonyme originaire du Maghreb, fabriqué en papier au début du {{s-|XIV}} ; il s'agit de l'un des plus vieux portulans découverts.]]
Un '''portulan''', ou '''carte-portulan''', (de l'italien ''portolano'', livre d’instructions nautiques) est une sorte de carte de navigation, utilisée du {{XIIIe siècle}} au {{XVIIIe siècle}}, servant essentiellement à repérer les [[Port (marine)|ports]] et connaître les dangers qui peuvent les entourer : courants, hauts-fonds... Les portulans se distinguent par deux caractères graphiques spécifiques : les lignes de vents ou de [[rhumb]] qui colorent et quadrillent les surfaces marines, l'alignement perpendiculaire au [[trait de côte]] des noms de lieux ([[havre]]s et ports colorés différemment selon leur importance). Des [[Rose des vents|roses des vents]] permettent en outre de repérer la route et de déterminer le [[Cap (navigation)|cap]] à suivre.
Un '''portulan''', ou '''carte-portulan''', (de l'italien ''portolano'', livre d’instructions nautiques), aussi appelé « carte à [[Rhumb|rhumbs]] », est une sorte de carte de navigation, utilisée du {{XIIIe siècle}} au {{XVIIIe siècle}}, servant essentiellement à repérer les [[Port (marine)|ports]] et connaître les dangers qui peuvent les entourer : courants, hauts-fonds... Les portulans se distinguent par deux caractères graphiques spécifiques : les lignes de vents ou de [[rhumb]] qui colorent et quadrillent les surfaces marines, l'alignement perpendiculaire au [[trait de côte]] des noms de lieux ([[havre]]s et ports colorés différemment selon leur importance). Des [[Rose des vents|roses des vents]] permettent en outre de repérer la route et de déterminer le [[Cap (navigation)|cap]] à suivre.


Au premier abord, ces cartes peuvent paraître incompréhensibles aux non-initiés car le portulan est réalisé comme une toile d’araignée (entrelacs de lignes vertes et rouges). Elle se construit de seize [[Rhumb|lignes de rhumb]], de [[Rose des vents|roses des vents]], de seize [[Point nodal|points nodaux]] et de seize aires de vents de 22°30. Cela forme des parallélogrammes, des carrés et des rectangles. Ces tracés forment ce qu'on appelle alors un marteloire (de l'italien, ''mar :'' la mer et ''teloio'' : la toile).
Au premier abord, ces cartes peuvent paraître incompréhensibles aux non-initiés car le portulan est réalisé comme une toile d’araignée (entrelacs de lignes vertes et rouges). Elle se construit de seize [[Rhumb|lignes de rhumb]], de [[Rose des vents|roses des vents]], de seize [[Point nodal|points nodaux]] et de seize aires de vents de 22°30. Cela forme des parallélogrammes, des carrés et des rectangles. Ces tracés forment ce qu'on appelle alors un marteloire (de l'italien, ''mar :'' la mer et ''teloio'' : la toile).


Peut-on voir dans cette construction des [[Méridien|méridiens]] et des [[parallèles]] ? Cela semble peu probable car les marins italiens de la fin du {{s-|XIII}} et du {{s-|XIV}} n’ont pas encore connaissance d’un quelconque [[Système de coordonnées (cartographie)|système de coordonnées]], système qui ne sera redécouvert qu’avec la récupération de la ''Géographie'' de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]. C'est cette absence qui fait le charme et l'originalité de ces cartes, construites sans [[Projection cartographique|système de projection]], pourtant supposé nécessaire pour tout passage d'une surface sphérique (la Terre) à sa représentation plane.
Peut-on voir dans cette construction des [[Méridien|méridiens]] et des [[parallèles]] ? Cela semble peu probable car les marins italiens de la fin du {{s-|XIII}} et du {{s-|XIV}} n’ont pas encore connaissance d’un quelconque [[Système de coordonnées (cartographie)|système de coordonnées]], système qui ne sera redécouvert qu’avec la récupération de la ''Géographie'' de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]. C'est cette absence qui fait le charme et l'originalité de ces cartes, construites sans [[Projection cartographique|système de projection]], pourtant supposé nécessaire pour tout passage d'une surface sphérique (la Terre) à sa représentation plane.


