« Prix Nobel de littérature » : différence entre les versions

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{{Infobox Récompense
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Le '''prix Nobel de littérature''' (''{{lang|se|Nobelpriset i litteratur}}'' en [[suédois]]) récompense annuellement, depuis [[1901]], un [[écrivain]] ayant rendu de grands services à l'humanité grâce à une œuvre littéraire qui, selon le testament du chimiste suédois [[Alfred Nobel]], « a fait la preuve d'un puissant idéal »<ref>{{lang|sv|''den som inom litteraturen har producerat det utmärktaste idealisk riktning}}''. Le terme ''idealisk'' peut se traduire par « idéaliste » ou « idéal » {{en}} [http://books.guardian.co.uk/review/story/0,,2189673,00.html ''Ink and Spit''], John Sutherland, ''[[The Guardian]]'', {{date-|13 octobre 2007}}.</ref>.
Le '''prix Nobel de littérature''' (''{{lang|se|Nobelpriset i litteratur}}'' en [[suédois]]) récompense annuellement, depuis [[1901]], un [[écrivain]] ayant rendu de grands services à l'humanité grâce à une œuvre littéraire qui, selon le testament du chimiste suédois [[Alfred Nobel]], « a fait la preuve d'un puissant idéal »<ref>{{lang|sv|''den som inom litteraturen har producerat det utmärktaste idealisk riktning}}''. Le terme ''idealisk'' peut se traduire par « idéaliste » ou « idéal » {{en}} [http://books.guardian.co.uk/review/story/0,,2189673,00.html ''Ink and Spit''], John Sutherland, ''[[The Guardian]]'', {{date-|13 octobre 2007}}.</ref>.
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Récompense considérée comme la plus prestigieuse et la plus médiatique au monde, le prix Nobel de littérature met en lumière un auteur et ses travaux. Il lui assure une promotion à l'échelle planétaire, une renommée internationale et une certaine aisance financière.
Récompense considérée comme la plus prestigieuse et la plus médiatique au monde, le prix Nobel de littérature met en lumière un auteur et ses travaux. Il lui assure une promotion à l'échelle planétaire, une renommée internationale et une certaine aisance financière.


Il n'est pas rare que le prix Nobel prenne une signification politique, ayant parfois valeur de désaveu face à des [[Autoritarisme|régimes autoritaires]]. En effet, plusieurs écrivains exilés, dissidents, contestataires, persécutés ou interdits de publication dans leur pays ont été récompensés, tels [[Miguel Ángel Asturias]], [[Boris Pasternak]], [[Pablo Neruda]], [[Alexandre Soljenitsyne]] et [[Gao Xingjian]]<ref name="repu"/>{{,}}<ref>{{article|auteur1=Natalie Levisalles|url=http://www.liberation.fr/culture/2000/12/11/gao-xingjian-au-pays-des-contes-de-fees_347261|titre=Gao Xingjian au pays des contes de fées|périodique=Libération|date=2000-12-11 }}.</ref>.
Il n'est pas rare que le prix Nobel prenne une signification politique, ayant parfois valeur de désaveu face à des [[Autoritarisme|régimes autoritaires]]. En effet, plusieurs écrivains exilés, dissidents, contestataires, persécutés ou interdits de publication dans leur pays ont été récompensés, tels [[Miguel Ángel Asturias]], [[Boris Pasternak]], [[Pablo Neruda]], [[Alexandre Soljenitsyne]] et [[Gao Xingjian]]<ref name="repu"/>{{,}}<ref>{{article|auteur1=Natalie Levisalles|url=http://www.liberation.fr/culture/2000/12/11/gao-xingjian-au-pays-des-contes-de-fees_347261|titre=Gao Xingjian au pays des contes de fées|périodique=[[Libération (journal)|Libération]]|date=2000-12-11 }}.</ref>.


Le prix Nobel de littérature honore avant tout les [[Roman (littérature)|romanciers]], [[Essai (littérature)|essayistes]], [[poète]]s et [[dramaturge]]s. Toutefois, la liste des lauréats inclut également cinq philosophes ([[Rudolf Christoph Eucken]], [[Henri Bergson]], [[Albert Camus]] et [[Bertrand Russell]]) dont [[Jean-Paul Sartre]] qui le refusa, un historien ([[Theodor Mommsen]]), un [[homme d'État]] ([[Winston Churchill]], distingué aussi pour ses discours politiques), une nouvelliste ([[Alice Munro]])<ref>{{article|url=http://www.lepoint.fr/culture/alice-munro-prix-nobel-de-litterature-2013-10-10-2013-1741365_3.php|titre=Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013|périodique=[[Le Point]]|date=2013-10-10 }}.</ref>{{,}}<ref>{{article|url=http://quebec.huffingtonpost.ca/2013/10/10/alice-munro-prix-nobel-litterature_n_4076480.html|titre=Le prix Nobel de littérature décerné à la Canadienne Alice Munro|périodique=[[Huffington Post]]|date=2013-10-10}}.</ref> et un [[auteur-compositeur-interprète]] ([[Bob Dylan]]).
Le prix Nobel de littérature honore avant tout les [[Roman (littérature)|romanciers]], [[Essai (littérature)|essayistes]], [[poète]]s et [[dramaturge]]s. Toutefois, la liste des lauréats inclut également cinq philosophes ([[Rudolf Christoph Eucken]], [[Henri Bergson]], [[Albert Camus]] et [[Bertrand Russell]]) dont [[Jean-Paul Sartre]] qui le refusa, un historien ([[Theodor Mommsen]]), un [[homme d'État]] ([[Winston Churchill]], distingué aussi pour ses discours politiques), une nouvelliste ([[Alice Munro]])<ref>{{article|url=http://www.lepoint.fr/culture/alice-munro-prix-nobel-de-litterature-2013-10-10-2013-1741365_3.php|titre=Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013|périodique=[[Le Point]]|date=2013-10-10 }}.</ref>{{,}}<ref>{{article|url=http://quebec.huffingtonpost.ca/2013/10/10/alice-munro-prix-nobel-litterature_n_4076480.html|titre=Le prix Nobel de littérature décerné à la Canadienne Alice Munro|périodique=[[Huffington Post]]|date=2013-10-10}}.</ref> et un [[auteur-compositeur-interprète]] ([[Bob Dylan]]).