À l'époque, il existait deux types de portulans, le premier, peut-être plus grossièrement dessiné, dépourvu de décoration et de fioriture, sert aux marins pour se repérer et naviguer en sécurité en mer Méditerranée. Le deuxième type, plus connu aujourd'hui car de nombreux exemplaires en sont encore conservés (notamment à la [[Bibliothèque nationale de France|Bibliothèque Nationale de France]]) est un objet d'art, richement décoré, prisé des collectionneurs et des cours royales. Ces portulans sont en effet le symbole d'une connaissance approfondie des mers et du pouvoir commercial et naval d'un royaume ou autre pouvoir de l'époque. D'ailleurs, à l'époque des [[Grandes découvertes]], ils sont considérés par les royaumes du Portugal et d'Espagne comme des [[Secret d'État|secrets d'État]], notamment à partir du [[traité de Tordesillas]] établi en [[1494]]. Ils disparaissent au {{XVIIIe siècle}}, qui voit le développement d'innovations techniques, notamment l'[[Chronomètre de marine|horloge de marine]], permettant l'élaboration de cartes plus détaillées et surtout plus précises.
À l'époque, il existait deux types de portulans, le premier, peut-être plus grossièrement dessiné, dépourvu de décoration et de fioriture, sert aux marins pour se repérer et naviguer en sécurité en mer Méditerranée. Le deuxième type, plus connu aujourd'hui car de nombreux exemplaires en sont encore conservés (notamment à la [[Bibliothèque nationale de France|Bibliothèque Nationale de France]]) est un objet d'art, richement décoré, prisé des collectionneurs et des cours royales. Ces portulans sont en effet le symbole d'une connaissance approfondie des mers et du pouvoir commercial et naval d'un royaume ou autre pouvoir de l'époque. D'ailleurs, à l'époque des [[Grandes découvertes]], ils sont considérés par les royaumes du Portugal et d'Espagne comme des [[Secret d'État|secrets d'État]], notamment à partir du [[traité de Tordesillas]] établi en [[1494]]. Ils disparaissent au {{XVIIIe siècle}}, qui voit le développement d'innovations techniques, notamment l'[[Chronomètre de marine|horloge de marine]], permettant l'élaboration de cartes plus détaillées et surtout plus précises.


L'établissement de ces cartes nautiques est basé sur le mode de navigation par [[cabotage]] : le bateau se déplace à cette époque à proximité des côtes, ce qui permet d'effectuer une série de mesures visuelles, en fonction du cap, et de les annoter (pour les navigateurs suivants). Un portulan est fondé sur des observations et des relevés faits avec des outils assez élémentaires : la [[boussole]], le [[sextant]] et l'[[alidade]]. C'est d'ailleurs l'invention de la [[boussole]] qui place désormais le nord en haut des cartes, les cartes théologiques du Moyen-âge plaçant généralement l'orient en haut de la carte (lieu probable du paradis terrestre). Il s'agit évidemment du [[Pôle Nord magnétique|nord magnétique]] et non pas du [[Nord|nord géographique]].
L'établissement de ces cartes nautiques est basé sur le mode de navigation par [[cabotage]] : le bateau se déplace à cette époque à proximité des côtes, ce qui permet d'effectuer une série de mesures visuelles, en fonction du cap, et de les annoter (pour les navigateurs suivants). Un portulan est fondé sur des observations et des relevés faits avec des outils assez élémentaires : la [[boussole]], le [[sextant]] et l'[[alidade]]. C'est d'ailleurs l'invention de la [[boussole]] qui place désormais le nord en haut des cartes, les cartes théologiques du Moyen Âge plaçant généralement l'orient en haut de la carte (lieu probable du paradis terrestre). Il s'agit évidemment du [[Pôle Nord magnétique|nord magnétique]] et non pas du [[Nord|nord géographique]].


Les premiers portulans sont remarquables par leur précision. En effet, la [[Carta Pisana|Carte Pisane]], considérée comme l'un des premiers portulans, ne déforme la mer Méditerranée que d'un seul degré par rapport à la réalité, soit environ 90 kilomètres. Aujourd'hui encore les chercheurs ignorent l'origine exacte des cartes-portulans, certains hésitent entre un apport de la [[civilisation islamique]] tandis que d'autres pensent plutôt à une origine européenne<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Roel|nom1=Nicolai|titre=The Enigma of the Origin of Portolan Charts: A Geodetic Analysis of the Hypothesis of a Medieval Origin|éditeur=BRILL|date=2016-05-19|isbn=9789004285125|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=WA_0DQAAQBAJ&pg=PA415&lpg=PA415&dq=islamic+portolan&source=bl&ots=gSbM8TlLA7&sig=ACfU3U0LEHebK5j9M5S7VplvnDTOcQB3kw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwi9v7eit-HgAhV15OAKHYdoA3MQ6AEwBnoECAAQAQ#v=onepage&q=islamic%20portolan&f=false|consulté le=2019-03-01}}</ref>.
Les premiers portulans sont remarquables par leur précision. En effet, la [[Carta Pisana|Carte Pisane]], considérée comme l'un des premiers portulans, ne déforme la mer Méditerranée que d'un seul degré par rapport à la réalité, soit environ 90 kilomètres. Aujourd'hui encore les chercheurs ignorent l'origine exacte des cartes-portulans, certains hésitent entre un apport de la [[civilisation islamique]] tandis que d'autres pensent plutôt à une origine européenne<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Roel|nom1=Nicolai|titre=The enigma of the origin of Portolan charts|sous-titre=a geodetic analysis of the hypothesis of a medieval origin|lieu=Leiden/Boston|éditeur=BRILL|date=2016-05-19|pages totales=544|isbn=978-90-04-28512-5|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=WA_0DQAAQBAJ&pg=PA415&dq=islamic+portolan|consulté le=2019-03-01}}</ref>{{,}}<ref>[https://www.youtube.com/watch?v=oVfO16Cwq4U Doctorat Roel Nicolai]. Youtube, 25 feb. 2015</ref>.


== Histoire ==
== Histoire ==
[[Fichier:Carte Pisane Portolan.jpg|thumb|''[[Carta Pisana]]'', le premier portulan, créé en 1290..]]
[[Fichier:Carte Pisane Portolan.jpg|thumb|''[[Carta Pisana]]'', le premier portulan, créé en 1290..]]
La plus ancienne carte nautique dite « portulan » daterait de [[1290]] ; il s'agit de la ''[[Carta Pisana]]'' tracée peut-être à [[Gênes]], conservée au [[Département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France]] : elle apparaît en Méditerranée à l'époque des croisades, caractérisée par des échanges intenses entre l'Orient et l'Occident<ref>Mireille Pastoureau, ''Voies océanes'', Paris, 1990, p. 13</ref>. En effet, les marins italiens, notamment [[Gênes|génois]], [[Pise|pisans]] et [[Venise|vénitiens]] commercent à travers toute la Méditerranée et ressentent rapidement le besoin d'une carte pour se diriger facilement d'un port à un autre. Ils ne peuvent utiliser les cartes théologiques, appelées [[Carte en T|cartes en T]], pensées par l'Eglise catholique de cette époque. Ces dernières, loin d'être des représentations exactes du monde, ne peuvent convenir à la navigation. C'est ce besoin d'une cartographie empirique et réaliste qui entraîne la création du portulan. Vient en second un portulan de [[1296]] dans une charte [[Naples|napolitaine]]. Le cartographe [[Angelino Dulcert]], de l'[[école majorquine de cartographie]], fort réputée à cette époque<ref>https://books.google.fr/books?id=qiIJyoDYWfoC&pg=PA406&lpg=PA406&dq=cartographie+cresques+majorque&source=bl&ots=Qv3Vs-_UMk&sig=ukyDMJiERgfNqndcZITUPA4P9OM&hl=fr&sa=X&ved=0CEcQ6AEwB2oVChMIqMHCrMvsyAIVSu4aCh2GGAg_#v=onepage&q=cartographie%20cresques%20majorque&f=false</ref>, en a réalisé un en [[1339]]<ref>Monique de La Roncière et Michel Mollat du Jourdin, ''Les portulans'', Paris, 1984</ref>.
La plus ancienne carte nautique dite « portulan » daterait de [[1290]] ; il s'agit de la ''[[Carta Pisana]]'' tracée peut-être à [[Gênes]], conservée au [[Département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France]] : elle apparaît en Méditerranée à l'époque des croisades, caractérisée par des échanges intenses entre l'Orient et l'Occident<ref>Mireille Pastoureau, ''Voies océanes'', Paris, 1990, p. 13</ref>. En effet, les marins italiens, notamment [[Gênes|génois]], [[Pise|pisans]] et [[Venise|vénitiens]] commercent à travers toute la Méditerranée et ressentent rapidement le besoin d'une carte pour se diriger facilement d'un port à un autre. Ils ne peuvent utiliser les cartes théologiques, appelées [[Carte en T|cartes en T]], pensées par l'Eglise catholique de cette époque. Ces dernières, loin d'être des représentations exactes du monde, ne peuvent convenir à la navigation. C'est ce besoin d'une cartographie empirique et réaliste qui entraîne la création du portulan. Vient en second un portulan de [[1296]] dans une charte [[Naples|napolitaine]]. Le cartographe [[Angelino Dulcert]], de l'[[école majorquine de cartographie]], fort réputée à cette époque<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=Ingrid- Houssaye Michienzi |titre=Datini, Majorque et le Maghreb (14e-15e siècles) |sous-titre=réseaux, espaces Méditerranéens et stratégies marchandes |lieu=Leiden/Boston |éditeur=Brill |année=2013 |pages totales=724 |passage=406 |isbn=978-90-04-24543-3 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=qiIJyoDYWfoC&pg=PA406&q=cartographie+cresques+majorque}}.</ref>, en a réalisé un en [[1339]]<ref>[[Monique de La Roncière]] et [[Michel Mollat du Jourdin]], ''Les portulans'', Paris, 1984</ref>.