== Nominations et mode de fonctionnement ==
== Nominations et mode de fonctionnement ==
[[Image:Nobel2008Literature news conference1.jpg|vignette|300px|Annonce du prix Nobel de littérature à [[Stockholm]] en 2008.]]
[[Image:Nobel2008Literature news conference1.jpg|vignette|Annonce du prix Nobel de littérature à [[Stockholm]] en 2008.]]
Chaque fin d'année, le prix Nobel est attribué par l'[[Académie suédoise]]<ref>{{en}} [http://nobelprize.org/nomination/literature ''Nomination for the Nobel Prize in Literature'']</ref>. Celle-ci constitue ses nominations avec l'aide d'autres membres d'académies et de sociétés littéraires nationales et étrangères, d'éminents professeurs d'université en [[littérature]], [[langue]] et [[linguistique]], d'anciens lauréats du prix ou encore des présidents d'associations d'écrivains, représentant la culture littéraire de leurs pays<ref>{{en}} [http://nobelprize.org/nomination/literature/nominators.html ''Qualified Nominators – The Nobel Prize in Literature''].</ref>. L'Académie compose le [[Comité Nobel]] (rattaché à la [[fondation Nobel]]) avec 5 de ses membres, désignés par cooptation pour 3 ans<ref name="SvAkademien">[http://www.svenskaakademien.se/en/the_nobel_prize_in_literature/nobel_prize_in_literature/how_nobel_laureates_in_literature_are_chosen ''How Nobel laureates are chosen''] sur le site de l'Académie suédoise.</ref>. Ces 5 académiciens vérifient la pertinence et le critère d'éligibilité des écrivains secrètement nommés pour la récompense<ref name="SvAkademien"/>. Durant l'automne, un courrier du Comité est expédié à près de 700 adresses afin d'être retourné pour le choix de l'année suivante<ref name="SvAkademien"/>. Toutes les personnes ou institutions sollicitées proposent en conséquence une liste de plusieurs noms<ref name="SvAkademien"/>. Il leur est fortement conseillé de détailler, expliquer ou motiver leurs choix bien que le règlement de la fondation Nobel ne l'oblige pas<ref name="SvAkademien"/>. Il est en revanche formellement interdit aux personnalités démarchées de voter pour elles-mêmes si elles sont éligibles pour le prix<ref name="SvAkademien"/>. Près de 350 noms sont proposés annuellement aux membres du Comité qui les éliminent à partir du {{1er février}} pour ne garder que 15 à 20 candidatures en avril<ref name="process">{{en}} [http://nobelprize.org/nomination/literature/process.html ''Nomination and Selection of the Nobel Laureates in Literature'']</ref>. Cette première sélection est soumise au préalable à tous les membres de l'Académie qui procèdent à des recommandations<ref name="SvAkademien"/>. Fin mai, le Comité Nobel fixe une liste finale de 5 noms, avalisée par l'ensemble des académiciens qui aura alors à désigner le récipiendaire du prix<ref name="process"/>. Si l'un des auteurs proposés n'est pas publié dans une langue accessible à la majorité du jury, l'Académie peut réclamer une traduction spéciale<ref name="SvAkademien"/>. De même, si un écrivain nommé est méconnu du Comité mais semble légitime pour le prix, la fondation Nobel dépêche des experts qui éclairent l'Académie sur la portée de l'œuvre du candidat potentiel<ref name="SvAkademien"/>. Après avoir étudié en détail, durant l'été, les ouvrages des auteurs en lice, les jurés organisent plusieurs discussions<ref name="SvAkademien"/>. Il arrive souvent que les travaux d'un écrivain, nommé à plusieurs reprises, soient déjà lus<ref name="SvAkademien"/>. Dans ce cas, l'Académie prend en compte les nouvelles publications de l'auteur sélectionné<ref name="SvAkademien"/>. En conclusion des débats, début octobre, le jury procède à un vote<ref name="SvAkademien"/>. La personne qui obtient plus de la moitié des voix est désignée comme lauréate du prix. Les 4 recalés sont réinscrits d'office pour les sélections de l'année suivante<ref name="repu">{{lien web |titre=La République des Lettres |url=http://www.republique-des-lettres.fr/10532-prix-nobel-litterature.php |site=republique-des-lettres.fr |consulté le=04-05-2023}}.</ref>. Le jury peut aussi déroger à la règle à la suite d'une décision exceptionnelle comme dans le cas très rare d'attribution d'un prix double ou conjoint. Ce mode de fonctionnement est similaire pour toutes les autres catégories du prix Nobel. L'identité du récipiendaire est révélée par le secrétaire perpétuel de l'Académie, courant [[octobre]], lors d'une conférence de presse dans le bâtiment de [[Börshuset]], situé dans la [[Gamla stan|vieille ville]] de [[Stockholm]]. Le contenu des délibérations et la liste finale des 5 personnalités sont gardés secrets pendant 50 ans<ref>{{Article |titre=Le Clézio parmi les favoris du Nobel de littérature |périodique=[[La Libre Belgique]] |date=03-10-2008 |lire en ligne=http://www.lalibre.be/culture/livres/article/450202/le-clezio-parmi-les-favoris-du-nobel-de-litterature.html |consulté le=11-08-2020}}.</ref>. Le nom du vainqueur fait en conséquence l'objet de spéculations au sein des milieux littéraires.
Chaque fin d'année, le prix Nobel est attribué par l'[[Académie suédoise]]<ref name="nomination">{{Lien web|lang=en|url=https://www.nobelprize.org/nomination/literature/|titre=Nomination and selection of literature laureates|site=nobelprize.org}}.</ref>. Celle-ci constitue ses nominations avec l'aide d'autres membres d'académies et de sociétés littéraires nationales et étrangères, d'éminents professeurs d'université en [[littérature]], [[langue]] et [[linguistique]], d'anciens lauréats du prix ou encore des présidents d'associations d'écrivains, représentant la culture littéraire de leurs pays<ref name="nomination" />. L'Académie compose le [[Comité Nobel]] (rattaché à la [[fondation Nobel]]) avec 5 de ses membres, désignés par cooptation pour 3 ans<ref name="SvAkademien">[http://www.svenskaakademien.se/en/the_nobel_prize_in_literature/nobel_prize_in_literature/how_nobel_laureates_in_literature_are_chosen ''How Nobel laureates are chosen''] sur le site de l'Académie suédoise.</ref>. Ces 5 académiciens vérifient la pertinence et le critère d'éligibilité des écrivains secrètement nommés pour la récompense<ref name="SvAkademien"/>. Durant l'automne, un courrier du Comité est expédié à près de 700 adresses afin d'être retourné pour le choix de l'année suivante<ref name="SvAkademien"/>. Toutes les personnes ou institutions sollicitées proposent en conséquence une liste de plusieurs noms<ref name="SvAkademien"/>. Il leur est fortement conseillé de détailler, expliquer ou motiver leurs choix bien que le règlement de la fondation Nobel ne l'oblige pas<ref name="SvAkademien"/>. Il est en revanche formellement interdit aux personnalités démarchées de voter pour elles-mêmes si elles sont éligibles pour le prix<ref name="SvAkademien"/>. Près de 350 noms sont proposés annuellement aux membres du Comité qui les éliminent à partir du {{1er février}} pour ne garder que 15 à 20 candidatures en avril<ref name="nomination" />. Cette première sélection est soumise au préalable à tous les membres de l'Académie qui procèdent à des recommandations<ref name="SvAkademien"/>. Fin mai, le Comité Nobel fixe une liste finale de 5 noms, avalisée par l'ensemble des académiciens qui aura alors à désigner le récipiendaire du prix<ref name="nomination"/>. Si l'un des auteurs proposés n'est pas publié dans une langue accessible à la majorité du jury, l'Académie peut réclamer une traduction spéciale<ref name="SvAkademien"/>. De même, si un écrivain nommé est méconnu du Comité mais semble légitime pour le prix, la fondation Nobel dépêche des experts qui éclairent l'Académie sur la portée de l'œuvre du candidat potentiel<ref name="SvAkademien"/>. Après avoir étudié en détail, durant l'été, les ouvrages des auteurs en lice, les jurés organisent plusieurs discussions<ref name="SvAkademien"/>. Il arrive souvent que les travaux d'un écrivain, nommé à plusieurs reprises, soient déjà lus<ref name="SvAkademien"/>. Dans ce cas, l'Académie prend en compte les nouvelles publications de l'auteur sélectionné<ref name="SvAkademien"/>. En conclusion des débats, début octobre, le jury procède à un vote<ref name="SvAkademien"/>. La personne qui obtient plus de la moitié des voix est désignée comme lauréate du prix. Les 4 recalés sont réinscrits d'office pour les sélections de l'année suivante<ref name="repu">{{lien web |titre=La République des Lettres |url=http://www.republique-des-lettres.fr/10532-prix-nobel-litterature.php |site=republique-des-lettres.fr |consulté le=04-05-2023}}.</ref>. Le jury peut aussi déroger à la règle à la suite d'une décision exceptionnelle comme dans le cas très rare d'attribution d'un prix double ou conjoint. Ce mode de fonctionnement est similaire pour toutes les autres catégories du prix Nobel. L'identité du récipiendaire est révélée par le secrétaire perpétuel de l'Académie, courant [[octobre]], lors d'une conférence de presse dans le bâtiment de [[Börshuset]], situé dans la [[Gamla stan|vieille ville]] de [[Stockholm]]. Le contenu des délibérations et la liste finale des 5 personnalités sont gardés secrets pendant 50 ans<ref>{{Article |titre=Le Clézio parmi les favoris du Nobel de littérature |périodique=[[La Libre Belgique]] |date=03-10-2008 |lire en ligne=http://www.lalibre.be/culture/livres/article/450202/le-clezio-parmi-les-favoris-du-nobel-de-litterature.html |consulté le=11-08-2020}}.</ref>. Le nom du vainqueur fait en conséquence l'objet de spéculations au sein des milieux littéraires.


Même si le montant de la somme inhérente au prix a évolué au cours de son histoire, il est fixé aujourd'hui à 10 millions de [[Couronne suédoise|couronnes suédoises]], à savoir environ un million d'[[euro]]s<ref>{{en}} [http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/amount.html ''Nobel Prize Amount in Literature'']</ref>. Chaque personnalité récompensée se voit décerner, par le roi de [[Suède]], la médaille d'or et le diplôme de la [[fondation Nobel]] au cours d'une cérémonie de remise des prix, le {{date-|10 décembre}} à [[Stockholm]], date-anniversaire de la mort d'[[Alfred Nobel]]. Auparavant, le gagnant doit faire un discours devant les membres de l'Académie suédoise dans lequel il définit son œuvre et ses aspirations artistiques.
Même si le montant de la somme inhérente au prix a évolué au cours de son histoire, il est fixé aujourd'hui à 10 millions de [[Couronne suédoise|couronnes suédoises]], à savoir environ un million d'[[euro]]s<ref name="facts" />. Chaque personnalité récompensée se voit décerner, par le roi de [[Suède]], la médaille d'or et le diplôme de la [[fondation Nobel]] au cours d'une cérémonie de remise des prix, le {{date-|10 décembre}} à [[Stockholm]], date-anniversaire de la mort d'[[Alfred Nobel]]. Auparavant, le gagnant doit faire un discours devant les membres de l'Académie suédoise dans lequel il définit son œuvre et ses aspirations artistiques.


Depuis sa création, le prix est revenu à 17 femmes et 5 membres de l'Académie suédoise, élus de manière antérieure ou postérieure à la réception de leur récompense<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Facts on the Nobel Prize in Literature|url=http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/facts/literature/index.html|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=04 mai 2014}}</ref>. La personnalité la plus âgée à avoir obtenu cette distinction est [[Doris Lessing]] (1919-2013), récompensée en 2007 à {{Durée|22|10|1919|11|10|2007}}. Le plus jeune lauréat est [[Rudyard Kipling]] (1865-1936), récompensé en 1907 à 41 ans.
Depuis sa création, le prix est revenu à 17 femmes et 5 membres de l'Académie suédoise, élus de manière antérieure ou postérieure à la réception de leur récompense<ref name="facts">{{Lien web|langue=en|titre=Facts on the Nobel Prize in Literature|url=https://www.nobelprize.org/prizes/facts/facts-on-the-nobel-prize-in-literature/|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=04 mai 2014}}.</ref>. La personnalité la plus âgée à avoir obtenu cette distinction est [[Doris Lessing]] (1919-2013), récompensée en 2007 à {{Durée|22|10|1919|11|10|2007}}. Le plus jeune lauréat est [[Rudyard Kipling]] (1865-1936), récompensé en 1907 à 41 ans.


== Histoire controversée ==
== Histoire controversée ==
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=== Premières années ===
=== Premières années ===
[[Image:Sully Prudhomme.jpg|thumb|Le poète français [[Sully Prudhomme]] est le premier lauréat du prix Nobel de littérature.]]
[[Image:Sully Prudhomme.jpg|thumb|Le poète français [[Sully Prudhomme]] est le premier lauréat du prix Nobel de littérature.]]
Lors des premières années de l'attribution du prix Nobel, le critère d'« idéalisme », fixé par le testament d'Alfred Nobel<ref>[http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/articles/espmark/index.html Article de Kjell Espmark] du 3 décembre 1999.</ref> est la principale cause de l'oubli d'écrivains et de dramaturges aussi importants que [[Léon Tolstoï]], [[Anton Tchekhov]], [[Émile Zola]], [[August Strindberg]], [[Jack London]], [[Henry James]], [[Thomas Hardy (écrivain)|Thomas Hardy]] ou encore [[Henrik Ibsen]] dont les œuvres sont jugées trop pessimistes. Selon l'historien de la littérature François Comba, l'Académie suédoise, sous l'influence du secrétaire perpétuel Carl David af Wirsén, rapproche au départ la notion d'« idéalisme » de « patriotisme » et met à l'honneur toute la littérature nationaliste ou régionaliste européenne ([[Theodor Mommsen]], [[Henryk Sienkiewicz]], [[Frédéric Mistral]]…)<ref name="MCoquet 2012">{{article|prénom1=Marion|nom1=Coquet|url=http://www.lepoint.fr/culture/nobel-de-litterature-les-dessous-du-prix-11-10-2012-1515862_3.php|titre=Nobel de littérature, les dessous du prix|consulté le=10 octobre 13|périodique=Le Point|jour=12|mois=octobre|année=2012}}</ref>. Pendant la [[Première Guerre mondiale]] à laquelle la [[Suède]] ne participe pas, le comité revendique une ligne de neutralité, récompensant des auteurs de pays non-belligérants (comme le [[Danemark]]) ou des écrivains tels que [[Romain Rolland]] dont la vision universaliste et optimiste fait consensus<ref name="MCoquet 2012"/>.
Lors des premières années de l'attribution du prix Nobel, le critère d'« idéalisme », fixé par le testament d'Alfred Nobel<ref>[http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/articles/espmark/index.html Article de Kjell Espmark] du 3 décembre 1999.</ref> est la principale cause de l'oubli d'écrivains et de dramaturges aussi importants que [[Léon Tolstoï]], [[Anton Tchekhov]], [[Émile Zola]], [[August Strindberg]], [[Jack London]], [[Henry James]], [[Thomas Hardy (écrivain)|Thomas Hardy]] ou encore [[Henrik Ibsen]] dont les œuvres sont jugées trop pessimistes. Selon l'historien de la littérature François Comba, l'Académie suédoise, sous l'influence du secrétaire perpétuel Carl David af Wirsén, rapproche au départ la notion d'« idéalisme » de « patriotisme » et met à l'honneur toute la littérature nationaliste ou régionaliste européenne ([[Theodor Mommsen]], [[Henryk Sienkiewicz]], [[Frédéric Mistral]]…)<ref name="MCoquet 2012">{{article|prénom1=Marion|nom1=Coquet|url=http://www.lepoint.fr/culture/nobel-de-litterature-les-dessous-du-prix-11-10-2012-1515862_3.php|titre=Nobel de littérature, les dessous du prix|consulté le=10 octobre 13|périodique=Le Point|jour=12|mois=octobre|année=2012}}.</ref>. Pendant la [[Première Guerre mondiale]] à laquelle la [[Suède]] ne participe pas, le comité revendique une ligne de neutralité, récompensant des auteurs de pays non-belligérants (comme le [[Danemark]]) ou des écrivains tels que [[Romain Rolland]] dont la vision universaliste et optimiste fait consensus<ref name="MCoquet 2012"/>.


Dans les [[années 1920]], l'Académie change de ligne de conduite et prime des écrivains ouvertement sceptiques et critiques comme [[Carl Spitteler]] et [[Anatole France]] dont l'œuvre s'accommode mal avec l'idéal exigé par Alfred Nobel<ref name="MCoquet 2012"/>. Dans les [[années 1930]], le jury s'ouvre au continent américain et récompense [[Sinclair Lewis]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Aucun écrivain allemand ou autrichien susceptible de gêner [[Adolf Hitler]] n'est distingué à l'instar de [[Bertolt Brecht]], [[Hermann Broch]], [[Joseph Roth]], [[Stefan Zweig]] ou encore [[Robert Musil]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Pour cette raison, l'écrivain tchécoslovaque [[Karel Čapek]], farouchement opposé au [[nazisme|national-socialisme]] et nommé sept fois pour le prix entre [[1932]] et [[1938]], est également écarté<ref>{{Ouvrage|auteur=Peter Swirski|titre=From Lowbrow to Nobrow|éditeur=McGill Queen's University Press|url=http://www.mqup.ca}}.</ref>. En [[1931]], la récompense est attribuée à l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie [[Erik Axel Karlfeldt]], décédé en avril. Auparavant, l'auteur avait déjà été proposé par ses collègues mais il aurait refusé le prix en [[1919]]<ref>[http://www.karlfeldt.org/Karlfeldt/Nobelpriset.html Karlfeldtsamfundet] {{Lien archive|url=http://www.karlfeldt.org/Karlfeldt/Nobelpriset.html |horodatage archive=20110726213309 |titre=Copie archivée }} (suédois). Retrieved 2010-02-17.</ref>. Il s'agit de la seule fois dans l'histoire des Nobel que la distinction est décernée intentionnellement de manière posthume<ref>En [[2011]], le [[prix Nobel de physiologie ou médecine|prix Nobel de médecine]] est décerné à [[Ralph Steinman]] alors que ce dernier vient de mourir quelques jours auparavant sans que le jury en soit informé ; le prix est maintenu malgré les statuts.</ref>. Bien que réfugié en France et déchu de sa nationalité soviétique, [[Ivan Bounine]] devient le premier écrivain de langue russe à être distingué en [[1933]] car le comité préfère écarter [[Maxime Gorki]], jugé trop proche de [[Staline]] et se ranger à l'avis d'un neveu d'[[Alfred Nobel]] dont les faveurs allaient à Bounine<ref>{{article|prénom1=François|nom1=Comba|url=http://profondeurdechamps.com/2012/10/06/le-prix-nobel-de-litterature/|titre=Le Prix Nobel de littérature|consulté le=04 mai 2014|périodique=Profondeur de champs (magazine culturel en ligne)|jour=06|mois=octobre|année=2012}}</ref>. Au cours de la même décennie, la candidature de [[Sigmund Freud]] est étudiée et rejetée<ref>{{Lien web|langue=en|nom1=Svensén|prénom=Bo|titre=The Nobel Prize in Literature: Nominations and Reports 1901–1950|url=http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/themes/literature/svensen/|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=04 mai 2014}}</ref>. Lors de la [[Seconde Guerre mondiale]], le prix est suspendu de [[1940]] à [[1943]] à la demande du gouvernement suédois qui affiche une politique de neutralité dans le conflit<ref name="MCoquet 2012"/>.
Dans les [[années 1920]], l'Académie change de ligne de conduite et prime des écrivains ouvertement sceptiques et critiques comme [[Carl Spitteler]] et [[Anatole France]] dont l'œuvre s'accommode mal avec l'idéal exigé par Alfred Nobel<ref name="MCoquet 2012"/>. Dans les [[années 1930]], le jury s'ouvre au continent américain et récompense [[Sinclair Lewis]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Aucun écrivain allemand ou autrichien susceptible de gêner [[Adolf Hitler]] n'est distingué à l'instar de [[Bertolt Brecht]], [[Hermann Broch]], [[Joseph Roth]], [[Stefan Zweig]] ou encore [[Robert Musil]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Pour cette raison, l'écrivain tchécoslovaque [[Karel Čapek]], farouchement opposé au [[nazisme|national-socialisme]] et nommé sept fois pour le prix entre [[1932]] et [[1938]], est également écarté<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur=Peter Swirski|titre=From Lowbrow to Nobrow|éditeur=McGill Queen's University Press|url=http://www.mqup.ca}}.</ref>. En [[1931]], la récompense est attribuée à l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie [[Erik Axel Karlfeldt]], décédé en avril. Auparavant, l'auteur avait déjà été proposé par ses collègues mais il aurait refusé le prix en [[1919]]<ref>[http://www.karlfeldt.org/Karlfeldt/Nobelpriset.html Karlfeldtsamfundet] {{Lien archive|url=http://www.karlfeldt.org/Karlfeldt/Nobelpriset.html |horodatage archive=20110726213309 |titre=Copie archivée }} (suédois). Retrieved 2010-02-17.</ref>. Il s'agit de la seule fois dans l'histoire des Nobel que la distinction est décernée intentionnellement de manière posthume<ref>En [[2011]], le [[prix Nobel de physiologie ou médecine|prix Nobel de médecine]] est décerné à [[Ralph Steinman]] alors que ce dernier vient de mourir quelques jours auparavant sans que le jury en soit informé ; le prix est maintenu malgré les statuts.</ref>. Bien que réfugié en France et déchu de sa nationalité soviétique, [[Ivan Bounine]] devient le premier écrivain de langue russe à être distingué en [[1933]] car le comité préfère écarter [[Maxime Gorki]], jugé trop proche de [[Staline]] et se ranger à l'avis d'un neveu d'[[Alfred Nobel]] dont les faveurs allaient à Bounine<ref>{{article|prénom1=François|nom1=Comba|url=http://profondeurdechamps.com/2012/10/06/le-prix-nobel-de-litterature/|titre=Le Prix Nobel de littérature|consulté le=04 mai 2014|périodique=Profondeur de champs (magazine culturel en ligne)|jour=06|mois=octobre|année=2012}}.</ref>. Au cours de la même décennie, la candidature de [[Sigmund Freud]] est étudiée et rejetée<ref>{{Lien web|langue=en|nom1=Svensén|prénom=Bo|titre=The Nobel Prize in Literature: Nominations and Reports 1901–1950|url=https://www.nobelprize.org/nomination/nominations-1901-1950/|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=04 mai 2014}}.</ref>. Lors de la [[Seconde Guerre mondiale]], le prix est suspendu de [[1940]] à [[1943]] à la demande du gouvernement suédois qui affiche une politique de neutralité dans le conflit<ref name="MCoquet 2012"/>.