Les marins, grâce à de savants calculs et aux [[Rhumb|lignes de rhumbs]] qui coupent les portulans, peuvent donner un cap à suivre à leur navire. Toutefois, ces cartes sont dépourvues de graticule (réseau de [[parallèles]] et de [[Méridien|méridiens]]) et ne permettent donc pas au navigateur qui la possède de connaître sa position précise. Au début du {{s-|XV}}, un événement majeur va faire évoluer la conception de ces cartes : [[Manuel Chrysoloras]] de [[Florence]] traduit un manuscrit et l’offre au pape [[Alexandre VI]] : c’est la redécouverte de la ''[[Géographie (Ptolémée)|Géographie]]'' de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]. Cet ouvrage deviendra même, avec la ''[[Bible]],'' l’un des premiers livres imprimés. En 1535, il est traduit en français. Ce traité de géographie antique stimule la recherche et l’envie de posséder une cartographie aussi précise que possible.
Les marins, grâce à de savants calculs et aux [[Rhumb|lignes de rhumbs]] qui coupent les portulans, peuvent donner un cap à suivre à leur navire. Toutefois, ces cartes sont dépourvues de graticule (réseau de [[parallèles]] et de [[Méridien|méridiens]]) et ne permettent donc pas au navigateur qui la possède de connaître sa position précise. Au début du {{s-|XV}}, un événement majeur va faire évoluer la conception de ces cartes : [[Manuel Chrysoloras]] de [[Florence]] traduit un manuscrit et l’offre au pape [[Alexandre VI]] : c’est la redécouverte de la ''[[Géographie (Ptolémée)|Géographie]]'' de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]. Cet ouvrage deviendra même, avec la ''[[Bible]],'' l’un des premiers livres imprimés. En 1535, il est traduit en français. Ce traité de géographie antique stimule la recherche et l’envie de posséder une cartographie aussi précise que possible.


Toutefois, le paradoxe de cette redécouverte, c’est qu’elle est à la fois un stimulant et un frein à cette recherche cartographique. Par exemple, [[Fra Mauro]], moine de [[Venise]], dont la mappemonde peut encore s’admirer à la [[Biblioteca Marciana|bibliothèque Marciana]], montre les limites de sa confiance dans les calculs et les hypothèses de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]: « Je ne crois pas tout ce que dit [[Claude Ptolémée|Ptolémée]] ». En effet, alors que la [[Carta Pisana|Carte Pisane]] avait presque parfaitement représenté la mer Méditerranée en [[longitude]], le retour à une conception ptoléméenne la distord d’un excès de 20°. C’est une régression quant aux calculs des dimensions terrestres. La cartographie ptoléméenne est alors mise à jour, complétée, rectifiée, révisée mais jamais abandonnée car elle apporte un principe essentiel et dont les cartes portulans étaient démunies jusqu’alors : le principe d’un mode de calcul du « point », indispensable à la construction d’une carte. Cette recherche d’une [[Projection cartographique|projection]] adéquate est un véritable stimulant dans la construction des portulans.
Toutefois, le paradoxe de cette redécouverte, c’est qu’elle est à la fois un stimulant et un frein à cette recherche cartographique. Par exemple, [[Fra Mauro]], moine de [[Venise]], dont la mappemonde peut encore s’admirer à la [[Biblioteca Marciana|bibliothèque Marciana]], montre les limites de sa confiance dans les calculs et les hypothèses de [[Claude Ptolémée|Ptolémée]]: « Je ne crois pas tout ce que dit [[Claude Ptolémée|Ptolémée]] ». En effet, alors que la [[Carta Pisana|Carte Pisane]] avait presque parfaitement représenté la mer Méditerranée en [[longitude]], le retour à une conception ptoléméenne la distord d’un excès de 20°. C’est une régression quant aux calculs des dimensions terrestres. La cartographie ptoléméenne est alors mise à jour, complétée, rectifiée, révisée mais jamais abandonnée car elle apporte un principe essentiel et dont les cartes portulans étaient démunies jusqu’alors : le principe d’un mode de calcul du « point », indispensable à la construction d’une carte. Cette recherche d’une [[Projection cartographique|projection]] adéquate est un véritable stimulant dans la construction des portulans.


En 1511, Bernardus Sylvanus tente de concilier portulan et « [[Projection cartographique|projection]] ptoléméenne » (basée sur le principe que tout point d'une carte est caractérisée par une [[latitude]] et une [[longitude]]). Cependant, le portulan ne peut adopter n’importe quelle [[Projection cartographique|projection]], car l’usage nautique fait que le navigateur doit pouvoir tracer sa route sur la carte : il lui faut une carte où la [[loxodromie]] soit une droite. [[Gérard Mercator|Gerardus Mercator]], scientifique hollandais, en 1569, répond à ces attentes en réalisant un chef-d'œuvre : une carte où il combine le savoir empirique des cartes-portulans, fondées sur le cap et la durée de navigation et la connaissance des scientifiques grecs de l'[[Antiquité]], à savoir la division de la surface terrestre en [[longitude]] et [[latitude]]. C'est la naissance de la [[projection de Mercator]], encore utilisée aujourd'hui par les marins du monde entier.
En 1511, Bernardus Sylvanus tente de concilier portulan et « [[Projection cartographique|projection]] ptoléméenne » (basée sur le principe que tout point d'une carte est caractérisé par une [[latitude]] et une [[longitude]]). Cependant, le portulan ne peut adopter n’importe quelle [[Projection cartographique|projection]], car l’usage nautique fait que le navigateur doit pouvoir tracer sa route sur la carte : il lui faut une carte où la [[loxodromie]] soit une droite. [[Gérard Mercator|Gerardus Mercator]], scientifique hollandais, en 1569, répond à ces attentes en réalisant un chef-d'œuvre : une carte où il combine le savoir empirique des cartes-portulans, fondées sur le cap et la durée de navigation et la connaissance des scientifiques grecs de l'[[Antiquité]], à savoir la division de la surface terrestre en [[longitude]] et [[latitude]]. C'est la naissance de la [[projection de Mercator]], encore utilisée aujourd'hui par les marins du monde entier.


Aux conventions purement cartographiques du {{XIIIe siècle}} se sont progressivement ajoutées des évocations pittoresques, de la faune, de la flore, des peuples ou des modes d'habitation et de navigation, dues à des artistes (peintres, enlumineurs) qui invitent à la découverte d'un ailleurs et leur confèrent une dimension encyclopédique. Les cartes portulans passent de statut d'outil de navigation à celui d'objet d'art et de connaissance.
Aux conventions purement cartographiques du {{XIIIe siècle}} se sont progressivement ajoutées des évocations pittoresques, de la faune, de la flore, des peuples ou des modes d'habitation et de navigation, dues à des artistes (peintres, enlumineurs) qui invitent à la découverte d'un ailleurs et leur confèrent une dimension encyclopédique. Les cartes portulans passent de statut d'outil de navigation à celui d'objet d'art et de connaissance.


Cartes manuscrites essentiellement d'apparat<ref>Les cartes embarquées en mer sont beaucoup plus frustes et très abîmées.</ref>, elles deviennent imprimées à partir du {{XVIe siècle}} qui voit leur commercialisation, notamment, assurée par les Hollandais<ref name="Expo">Exposition « L’âge d’or des cartes marines - Quand l’Europe découvrait le monde » à la BNF, 23 octobre 2012 au 27 janvier 2013</ref>, à [[Anvers]] et [[Amsterdam]], haut lieu de l'imprimerie (grâce à des hommes tels que [[Christophe Plantin]]) et du commerce maritime.
Cartes manuscrites essentiellement d'apparat<ref>Les cartes embarquées en mer sont beaucoup plus frustes et très abîmées.</ref>, elles deviennent imprimées à partir du {{XVIe siècle}} qui voit leur commercialisation, notamment, assurée par les Hollandais<ref name="Expo">Exposition « L’âge d’or des cartes marines - Quand l’Europe découvrait le monde » à la BNF, 23 octobre 2012 au 27 janvier 2013</ref>, à [[Anvers]] et [[Amsterdam]], haut lieu de l'imprimerie (grâce à des hommes tels que [[Christophe Plantin]]) et du commerce maritime.


Les cartes portulans disparaîtront progressivement au cours des {{s2-|XVII|XVIII}}.
Les cartes portulans disparaîtront progressivement au cours des {{s2-|XVII|XVIII}}.


== Inventaire des portulans en France ==
== Inventaire des portulans en France ==
Un programme national de recherches inauguré en janvier 2010 a pour but de localiser, d'identifier, de signaler et de numériser la centaine de portulans conservés dans les bibliothèques, archives et musées français.
Un programme national de recherches inauguré en {{date-|janvier 2010}} a pour but de localiser, d'identifier, de signaler et de numériser la centaine de portulans conservés dans les bibliothèques, archives et musées français.


== Portulans célèbres ==
== Portulans célèbres ==
* [[Carta Pisana]], XIII<sup>e</sup> s. (France, Bibliothèque nationale)
* [[Carta Pisana]], {{s-|XIII}} (France, Bibliothèque nationale) ;
* Portulan d'Angélino Dulcert, 1339 (France, Bibliothèque nationale)
* Portulan d'Angélino Dulcert, 1339 (France, Bibliothèque nationale) ;
* [[Portulan médicéen]], 1351 (Florence, bibliothèque Laurentienne)
* Portulan de Pascal Roiz, 1632 ([[musée de Dinan]]) ;
* [[Portulan médicéen]], 1351 (Florence, bibliothèque Laurentienne) ;
* [[Atlas de Pinelli–Walckenaer]], fin du {{s-|XIV}} (Londres, British Library)
* [[Atlas Corbitis]], fin du {{s-|XV}} (Venise, Bibliotheca Marciana)
* [[Atlas de Pinelli–Walckenaer]], fin du {{s-|XIV}} (Londres, British Library) ;
* [[Atlas Corbitis]], fin du {{s-|XV}} (Venise, Bibliotheca Marciana) ;
* [[Planisphère de King-Hamy]], 1502 (San Marino, bibliothèque Huntington)
* [[Planisphère de King-Hamy]], 1502 (San Marino, bibliothèque Huntington) ;
* Portulan de [[Pietro Coppo]], 1528, (France, Bibliothèque nationale).