Au milieu des [[années 1940]], alors que le comité a laissé mourir des grands créateurs comme [[James Joyce]], [[Virginia Woolf]] et surtout [[Paul Valéry]], mort en [[1945]] alors qu'il était le favori pour remporter le prix cette année-là, il s'agit de faire du rattrapage et de mettre à l'honneur des écrivains dont le prestige littéraire est mondial : [[William Faulkner]], [[Hermann Hesse]] ou encore [[André Gide]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Lors de la [[Guerre froide]], les académiciens donnent le prix à des pays méprisés lors des premières années comme le [[Guatemala]], la [[Grèce]] et l'[[Islande]], ce qui préfigure l'ouverture au tiers-monde et à la [[world literature|littérature cosmopolite]], qui connaît son apogée avec la récompense décernée à [[Gabriel García Márquez]] en [[1982]]<ref name="MCoquet 2012"/>.
Au milieu des [[années 1940]], alors que le comité a laissé mourir des grands créateurs comme [[James Joyce]], [[Virginia Woolf]] et surtout [[Paul Valéry]], mort en [[1945]] alors qu'il était le favori pour remporter le prix cette année-là, il s'agit de faire du rattrapage et de mettre à l'honneur des écrivains dont le prestige littéraire est mondial : [[William Faulkner]], [[Hermann Hesse]] ou encore [[André Gide]]<ref name="MCoquet 2012"/>. Lors de la [[Guerre froide]], les académiciens donnent le prix à des pays méprisés lors des premières années comme le [[Guatemala]], la [[Grèce]] et l'[[Islande]], ce qui préfigure l'ouverture au tiers-monde et à la [[world literature|littérature cosmopolite]], qui connaît son apogée avec la récompense décernée à [[Gabriel García Márquez]] en [[1982]]<ref name="MCoquet 2012"/>.


=== Choix des lauréats dans les années 1950 ===
=== Choix des lauréats dans les années 1950 ===
En [[1953]], le comité distingue [[Winston Churchill]], unique ancien [[Chef du gouvernement]] à recevoir ce prix. Ce dernier lui est décerné {{Citation|pour sa maîtrise de la description historique et biographique ainsi que pour ses discours brillants pour la défense des valeurs humaines}}<ref>{{lien web|langue=en|titre=Le Prix Nobel de Littérature de 1953|url=http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/1953/ Official Nobel Page|site=nobelprize.org}}.</ref>. Lors de l'annonce de sa victoire, Churchill est à la fois déçu car il souhaitait obtenir le [[prix Nobel de la paix]] et surpris, s'exclamant : {{citation|Tiens, je ne savais pas que j'écrivais si bien}}<ref>{{article|prénom1=Louis|nom1=Blanchard|titre=Un poème inédit de Winston Churchill|périodique=Le Nouvel Observateur|lien périodique=Le Nouvel Observateur|jour=11|mois=février|année=2013|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20130211.OBS8473/un-poeme-inedit-de-winston-churchill.html}}</ref>. La candidature de [[Charles de Gaulle]] est sérieusement étudiée dix ans plus tard, car l'Académie apprécie la qualité littéraire de ses ouvrages<ref>{{article|prénom1=Mohammed|nom1=Aissaoui|titre=Le général de Gaulle aurait pu être Prix Nobel de littérature|jour=06|mois=janvier|année=2014|url=http://www.lefigaro.fr/livres/2014/01/06/03005-20140106ARTFIG00466-le-general-de-gaulle-aurait-pu-etre-prix-nobel-de-litterature.php|périodique=Le Nouvel Observateur|lien périodique=Le Figaro}}</ref>.
En [[1953]], le comité distingue [[Winston Churchill]], unique ancien [[Chef du gouvernement]] à recevoir ce prix. Ce dernier lui est décerné {{Citation|pour sa maîtrise de la description historique et biographique ainsi que pour ses discours brillants pour la défense des valeurs humaines}}<ref>{{lien web|langue=en|titre=Le Prix Nobel de Littérature de 1953|url=https://www.nobelprize.org/prizes/literature/1953/summary/|site=nobelprize.org}}.</ref>. Lors de l'annonce de sa victoire, Churchill est à la fois déçu car il souhaitait obtenir le [[prix Nobel de la paix]] et surpris, s'exclamant : {{citation|Tiens, je ne savais pas que j'écrivais si bien}}<ref>{{lien web|langue=fr|prénom=Louis|nom=Blanchard|url=https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20130211.OBS8473/un-poeme-de-jeunesse-de-winston-churchill.html|titre=Un poème de jeunesse de Winston Churchill|périodique=[[L'Obs|Le Nouvel Observateur]]|date=11 février 2013|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>. La candidature de [[Charles de Gaulle]] est sérieusement étudiée dix ans plus tard, car l'Académie apprécie la qualité littéraire de ses ouvrages<ref>{{lien web|langue=fr|prénom=Mohammed|nom=Aissaoui|titre=Le général de Gaulle aurait pu être Prix Nobel de littérature|url=https://www.lefigaro.fr/livres/2014/01/06/03005-20140106ARTFIG00466-le-general-de-gaulle-aurait-pu-etre-prix-nobel-de-litterature.php|périodique=[[Le Figaro]]|date=6 janvier 2014|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>.


En [[1954]], 27 écrivains sont pressentis, dont l'Espagnol [[Ramón Menéndez Pidal]], l'Américain [[Ernest Hemingway]], et les Français [[André Malraux]] et [[Albert Camus]] dont les noms circulent depuis la fin des [[années 1940]]. Même si les jurés suédois ont une préférence pour Malraux, celui-ci n'a pas écrit de romans depuis longtemps, ce qui rend son choix impossible. Hemingway, quant à lui, vient d'écrire ''[[Le Vieil Homme et la Mer]]'' deux ans plus tôt. Le cynisme, la sécheresse et la brutalité de son écriture ne s'accordent pas avec l'idéal souhaité par le testament d'Alfred Nobel mais l'écrivain a une forme d'héroïsme qui séduit certains jurés. Il l'emporte<ref name="Truc">Olivier Truc, « Et Camus obtint enfin le prix Nobel », ''Le Monde'', 28 décembre 2008.</ref>.
En [[1954]], 27 écrivains sont pressentis, dont l'Espagnol [[Ramón Menéndez Pidal]], l'Américain [[Ernest Hemingway]], et les Français [[André Malraux]] et [[Albert Camus]] dont les noms circulent depuis la fin des [[années 1940]]. Même si les jurés suédois ont une préférence pour Malraux, celui-ci n'a pas écrit de romans depuis longtemps, ce qui rend son choix impossible. Hemingway, quant à lui, vient d'écrire ''[[Le Vieil Homme et la Mer]]'' deux ans plus tôt. Le cynisme, la sécheresse et la brutalité de son écriture ne s'accordent pas avec l'idéal souhaité par le testament d'Alfred Nobel mais l'écrivain a une forme d'héroïsme qui séduit certains jurés. Il l'emporte<ref name="Truc">Olivier Truc, « Et Camus obtint enfin le prix Nobel », ''Le Monde'', 28 décembre 2008.</ref>.
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En [[1957]], 49 noms sont cités sur les listes dont 12 nouveaux. Cette fois, le choix, unanime, du comité se porte sur Albert Camus. Quelques mois auparavant, le {{date-|14 avril}}, Anders Österling écrit une critique élogieuse de ''[[L'Exil et le Royaume]]'' dans le quotidien ''Stockholms Tidningen''. Le {{date|17|octobre|1957|en littérature}}, Albert Camus est désigné « pour son importante œuvre littéraire qui met en lumière, avec un sérieux pénétrant, les problèmes qui se posent de nos jours à la conscience des hommes »<ref name="Truc"/>.
En [[1957]], 49 noms sont cités sur les listes dont 12 nouveaux. Cette fois, le choix, unanime, du comité se porte sur Albert Camus. Quelques mois auparavant, le {{date-|14 avril}}, Anders Österling écrit une critique élogieuse de ''[[L'Exil et le Royaume]]'' dans le quotidien ''Stockholms Tidningen''. Le {{date|17|octobre|1957|en littérature}}, Albert Camus est désigné « pour son importante œuvre littéraire qui met en lumière, avec un sérieux pénétrant, les problèmes qui se posent de nos jours à la conscience des hommes »<ref name="Truc"/>.


En [[1958]], l'attribution du prix à [[Boris Pasternak]] déclenche la colère des autorités soviétiques. L'auteur est forcé de décliner la récompense pour s'épargner des sanctions<ref>Citation de l'article consacré à [[Boris Pasternak]] par Michel Aucouturier ''in'' ''[[Le Nouveau Dictionnaire des auteurs]]'', édition Laffont-Bompiani, Paris, [[1994]], volume 2 page 2439</ref>.
En [[1958]], l'attribution du prix à [[Boris Pasternak]] déclenche la colère des autorités soviétiques. L'auteur est forcé de décliner la récompense pour s'épargner des sanctions<ref>Citation de l'article consacré à [[Boris Pasternak]] par Michel Aucouturier in ''Le Nouveau Dictionnaire des auteurs'', édition Laffont-Bompiani, Paris, [[1994]], {{vol.|2}}, {{p.|2439}}.</ref>.