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File:038 Portulan de Jean Guédard 1627.JPG|Portulan de [[Jean Guérard]] (1627)
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== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}
{{Références}}


== Voir aussi ==
== Annexes ==
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=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
{{Section vide ou incomplète}}
{{Section vide ou incomplète}}
* F. Tisserand, H. Andoyer, ''Leçons de Cosmographie,'' Armand Colin, 1907
* F. Tisserand, H. Andoyer, ''Leçons de Cosmographie,'' Armand Colin, 1907

* Chris Schüller, ''La mer et les étoiles, la cartographie maritime et céleste de l'Antiquité à nos jours,'' Place des Victoires, 2012
* Chris Schüller, ''La mer et les étoiles, la cartographie maritime et céleste de l'Antiquité à nos jours,'' Place des Victoires, 2012
* Chris Schüller, ''Dessiner le Monde, atlas de la cartographie du {{s-|XIV}} à 1914,'' Place des Victoires, 2010

* Monique de la Roncière, Michel Mollat du Jourdin, ''Les Portulans, cartes marines du {{sp-|XIII|au|XVII}},'' Nathan, 1984
* Chris Schüller, ''Dessiner le Monde, atlas de la cartographie du XIVè à 1914,'' Place des Victoires,2010
* Jacques Mille, Paul Fermon, « Une carte portulan récemment découverte. Peut-être une des plus anciennes conservées ? La carte d’Avignon », dans ''The Brussels Map Circle'', 2017 [https://www.bimcc.org/history-of-cartography/avignon-chart (''lire en ligne'')]

* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Catherine Hofmann|auteur2=Hélène Richard|auteur3=Emmanuelle Vagnon|titre=L'Âge d'or des cartes marines. Quand l'Europe découvrait le monde|lieu=Paris|éditeur=Coédition Bibliothèque nationale de France / Seuil|année=2012|pages totales=256|isbn=978-2-02-108443-6}}
* Monique de la Roncière, Michel Mollat du Jourdain, ''Les Portulans, cartes marines du XIIIè au XVIIè siècles,'' Nathan, 1984

* {{ouvrage|auteur=Catherine Hofmann, Hélène Richard et Emmanuelle Vagnon|titre=L'Âge d'or des cartes marines. Quand l'Europe découvrait le monde|éditeur=Coédition Bibliothèque nationale de France / Seuil|date=2012|pages totales=256|isbn=978-2-02-108443-6|lire en ligne=}}
* http://www.sbpm.be/wp-content/uploads/2012/04/Mercator.pdf


=== Articles connexes ===
=== Articles connexes ===
* [[carte géographique]]
* [[carte géographique]]
* [[carte marine]]
* [[carte marine]]
* [[rhumb]]
* [[Routier (instructions nautiques)]]
* [[réticule des vents]]
* [[réticule des vents]]
* [[marée]] : [[Johannes Kepler]], [[Galilée (savant)|Galilée]], [[Isaac Newton]]
* [[marée]] : [[Johannes Kepler]], [[Galilée (savant)|Galilée]], [[Isaac Newton]]
* ''{{Lien|langue=en|trad=La Cartografía Mallorquina|fr=La Cartografía Mallorquina}}''


=== Liens externes ===
=== Liens externes ===
* http://www.sbpm.be/wp-content/uploads/2012/04/Mercator.pdf
{{Autres projets|commons=Category:Portolan charts}}
* [http://expositions.bnf.fr/ciel/catalan/ Les portulans] - exposition virtuelle ([[Bibliothèque nationale de France]])
* [http://expositions.bnf.fr/ciel/catalan/ Les portulans] - exposition virtuelle ([[Bibliothèque nationale de France]])
* [http://classes.bnf.fr/dossisup/grands/ec101a.htm Francesco Oliva, carte-portulan] de la [[Méditerranée]], Messine, 1603 (BNF)
* [http://classes.bnf.fr/dossisup/grands/ec101a.htm Francesco Oliva, carte-portulan] de la [[Méditerranée]], Messine, 1603 (BNF)
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[[Catégorie:Type de carte]]
[[Catégorie:Type de carte]]
[[Catégorie:Nautisme]]
[[Catégorie:Maritime]]

Dernière version du 27 mars 2024 à 12:06

Un portulan de 1541.
Carte-portulan anonyme originaire du Maghreb, fabriqué en papier au début du XIVe siècle ; il s'agit de l'un des plus vieux portulans découverts.

Un portulan, ou carte-portulan, (de l'italien portolano, livre d’instructions nautiques), aussi appelé « carte à rhumbs », est une sorte de carte de navigation, utilisée du XIIIe siècle au XVIIIe siècle, servant essentiellement à repérer les ports et connaître les dangers qui peuvent les entourer : courants, hauts-fonds... Les portulans se distinguent par deux caractères graphiques spécifiques : les lignes de vents ou de rhumb qui colorent et quadrillent les surfaces marines, l'alignement perpendiculaire au trait de côte des noms de lieux (havres et ports colorés différemment selon leur importance). Des roses des vents permettent en outre de repérer la route et de déterminer le cap à suivre.