=== Le Nobel dans les années 1960 et 1970 ===
=== Le Nobel dans les années 1960 et 1970 ===
Lorsqu'en [[2012]], la [[fondation Nobel]] rend publiques les archives des délibérations vieilles de cinquante ans comme le stipule le règlement, elle révèle que [[John Steinbeck]] fut récompensé par défaut<ref name="LibéSteinbeck 2013">{{article|url=http://www.liberation.fr/culture/2013/01/04/john-steinbeck-prix-nobel-par-defaut_871791|titre=John Steinbeck, prix Nobel par défaut|consulté le=15 octobre 13|périodique=Libération|jour=04|mois=janvier|année=2013}}</ref>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013">{{article|prénom1=Charlotte|nom1=Pudlowski|url=http://www.slate.fr/culture/66815/steinbeck-nobel-litterature-anouilh-archives|titre=Comment Steinbeck a privé le Français Anouilh du Nobel en 1962|consulté le=15 octobre 13|périodique=Slate|lien périodique=Slate (magazine)|jour=04|mois=janvier|année=2013}}</ref>. Les quatre autres auteurs retenus dans la sélection finale de [[1962 en littérature|1962]] étaient la Danoise [[Karen Blixen]], le Français [[Jean Anouilh]], puis les Britanniques [[Lawrence Durrell]] et [[Robert Graves]]<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013"/>. Il fut d'emblée décidé que
Lorsqu'en [[2012]], la [[fondation Nobel]] rend publiques les archives des délibérations vieilles de cinquante ans comme le stipule le règlement, elle révèle que [[John Steinbeck]] fut récompensé par défaut<ref name="LibéSteinbeck 2013">{{lien web|langue=fr|url=http://www.liberation.fr/culture/2013/01/04/john-steinbeck-prix-nobel-par-defaut_871791|titre=John Steinbeck, prix Nobel par défaut|périodique=[[Libération (journal)|Libération]]|date=4 janvier 2013|consulté le=15 octobre 2013}}.</ref>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013">{{lien web|prénom=Charlotte|nom=Pudlowski|url=http://www.slate.fr/culture/66815/steinbeck-nobel-litterature-anouilh-archives|titre=Comment Steinbeck a privé le Français Anouilh du Nobel en 1962|périodique=[[Slate (magazine)|Slate]]|date=4 janvier 2013|consulté le=15 octobre 2013}}.</ref>. Les quatre autres auteurs retenus dans la sélection finale de [[1962 en littérature|1962]] étaient la Danoise [[Karen Blixen]], le Français [[Jean Anouilh]], puis les Britanniques [[Lawrence Durrell]] et [[Robert Graves]]<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013"/>. Il fut d'emblée décidé que [[Lawrence Durrell|Durell]] serait écarté<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. Son œuvre ne faisait pas l'unanimité au sein du jury qui avait déjà évincé sa candidature l'année précédente sur l'insistance d'un membre du comité trouvant que ses livres avaient un {{citation|arrière-goût douteux}}, en raison d'une {{citation|préoccupation monomaniaque pour les développements érotiques}}<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. [[Karen Blixen|Blixen]] mourut un mois avant l'élection du gagnant et [[Jean Anouilh|Anouilh]] fut évincé car sa victoire aurait été trop proche de celle [[Saint-John Perse]], le dernier lauréat français<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013"/>. [[Robert Graves|Graves]], quant à lui, était connu comme poète bien qu'il ait publié quelques romans<ref name="CPudlowski 2013"/>. Mais pour [[Anders Österling]], secrétaire perpétuel d'alors, personne dans la poésie anglophone n'égalait le talent d'[[Ezra Pound]], dont il fut décidé qu'il serait privé de la récompense à cause de ses positions politiques<ref name="CPudlowski 2013"/>. Steinbeck obtint finalement le prix. L'annonce de son couronnement fut mal reçue par la presse suédoise et américaine pour qui il était un auteur du passé<ref name="CPudlowski 2013"/>. En effet, l'écrivain américain n'avait rien publié de marquant depuis longtemps et ses grands romans (''[[Les Raisins de la colère]]'', ''[[Des souris et des hommes]]'' et ''[[À l'est d'Éden]]'') étaient derrière lui<ref name="CPudlowski 2013"/>. Quand il répondit à un journaliste lui demandant s'il méritait la distinction, Steinbeck, lui-même surpris par sa victoire, répondit : {{citation|Franchement, non}}<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. Jamais par la suite, Anouilh, Graves et Durrell ne furent primés.
[[Lawrence Durrell|Durell]] serait écarté<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. Son œuvre ne faisait pas l'unanimité au sein du jury qui avait déjà évincé sa candidature l'année précédente sur l'insistance d'un membre du comité trouvant que ses livres avaient un {{citation|arrière-goût douteux}}, en raison d'une {{citation|préoccupation monomaniaque pour les développements érotiques}}<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. [[Karen Blixen|Blixen]] mourut un mois avant l'élection du gagnant et [[Jean Anouilh|Anouilh]] fut évincé car sa victoire aurait été trop proche de celle [[Saint-John Perse]], le dernier lauréat français<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>{{,}}<ref name="CPudlowski 2013"/>. [[Robert Graves|Graves]], quant à lui, était connu comme poète bien qu'il ait publié quelques romans<ref name="CPudlowski 2013"/>. Mais pour [[Anders Österling]], secrétaire perpétuel d'alors, personne dans la poésie anglophone n'égalait le talent d'[[Ezra Pound]], dont il fut décidé qu'il serait privé de la récompense à cause de ses positions politiques<ref name="CPudlowski 2013"/>. [[John Steinbeck|Steinbeck]] obtint finalement le prix. L'annonce de son couronnement fut mal reçue par la presse suédoise et américaine pour qui il était un auteur du passé<ref name="CPudlowski 2013"/>. En effet, l'écrivain américain n'avait rien publié de marquant depuis longtemps et ses grands romans (''[[Les Raisins de la colère]]'', ''[[Des souris et des hommes]]'' et ''[[À l'est d'Éden]]'') étaient derrière lui<ref name="CPudlowski 2013"/>. Quand il répondit à un journaliste lui demandant s'il méritait la distinction, Steinbeck, lui-même surpris par sa victoire, répondit : {{citation|Franchement, non}}<ref name="LibéSteinbeck 2013"/>. Jamais par la suite, Anouilh, Graves et Durrell ne furent primés.


En [[1964]], [[Jean-Paul Sartre]] décline le prix Nobel qui, selon lui, est « beaucoup trop tourné vers l'[[Occident]] »<ref>Cité dans l'article « [[Jean-Paul Sartre]] », ''[[Encyclopédie des écrivains de langue française]]'' dirigée par Jean-Pierre de Beaumarchais et Alain Rey, édition Larousse, Paris, [[2001]],volume 2 page 1741</ref>.
En [[1964]], [[Jean-Paul Sartre]] décline le prix Nobel qui, selon lui, est {{citation|beaucoup trop tourné vers l'[[Occident]]}}<ref>Cité dans l'article « [[Jean-Paul Sartre]] », ''[[Encyclopédie des écrivains de langue française]]'' dirigée par Jean-Pierre de Beaumarchais et Alain Rey, édition Larousse, Paris, [[2001]], {{vol.|2}}, {{p.|1741}}.</ref>.


En [[1968]], le prix est décerné à [[Yasunari Kawabata]] sur recommandation d'experts de la [[littérature japonaise]] car le jury souhaitait équilibrer son palmarès et s'ouvrir à l'Asie<ref name="MCoquet 2012"/>.
En [[1968]], le prix est décerné à [[Yasunari Kawabata]] sur recommandation d'experts de la [[littérature japonaise]] car le jury souhaitait équilibrer son palmarès et s'ouvrir à l'Asie<ref name="MCoquet 2012"/>.


Le lauréat de l'année [[1970]] [[Alexandre Soljenitsyne]], dissident soviétique, ne veut pas se rendre à [[Stockholm]] de peur de ne pas être autorisé à retourner en [[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]] où il est assigné à résidence et où son œuvre, mise à l'index, circule clandestinement. Mais après le refus du gouvernement suédois d'honorer Soljenitsyne par une remise du prix avec lecture et discours publics lors d'une cérémonie organisée à l'ambassade de [[Moscou]], l'écrivain est prêt à décliner la récompense et l'argent, rejetant les conditions suédoises qui, selon lui, sont « une insulte au prix Nobel lui-même ». Il ne peut percevoir sa distinction qu'après avoir été déchu de sa nationalité soviétique et exclu d'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] en [[1974]]<ref>Stig Fredrikson [http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/articles/fredrikson/index.html « How I Helped Alexandr Solzhenitsyn Smuggle His Nobel Lecture from the USSR »], ''nobelprize.org'', 22 février 2006, article disponible en octobre 2006.</ref>.
Le lauréat de l'année [[1970]] [[Alexandre Soljenitsyne]], dissident soviétique, ne veut pas se rendre à [[Stockholm]] de peur de ne pas être autorisé à retourner en [[Union des républiques socialistes soviétiques|Union soviétique]] où il est assigné à résidence et où son œuvre, mise à l'index, circule clandestinement. Mais après le refus du gouvernement suédois d'honorer Soljenitsyne par une remise du prix avec lecture et discours publics lors d'une cérémonie organisée à l'ambassade de [[Moscou]], l'écrivain est prêt à décliner la récompense et l'argent, rejetant les conditions suédoises qui, selon lui, sont « une insulte au prix Nobel lui-même ». Il ne peut percevoir sa distinction qu'après avoir été déchu de sa nationalité soviétique et exclu d'[[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] en [[1974]]<ref>{{Lien web|langue=en|auteur=Stig Fredrikson|url=https://www.nobelprize.org/prizes/literature/1970/solzhenitsyn/article/|titre=How I Helped Alexandr Solzhenitsyn Smuggle His Nobel Lecture from the USSR|site=nobelprize.org|date=22 février 2006}}.</ref>.


En [[1974]], [[Graham Greene]], [[Vladimir Nabokov]] et [[Saul Bellow]], gardés dans la liste finale, sont donnés favoris. Mais le comité préfère attribuer un prix conjoint aux écrivains suédois [[Eyvind Johnson]] et [[Harry Martinson]], tous deux membres de l'Académie et donc jurés du prix Nobel. [[Saul Bellow|Bellow]] est finalement honoré deux ans plus tard en [[1976]], mais ni [[Graham Greene|Greene]] ni [[Vladimir Nabokov|Nabokov]] ne seront récompensés<ref>{{article|prénom1=Alex|nom1=Duval Smith | titre=A Nobel Calling: 100 Years of Controversy | périodique=[[The Independent]] |éditeur=''news.independent.co.uk'' |url=http://news.independent.co.uk/europe/article319509.ece |date=2005-10-14 | consulté le=26-04-2008 |extrait=Not many women, a weakness for Anglo-Saxon literature and an ostrich-like ability to resist popular or political pressure. Alex Duval Smith reports from Stockholm on the strange and secret world of the Swedish Academy.}}</ref>.
En [[1974]], [[Graham Greene]], [[Vladimir Nabokov]] et [[Saul Bellow]], gardés dans la liste finale, sont donnés favoris. Mais le comité préfère attribuer un prix conjoint aux écrivains suédois [[Eyvind Johnson]] et [[Harry Martinson]], tous deux membres de l'Académie et donc jurés du prix Nobel. [[Saul Bellow|Bellow]] est finalement honoré deux ans plus tard en [[1976]], mais ni [[Graham Greene|Greene]] ni [[Vladimir Nabokov|Nabokov]] ne seront récompensés<ref>{{lien web|langue=en|prénom1=Alex|nom1=Duval Smith|titre=A Nobel Calling: 100 Years of Controversy|périodique=[[The Independent]]|url=http://news.independent.co.uk/europe/article319509.ece|date=2005-10-14|consulté le=26-04-2008 |extrait=''Not many women, a weakness for Anglo-Saxon literature and an ostrich-like ability to resist popular or political pressure. Alex Duval Smith reports from Stockholm on the strange and secret world of the Swedish Academy''.}}</ref>.