Au premier abord, ces cartes peuvent paraître incompréhensibles aux non-initiés car le portulan est réalisé comme une toile d’araignée (entrelacs de lignes vertes et rouges). Elle se construit de seize lignes de rhumb, de roses des vents, de seize points nodaux et de seize aires de vents de 22°30. Cela forme des parallélogrammes, des carrés et des rectangles. Ces tracés forment ce qu'on appelle alors un marteloire (de l'italien, mar : la mer et teloio : la toile).

Peut-on voir dans cette construction des méridiens et des parallèles ? Cela semble peu probable car les marins italiens de la fin du XIIIe siècle et du XIVe siècle n’ont pas encore connaissance d’un quelconque système de coordonnées, système qui ne sera redécouvert qu’avec la récupération de la Géographie de Ptolémée. C'est cette absence qui fait le charme et l'originalité de ces cartes, construites sans système de projection, pourtant supposé nécessaire pour tout passage d'une surface sphérique (la Terre) à sa représentation plane.

À l'époque, il existait deux types de portulans, le premier, peut-être plus grossièrement dessiné, dépourvu de décoration et de fioriture, sert aux marins pour se repérer et naviguer en sécurité en mer Méditerranée. Le deuxième type, plus connu aujourd'hui car de nombreux exemplaires en sont encore conservés (notamment à la Bibliothèque Nationale de France) est un objet d'art, richement décoré, prisé des collectionneurs et des cours royales. Ces portulans sont en effet le symbole d'une connaissance approfondie des mers et du pouvoir commercial et naval d'un royaume ou autre pouvoir de l'époque. D'ailleurs, à l'époque des Grandes découvertes, ils sont considérés par les royaumes du Portugal et d'Espagne comme des secrets d'État, notamment à partir du traité de Tordesillas établi en 1494. Ils disparaissent au XVIIIe siècle, qui voit le développement d'innovations techniques, notamment l'horloge de marine, permettant l'élaboration de cartes plus détaillées et surtout plus précises.

L'établissement de ces cartes nautiques est basé sur le mode de navigation par cabotage : le bateau se déplace à cette époque à proximité des côtes, ce qui permet d'effectuer une série de mesures visuelles, en fonction du cap, et de les annoter (pour les navigateurs suivants). Un portulan est fondé sur des observations et des relevés faits avec des outils assez élémentaires : la boussole, le sextant et l'alidade. C'est d'ailleurs l'invention de la boussole qui place désormais le nord en haut des cartes, les cartes théologiques du Moyen Âge plaçant généralement l'orient en haut de la carte (lieu probable du paradis terrestre). Il s'agit évidemment du nord magnétique et non pas du nord géographique.

Les premiers portulans sont remarquables par leur précision. En effet, la Carte Pisane, considérée comme l'un des premiers portulans, ne déforme la mer Méditerranée que d'un seul degré par rapport à la réalité, soit environ 90 kilomètres. Aujourd'hui encore les chercheurs ignorent l'origine exacte des cartes-portulans, certains hésitent entre un apport de la civilisation islamique tandis que d'autres pensent plutôt à une origine européenne[1],[2].

Histoire[modifier | modifier le code]

Carta Pisana, le premier portulan, créé en 1290..

La plus ancienne carte nautique dite « portulan » daterait de 1290 ; il s'agit de la Carta Pisana tracée peut-être à Gênes, conservée au Département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France : elle apparaît en Méditerranée à l'époque des croisades, caractérisée par des échanges intenses entre l'Orient et l'Occident[3]. En effet, les marins italiens, notamment génois, pisans et vénitiens commercent à travers toute la Méditerranée et ressentent rapidement le besoin d'une carte pour se diriger facilement d'un port à un autre. Ils ne peuvent utiliser les cartes théologiques, appelées cartes en T, pensées par l'Eglise catholique de cette époque. Ces dernières, loin d'être des représentations exactes du monde, ne peuvent convenir à la navigation. C'est ce besoin d'une cartographie empirique et réaliste qui entraîne la création du portulan. Vient en second un portulan de 1296 dans une charte napolitaine. Le cartographe Angelino Dulcert, de l'école majorquine de cartographie, fort réputée à cette époque[4], en a réalisé un en 1339[5].

Les marins, grâce à de savants calculs et aux lignes de rhumbs qui coupent les portulans, peuvent donner un cap à suivre à leur navire. Toutefois, ces cartes sont dépourvues de graticule (réseau de parallèles et de méridiens) et ne permettent donc pas au navigateur qui la possède de connaître sa position précise. Au début du XVe siècle, un événement majeur va faire évoluer la conception de ces cartes : Manuel Chrysoloras de Florence traduit un manuscrit et l’offre au pape Alexandre VI : c’est la redécouverte de la Géographie de Ptolémée. Cet ouvrage deviendra même, avec la Bible, l’un des premiers livres imprimés. En 1535, il est traduit en français. Ce traité de géographie antique stimule la recherche et l’envie de posséder une cartographie aussi précise que possible.

Toutefois, le paradoxe de cette redécouverte, c’est qu’elle est à la fois un stimulant et un frein à cette recherche cartographique. Par exemple, Fra Mauro, moine de Venise, dont la mappemonde peut encore s’admirer à la bibliothèque Marciana, montre les limites de sa confiance dans les calculs et les hypothèses de Ptolémée: « Je ne crois pas tout ce que dit Ptolémée ». En effet, alors que la Carte Pisane avait presque parfaitement représenté la mer Méditerranée en longitude, le retour à une conception ptoléméenne la distord d’un excès de 20°. C’est une régression quant aux calculs des dimensions terrestres. La cartographie ptoléméenne est alors mise à jour, complétée, rectifiée, révisée mais jamais abandonnée car elle apporte un principe essentiel et dont les cartes portulans étaient démunies jusqu’alors : le principe d’un mode de calcul du « point », indispensable à la construction d’une carte. Cette recherche d’une projection adéquate est un véritable stimulant dans la construction des portulans.

En 1511, Bernardus Sylvanus tente de concilier portulan et « projection ptoléméenne » (basée sur le principe que tout point d'une carte est caractérisé par une latitude et une longitude). Cependant, le portulan ne peut adopter n’importe quelle projection, car l’usage nautique fait que le navigateur doit pouvoir tracer sa route sur la carte : il lui faut une carte où la loxodromie soit une droite. Gerardus Mercator, scientifique hollandais, en 1569, répond à ces attentes en réalisant un chef-d'œuvre : une carte où il combine le savoir empirique des cartes-portulans, fondées sur le cap et la durée de navigation et la connaissance des scientifiques grecs de l'Antiquité, à savoir la division de la surface terrestre en longitude et latitude. C'est la naissance de la projection de Mercator, encore utilisée aujourd'hui par les marins du monde entier.

Aux conventions purement cartographiques du XIIIe siècle se sont progressivement ajoutées des évocations pittoresques, de la faune, de la flore, des peuples ou des modes d'habitation et de navigation, dues à des artistes (peintres, enlumineurs) qui invitent à la découverte d'un ailleurs et leur confèrent une dimension encyclopédique. Les cartes portulans passent de statut d'outil de navigation à celui d'objet d'art et de connaissance.

Cartes manuscrites essentiellement d'apparat[6], elles deviennent imprimées à partir du XVIe siècle qui voit leur commercialisation, notamment, assurée par les Hollandais[7], à Anvers et Amsterdam, haut lieu de l'imprimerie (grâce à des hommes tels que Christophe Plantin) et du commerce maritime.

Les cartes portulans disparaîtront progressivement au cours des XVIIe et XVIIIe siècles.

Inventaire des portulans en France[modifier | modifier le code]

Un programme national de recherches inauguré en a pour but de localiser, d'identifier, de signaler et de numériser la centaine de portulans conservés dans les bibliothèques, archives et musées français.

Portulans célèbres[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Roel Nicolai, The enigma of the origin of Portolan charts : a geodetic analysis of the hypothesis of a medieval origin, Leiden/Boston, BRILL, , 544 p. (ISBN 978-90-04-28512-5, lire en ligne)
  2. Doctorat Roel Nicolai. Youtube, 25 feb. 2015
  3. Mireille Pastoureau, Voies océanes, Paris, 1990, p. 13
  4. Ingrid- Houssaye Michienzi, Datini, Majorque et le Maghreb (14e-15e siècles) : réseaux, espaces Méditerranéens et stratégies marchandes, Leiden/Boston, Brill, , 724 p. (ISBN 978-90-04-24543-3, lire en ligne), p. 406.
  5. Monique de La Roncière et Michel Mollat du Jourdin, Les portulans, Paris, 1984
  6. Les cartes embarquées en mer sont beaucoup plus frustes et très abîmées.
  7. Exposition « L’âge d’or des cartes marines - Quand l’Europe découvrait le monde » à la BNF, 23 octobre 2012 au 27 janvier 2013

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • F. Tisserand, H. Andoyer, Leçons de Cosmographie, Armand Colin, 1907
  • Chris Schüller, La mer et les étoiles, la cartographie maritime et céleste de l'Antiquité à nos jours, Place des Victoires, 2012
  • Chris Schüller, Dessiner le Monde, atlas de la cartographie du XIVe siècle à 1914, Place des Victoires, 2010
  • Monique de la Roncière, Michel Mollat du Jourdin, Les Portulans, cartes marines du XIIIe au XVIIe siècle, Nathan, 1984
  • Jacques Mille, Paul Fermon, « Une carte portulan récemment découverte. Peut-être une des plus anciennes conservées ? La carte d’Avignon », dans The Brussels Map Circle, 2017 (lire en ligne)
  • Catherine Hofmann, Hélène Richard et Emmanuelle Vagnon, L'Âge d'or des cartes marines. Quand l'Europe découvrait le monde, Paris, Coédition Bibliothèque nationale de France / Seuil, , 256 p. (ISBN 978-2-02-108443-6)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]