=== Un prix politique ? ===
=== Un prix politique ? ===
La non-attribution du prix est souvent polémique dans la mesure où elle peut avoir valeur de sanction politique, à l'instar de [[Louis-Ferdinand Céline]] et d'[[Ezra Pound]], écartés respectivement pour leurs prises de position antisémite et pro-fasciste<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)">{{article|prénom1=Charlotte|nom1=Pudlowski|titre=Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)|jour=07|mois=octobre|année=2012|url=http://www.slate.fr/story/62765/prix-nobel-laureats-oublies#litterature|périodique=Slate|lien périodique=Slate (magazine)}}</ref>{{,}}<ref>J.-P. Crespelle, ''La vie quotidienne à Montparnasse à la grande époque (1905 - 1930)'', Hachette, Paris, 1976, {{p.|177}})</ref>. Maintes fois retenu sur les listes, [[Jorge Luis Borges]] n'aurait, de son côté, jamais été récompensé comme le suppose son biographe Edwin Williamson dans ''Jorge Luis Borges, une vie'', en raison de ses relations conciliantes, voire troubles, avec les dictatures argentine et chilienne<ref>{{article|prénom1=Colm|nom1=Tóibín|lien auteur1=Colm Tóibín|url=http://www.lrb.co.uk/v28/n09/toib01_.html | titre=Don't Abandon Me | périodique=[[London Review of Books]] | date=11-05-2006 |consulté le=13-10-2007}}</ref>.
La non-attribution du prix est souvent polémique dans la mesure où elle peut avoir valeur de sanction politique, à l'instar de [[Louis-Ferdinand Céline]] et d'[[Ezra Pound]], écartés respectivement pour leurs prises de position antisémite et pro-fasciste<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)">{{lien web|auteur=Charlotte Pudlowski|titre=Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)|url=http://www.slate.fr/story/62765/prix-nobel-laureats-oublies#litterature|périodique=[[Slate (magazine)|Slate]]|date=7 octobre 2012}}.</ref>{{,}}<ref>J.-P. Crespelle, ''La vie quotidienne à Montparnasse à la grande époque (1905-1930)'', Hachette, Paris, 1976, {{p.|177}}.</ref>. Maintes fois retenu sur les listes, [[Jorge Luis Borges]] n'aurait, de son côté, jamais été récompensé comme le suppose son biographe Edwin Williamson dans ''Jorge Luis Borges, une vie'', en raison de ses relations conciliantes, voire troubles, avec les dictatures argentine et chilienne<ref>{{lien web|langue=en|auteur=[[Colm Tóibín]]|url=http://www.lrb.co.uk/v28/n09/toib01_.html | titre=Don't Abandon Me | périodique=[[London Review of Books]]|date=11 mai 2006|consulté le=13 octobre 2007}}.</ref>.


Josepha Laroche soutient justement la thèse selon laquelle les motivations de l'Académie suédoise dépassent l'évaluation de la qualité littéraire d'une œuvre ou de son apport novateur pour s'inscrire dans une dimension éminemment diplomatique : {{Citation|Il n’y a pas d’équation entre la valeur littéraire et le Nobel. Un grand écrivain novateur ne mérite pas forcément le prix. Il s’agit d’incarner dans sa personne, mais aussi dans son œuvre, des valeurs de respect des droits des peuples. Le Nobel, y compris en littérature, a pour horizon la pacification des relations internationales}}<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. François Comba nuance cette affirmation, expliquant que la valeur esthétique et littéraire reste primordiale dans l'attribution du prix même si le critère politique n'est pas évincé : {{Citation|De manière générale, les prix Nobel font preuve de bonne volonté, et ne commettent pas tant d'erreurs que cela : sur 109 lauréats, on trouve une quarantaine de très grands noms. […] Il s'agit fondamentalement d'un prix de littérature, même s'il inclut des considérations géographiques et politiques. C'est ce qui explique son poids}}<ref name="MCoquet 2012"/>.
Josepha Laroche soutient justement la thèse selon laquelle les motivations de l'Académie suédoise dépassent l'évaluation de la qualité littéraire d'une œuvre ou de son apport novateur pour s'inscrire dans une dimension éminemment diplomatique : {{Citation|Il n'y a pas d'équation entre la valeur littéraire et le Nobel. Un grand écrivain novateur ne mérite pas forcément le prix. Il s'agit d'incarner dans sa personne, mais aussi dans son œuvre, des valeurs de respect des droits des peuples. Le Nobel, y compris en littérature, a pour horizon la pacification des relations internationales}}<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. François Comba nuance cette affirmation, expliquant que la valeur esthétique et littéraire reste primordiale dans l'attribution du prix même si le critère politique n'est pas évincé : {{Citation|De manière générale, les prix Nobel font preuve de bonne volonté, et ne commettent pas tant d'erreurs que cela : sur 109 lauréats, on trouve une quarantaine de très grands noms. […] Il s'agit fondamentalement d'un prix de littérature, même s'il inclut des considérations géographiques et politiques. C'est ce qui explique son poids}}<ref name="MCoquet 2012"/>.


Cependant, les oublis notables contrastent avec certains choix du comité comme le fait de récompenser [[Pablo Neruda]] et [[Jean-Paul Sartre]], proches du communisme, [[Gabriel García Márquez]], proche ami de [[Fidel Castro]] ou encore [[Camilo José Cela]], qui a toujours oscillé entre connivence et critique du [[Espagne franquiste|franquisme]], ayant assuré un temps la fonction de censeur littéraire, entre [[1943]] et [[1944]], tout en étant lui-même censuré<ref>[https://www.independent.co.uk/arts-entertainment/books/reviews/sex-and-philosophy-rethinking-de-beauvoir-and-sartre-by-edward-fullbrook-and-kate-fullbrookbr-a-dangerous-liaison-by-carole-seymourjones-832532.html New studies agree that Beauvoir is eclipsing Sartre as a philosopher and writer] ''[[The Independent]]'' May 25, 2008. Retrieved on January 4, 2009.</ref>{{,}}<ref>[http://libros.libertaddigital.com/textos-escondidos-de-pablo-neruda-1276229962.html Textos escondidos de Pablo Neruda] ''Libros'' April 14, 2005. Retrieved on January 4, 2009.</ref>{{,}}<ref>Unearthing Franco's Legacy, {{p.|17}}, University of Nortre dame Press.</ref>.
Cependant, les oublis notables contrastent avec certains choix du comité comme le fait de récompenser [[Pablo Neruda]] et [[Jean-Paul Sartre]], proches du communisme, [[Gabriel García Márquez]], proche ami de [[Fidel Castro]] ou encore [[Camilo José Cela]], qui a toujours oscillé entre connivence et critique du [[Espagne franquiste|franquisme]], ayant assuré un temps la fonction de censeur littéraire, entre [[1943]] et [[1944]], tout en étant lui-même censuré<ref>{{en}} [https://www.independent.co.uk/arts-entertainment/books/reviews/sex-and-philosophy-rethinking-de-beauvoir-and-sartre-by-edward-fullbrook-and-kate-fullbrookbr-a-dangerous-liaison-by-carole-seymourjones-832532.html New studies agree that Beauvoir is eclipsing Sartre as a philosopher and writer], ''[[The Independent]]'', 25 mai 2008 (consulté le 4 janvier 2009).</ref>{{,}}<ref>{{es}} [http://libros.libertaddigital.com/textos-escondidos-de-pablo-neruda-1276229962.html Textos escondidos de Pablo Neruda], ''Libros'', 14 avril 2005 (consulté le 4 janvier 2009).</ref>{{,}}<ref>{{en}} Unearthing Franco's Legacy, {{p.|17}}, [[University of Notre Dame Press]].</ref>.


En août [[2006]], à la suite du chahut médiatique provoqué par la révélation de l'engagement volontaire au sein de la [[Waffen-SS]] en [[1944]] de [[Günter Grass]] (récompensé en [[1999]]), la [[fondation Nobel]] intervient face aux sommations de la droite allemande et d'une partie de la presse qui demandent à l'écrivain de rendre sa récompense et la somme d'argent reçue. Le président du comité déclare que « l'attribution des prix est irréversible car aucun prix Nobel n'a été retiré à quiconque par le passé »<ref>Article du journal ''[[Libération (journal)|Libération]]'', {{date|12|juillet|2006}}, « Grass pourra garder son prix Nobel ».</ref>. En [[avril 2012]], après la publication du poème polémique « ''[[Ce qui doit être dit]]'' » dans lequel l'auteur accuse [[Israël]] de menacer la paix mondiale, [[Peter Englund]], secrétaire perpétuel de l'Académie, exclut une nouvelle fois toute sanction vis-à-vis de Grass, rappelant que le prix lui a été attribué pour son mérite littéraire uniquement<ref>{{article|titre=L'Académie suédoise exclut de retirer le Nobel à Günter Grass|jour=10|mois=avril|année=2012|url=http://www.lepoint.fr/culture/l-academie-suedoise-exclut-de-retirer-le-nobel-a-gunter-grass-10-04-2012-1450090_3.php|périodique=Le Point|lien périodique=Le Point}}</ref>{{,}}<ref>{{article|titre=L'Académie suédoise exclut de retirer le Nobel à Günter Grass|jour=10|mois=avril|année=2012|url=http://tempsreel.nouvelobs.com/culture/20120410.AFP2925/l-academie-suedoise-exclut-de-retirer-le-nobel-a-gunter-grass.html|périodique=Le Nouvel Observateur|lien périodique=Le Nouvel Observateur}}</ref>.
En août [[2006]], à la suite du chahut médiatique provoqué par la révélation de l'engagement volontaire au sein de la [[Waffen-SS]] en [[1944]] de [[Günter Grass]] (récompensé en [[1999]]), la [[fondation Nobel]] intervient face aux sommations de la droite allemande et d'une partie de la presse qui demandent à l'écrivain de rendre sa récompense et la somme d'argent reçue. Le président du comité déclare que « l'attribution des prix est irréversible car aucun prix Nobel n'a été retiré à quiconque par le passé »<ref>Article du journal ''[[Libération (journal)|Libération]]'', {{date|12|juillet|2006}}, « Grass pourra garder son prix Nobel ».</ref>. En [[avril 2012]], après la publication du poème polémique « ''[[Ce qui doit être dit]]'' » dans lequel l'auteur accuse [[Israël]] de menacer la paix mondiale, [[Peter Englund]], secrétaire perpétuel de l'Académie, exclut une nouvelle fois toute sanction vis-à-vis de Grass, rappelant que le prix lui a été attribué pour son mérite littéraire uniquement<ref>{{lien web|langue=fr|titre=L'Académie suédoise exclut de retirer le Nobel à Günter Grass|url=https://www.lepoint.fr/culture/l-academie-suedoise-exclut-de-retirer-le-nobel-a-gunter-grass-10-04-2012-1450090_3.php|périodique=[[Le Point]]|date=10 avril 2012|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|langue=fr|titre=L'Académie suédoise exclut de retirer le Nobel à Günter Grass|url=https://www.nouvelobs.com/culture/20120410.AFP2925/l-academie-suedoise-exclut-de-retirer-le-nobel-a-gunter-grass.html|périodique=[[L'Obs|Le Nouvel Observateur]]|date=10 avril 2012|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>.


Les choix du jury dans le courant des [[années 2000]] ont été soupçonnés, par une partie de la presse, d'être motivés par l'actualité politique, notamment avec le couronnement d'[[Harold Pinter]] en [[2005 en littérature|2005]] qui concorde avec ses virulentes prises de position contre la [[guerre d'Irak]] ou celui d'[[Orhan Pamuk]] en [[2006 en littérature|2006]] après la reconnaissance publique par ce dernier du [[génocide arménien]] et du massacre des Kurdes par la Turquie<ref>Dan Kellum, [http://www.cbsnews.com/stories/2007/10/12/opinion/main3361514.shtml « Lessing's Legacy of Political Literature. The Nation: Skeptics Call It A Nonliterary Nobel Win, But Academy Saw Her Visionary Power »], ''[[CBS News]]'', rpt. from ''[[The Nation]]'' (column), 14 octobre 2007, {{date|17|octobre|2007}}.</ref>{{,}}<ref name="Obs2006">{{article|url=http://tempsreel.nouvelobs.com/culture/20061012.OBS5378/le-nobel-de-litteratureremis-ce-jeudi.html|titre=Le Nobel de littérature remis ce jeudi|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=12|mois=octobre|année=2006}}</ref>.
Les choix du jury dans le courant des [[années 2000]] ont été soupçonnés, par une partie de la presse, d'être motivés par l'actualité politique, notamment avec le couronnement d'[[Harold Pinter]] en [[2005 en littérature|2005]] qui concorde avec ses virulentes prises de position contre la [[guerre d'Irak]] ou celui d'[[Orhan Pamuk]] en [[2006 en littérature|2006]] après la reconnaissance publique par ce dernier du [[génocide arménien]] et du massacre des Kurdes par la Turquie<ref>{{lien web|langue=en|auteur=Dan Kellum|url=https://www.cbsnews.com/news/lessings-legacy-of-political-literature/|titre=Lessing's Legacy Of Political Literature|éditeur=[[CBS News]], ''[[The Nation]]''|date=14 octobre 2007|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>{{,}}<ref name="Obs2006">{{lien web|langue=fr|url=https://www.nouvelobs.com/culture/20061012.OBS5378/le-nobel-de-litterature-remis-ce-jeudi.html|titre=Le Nobel de littérature remis ce jeudi|périodique=[[L'Obs|Le Nouvel Observateur]]|date=12 octobre 2006|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>.


Le comité est en effet souvent taxé d'« élitisme » et d'« engagement gauchiste » par une partie de la presse car il met régulièrement à l'honneur des romanciers ou des poètes méconnus du grand public, pour la plupart engagés à gauche, mais le jury a toujours revendiqué son indépendance<ref name="Obs2006"/>. Néanmoins, le choix de récompenser [[Mario Vargas Llosa]] en 2010 (auteur très engagé à droite et candidat du parti libéral lors de l'élection présidentielle du Pérou en 1990) est à considérer<ref>Hubert Artus, [https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-cabinet-de-lecture/20101007.RUE0136/mario-vargas-llosa-un-prix-nobel-de-litterature-tres-politique.html Mario Vargas Llosa, un prix Nobel de littérature très politique] sur ''Rue89'', nouvelobs.com, le 7 octobre 2011</ref>.
Le comité est en effet souvent taxé d'« élitisme » et d'« engagement gauchiste » par une partie de la presse car il met régulièrement à l'honneur des romanciers ou des poètes méconnus du grand public, pour la plupart engagés à gauche, mais le jury a toujours revendiqué son indépendance<ref name="Obs2006"/>. Néanmoins, le choix de récompenser [[Mario Vargas Llosa]] en 2010 (auteur très engagé à droite et candidat du parti libéral lors de l'élection présidentielle du Pérou en 1990) est à considérer<ref>Hubert Artus, [https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-cabinet-de-lecture/20101007.RUE0136/mario-vargas-llosa-un-prix-nobel-de-litterature-tres-politique.html Mario Vargas Llosa, un prix Nobel de littérature très politique] sur ''Rue89'', nouvelobs.com, le 7 octobre 2011.</ref>.


En [[2012]], le choix du Chinois [[Mo Yan]] entraîne de vives contestations au sein du monde des arts, des lettres et de la culture en raison de la proximité supposée de l'auteur avec les autorités de [[Pékin]] et son silence vis-à-vis de la répression des opposants politiques, du non-respect des [[droits de l'homme]] et de l'application de la censure en [[Chine]]<ref>{{Lien web|prénom1=Siegfried|nom1=Forster|url=http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20121210-mo-yan-prix-nobel-litterature-2012-faire-paix-herta-mueller-salman-rushdie-Liao-yiwu-ai-weiwei-li-bifeng/|titre=Mo Yan reçoit son prix Nobel de littérature 2012 sans faire la paix avec ses détracteurs|périodique=[[Radio France internationale]]|jour=11|mois=décembre|année=2012}}</ref>. Parmi ses détracteurs se trouvent l'artiste [[Ai Weiwei]], l'écrivain indo-britannique [[Salman Rushdie]] et la romancière germano-roumaine [[Herta Müller]], lauréate du prix en 2009, qui considère ce Nobel comme une « honte », une « catastrophe » et « une claque pour tous ceux qui travaillent au respect de la démocratie et les droits de l’homme »<ref>{{Lien archive|horodatage archive=20121201015406|url=http://www.magazine-litteraire.com/actualite/breve/mo-yan-merite-t-il-nobel-28-11-2012-59197|titre=Mo Yan mérite-t-il le prix Nobel ?|périodique=Le Magazine littéraire|jour=28|mois=novembre|année=2012}}</ref>{{,}}<ref>{{article|prénom1=Nicolas|nom1=Guégan|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20121126.OBS0526/mo-yan-prix-nobel-une-catastrophe-et-une-honte-selon-herta-muller.html|titre=Mo Yan prix Nobel? « Une catastrophe » et « une honte » selon Herta Müller|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=26|mois=novembre|année=2012}}.</ref>.
En [[2012]], le choix du Chinois [[Mo Yan]] entraîne de vives contestations au sein du monde des arts, des lettres et de la culture en raison de la proximité supposée de l'auteur avec les autorités de [[Pékin]] et son silence vis-à-vis de la répression des opposants politiques, du non-respect des [[droits de l'homme]] et de l'application de la censure en [[Chine]]<ref>{{Lien web|langue=fr|prénom=Siegfried|nom=Forster|url=http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20121210-mo-yan-prix-nobel-litterature-2012-faire-paix-herta-mueller-salman-rushdie-Liao-yiwu-ai-weiwei-li-bifeng/|titre=Mo Yan reçoit son prix Nobel de littérature 2012 sans faire la paix avec ses détracteurs|éditeur=[[Radio France internationale|RFI]]|jour=11|mois=décembre|année=2012}}.</ref>. Parmi ses détracteurs se trouvent l'artiste [[Ai Weiwei]], l'écrivain indo-britannique [[Salman Rushdie]] et la romancière germano-roumaine [[Herta Müller]], lauréate du prix en 2009, qui considère ce Nobel comme une « honte », une « catastrophe » et « une claque pour tous ceux qui travaillent au respect de la démocratie et les droits de l'homme »<ref>{{Lien archive|horodatage archive=20121201015406|url=http://www.magazine-litteraire.com/actualite/breve/mo-yan-merite-t-il-nobel-28-11-2012-59197|titre=Mo Yan mérite-t-il le prix Nobel ?|périodique=Le Magazine littéraire|jour=28|mois=novembre|année=2012}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|prénom=Nicolas|nom=Guégan|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20121126.OBS0526/mo-yan-prix-nobel-une-catastrophe-et-une-honte-selon-herta-muller.html|titre=Mo Yan prix Nobel? « Une catastrophe » et « une honte » selon Herta Müller|périodique=[[L'Obs|Le Nouvel Observateur]]|date=26 novembre 2012}}.</ref>.


=== Des attributions parfois contestées ===
=== Des attributions parfois contestées ===
{{voir aussi|Place des femmes dans l'attribution du prix Nobel#Attributions controversées}}
{{article connexe|Place des femmes dans l'attribution du prix Nobel#Attributions controversées}}
Plusieurs spécialistes regrettent que la liste des lauréats comporte pléthore d'oublis majeurs<ref>Burton Feldman, [https://books.google.fr/books?id=xnckeeTICn0C&pg=PA80&lpg=PA80&dq=Ezra+Pound+didn't+win+the+Nobel+Prize&source=bl&ots=O2JPWSiQic&sig=ZFTamfiL6G5LPGE674-X-gXupS8&hl=fr&sa=X&oi=book_result&resnum=8&ct=result#PPA21,M1 ''The Nobel Prize''], pages 61-62.</ref>.
Plusieurs spécialistes regrettent que la liste des lauréats comporte pléthore d'oublis majeurs<ref>Burton Feldman, [https://books.google.fr/books?id=xnckeeTICn0C&pg=PA80&lpg=PA80&dq=Ezra+Pound+didn't+win+the+Nobel+Prize&source=bl&ots=O2JPWSiQic&sig=ZFTamfiL6G5LPGE674-X-gXupS8&hl=fr&sa=X&oi=book_result&resnum=8&ct=result#PPA21,M1 ''The Nobel Prize''], pages 61-62.</ref>.


L'Académie reconnaît avoir raté des monuments de la [[Histoire littéraire|littérature universelle]], en raison du décès prématuré de certains écrivains : [[Marcel Proust]], [[Rainer Maria Rilke]] et [[Antonin Artaud]] (morts tous trois à 51 ans), [[Vladimir Maïakovski]] et [[Paul Celan]] (qui se sont respectivement donné la mort à 36 et 49 ans) ou encore [[Federico García Lorca]] (exécuté sommairement à 38 ans)<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>.
L'Académie reconnaît avoir raté des monuments de la [[Histoire littéraire|littérature universelle]], en raison du décès prématuré de certains écrivains : [[Marcel Proust]], [[Rainer Maria Rilke]] et [[Antonin Artaud]] (morts tous trois à 51 ans), [[Vladimir Maïakovski]] et [[Paul Celan]] (qui se sont respectivement donné la mort à 36 et 49 ans) ou encore [[Federico García Lorca]] (exécuté sommairement à 38 ans)<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>.


L'actuel membre du jury [[Kjell Espmark]] rappelle par ailleurs que l'essentiel de l'œuvre de [[Franz Kafka]], [[Fernando Pessoa]], [[Constantin Cavafy]] et [[Ossip Mandelstam]] a été publié après leur mort et qu'en conséquence les jurés n'ont jamais pu en évaluer la portée de leur vivant<ref>{{Lien web|nom1=Espmark|prénom=Kjell|titre=Nobel's Will and the Literature Prize|url=http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/articles/espmark/index.html|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=6 mai 2012}}</ref>.
L'actuel membre du jury [[Kjell Espmark]] rappelle par ailleurs que l'essentiel de l'œuvre de [[Franz Kafka]], [[Fernando Pessoa]], [[Constantin Cavafy]] et [[Ossip Mandelstam]] a été publié après leur mort et qu'en conséquence les jurés n'ont jamais pu en évaluer la portée de leur vivant<ref>{{Lien web|langue=en|nom1=Espmark|prénom=Kjell|titre=Nobel's Will and the Literature Prize|url=http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/articles/espmark/index.html|éditeur=Nobelprize.org|consulté le=6 mai 2012|brisé le = 2023-11-30}}.</ref>.


Sur son site, l'Académie reconnaît cependant quelques choix d'un goût discutable et l'indigence de certains résultats, notamment lors de la décennie [[1930]]-[[1939]] : {{Citation|La période offre plusieurs lauréats légitimement jugés médiocres, et qui cachent autant de négligences : [[Virginia Woolf]] aurait dû être récompensée à la place de [[Pearl Buck]], etc.}}<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>{{,}}<ref group="N">Un exemple concernant les écrivaines est celui de [[Concha Espina]], proposée vingt-cinq fois en neuf ans sans jamais être lauréate.</ref> {{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Prix Nobel de littérature: les recalés, les oubliés... Un siècle de péripéties |url=https://www.lefigaro.fr/livres/prix-nobel-de-litterature-les-recales-les-oublies-un-siecle-de-peripeties-20190925 |site=LEFIGARO |date=2019-09-25 |consulté le=2023-06-22}}</ref> .
Sur son site, l'Académie reconnaît cependant quelques choix d'un goût discutable et l'indigence de certains résultats, notamment lors de la décennie [[1930]]-[[1939]] : {{Citation|La période offre plusieurs lauréats légitimement jugés médiocres, et qui cachent autant de négligences : [[Virginia Woolf]] aurait dû être récompensée à la place de [[Pearl Buck]], etc.}}<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>{{,}}<ref group="N">Un exemple concernant les écrivaines est celui de [[Concha Espina]], proposée vingt-cinq fois en neuf ans sans jamais être lauréate.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Prix Nobel de littérature: les recalés, les oubliés… Un siècle de péripéties |url=https://www.lefigaro.fr/livres/prix-nobel-de-litterature-les-recales-les-oublies-un-siecle-de-peripeties-20190925 |périodique=[[Le Figaro]]|date=2019-09-25 |consulté le=2023-06-22}}.</ref> .


Les médias notent, de plus, que beaucoup de poètes ont été récompensés, dans un esprit fidèle à celui d'[[Alfred Nobel]], grand amateur de poésie<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. À l'inverse les écrivains qui privilégient une multitude de petits ouvrages aux grandes sommes semblent défavorisés. Selon le professeur en [[littérature comparée]] de Harvard, David Damrosh, [[Italo Calvino]] n’a jamais été nobelisé pour cette raison<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. Toutefois, le prix décerné en [[2013 en littérature|2013]] à [[Alice Munro]], qui écrit surtout des nouvelles, semble marquer un changement.
Les médias notent, de plus, que beaucoup de poètes ont été récompensés, dans un esprit fidèle à celui d'[[Alfred Nobel]], grand amateur de poésie<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. À l'inverse les écrivains qui privilégient une multitude de petits ouvrages aux grandes sommes semblent défavorisés. Selon le professeur en [[littérature comparée]] de Harvard, David Damrosh, [[Italo Calvino]] n'a jamais été nobelisé pour cette raison<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. Toutefois, le prix décerné en [[2013 en littérature|2013]] à [[Alice Munro]], qui écrit surtout des nouvelles, semble marquer un changement.


En [[1989]], la romancière [[Kerstin Ekman]] « démissionne » de l'Académie suédoise pour cause de non-condamnation, de la part de ses collègues, de la [[fatwa]] islamique contre [[Salman Rushdie]], écarté du palmarès<ref name="Rushdie">[http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/arts/4329962.stm « Nobel judge steps down in protest »], ''BBC News'', 11 octobre 2005.</ref>{{,}}<ref name="Obs2006"/>. Elle a toujours sa place à l'Académie, mais refuse depuis l'affaire Rushdie de participer aux réunions.
En [[1989]], la romancière [[Kerstin Ekman]] « démissionne » de l'Académie suédoise pour cause de non-condamnation, de la part de ses collègues, de la [[fatwa]] islamique contre [[Salman Rushdie]], écarté du palmarès<ref name="Rushdie">[http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/arts/4329962.stm « Nobel judge steps down in protest »], ''BBC News'', 11 octobre 2005.</ref>{{,}}<ref name="Obs2006"/>. Elle a toujours sa place à l'Académie, mais refuse depuis l'affaire Rushdie de participer aux réunions.
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Le choix d'[[Elfriede Jelinek]] en [[2004 en littérature|2004]] n'a pas seulement divisé la presse, il a également été l'objet de violents débats au sein de l'Académie<ref name="Obs2006"/>. Sur l'exemple d'Ekman, le professeur en littérature scandinave [[Knut Ahnlund]] quitte sa fonction d'académicien en [[2005]], jugeant l'honneur fait à l'écrivain autrichien être un {{Citation|choc d'une extrême gravité, ayant causé des dommages irréparables à la littérature de manière générale et à la réputation du prix en particulier}}<ref name="Rushdie"/>. Il n'a plus participé à aucun débat de l'Académie jusqu'à son décès en [[2012]].
Le choix d'[[Elfriede Jelinek]] en [[2004 en littérature|2004]] n'a pas seulement divisé la presse, il a également été l'objet de violents débats au sein de l'Académie<ref name="Obs2006"/>. Sur l'exemple d'Ekman, le professeur en littérature scandinave [[Knut Ahnlund]] quitte sa fonction d'académicien en [[2005]], jugeant l'honneur fait à l'écrivain autrichien être un {{Citation|choc d'une extrême gravité, ayant causé des dommages irréparables à la littérature de manière générale et à la réputation du prix en particulier}}<ref name="Rushdie"/>. Il n'a plus participé à aucun débat de l'Académie jusqu'à son décès en [[2012]].


Les propos de l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie suédoise [[Horace Engdahl]], qui justifiait devant l'[[Associated Press]] en [[octobre 2008]] la précellence accordée par les jurés aux auteurs européens, ont déclenché un tollé au sein des milieux littéraires outre-Atlantique : {{Citation bloc|Il existe bien sûr des auteurs forts dans toutes les grandes cultures, mais on ne peut pas nier le fait que l'Europe est toujours le centre du monde littéraire … pas les [[États-Unis]] […] Les États-Unis sont trop isolés, ils ne traduisent pas assez et ne participent pas au dialogue des littératures<ref>[http://www.radio-canada.ca/arts-spectacles/livres/2008/10/01/001-Horace_Engdahl_AP.asp Voir sur ''radio-canada.ca''.]</ref>.}}
Les propos de l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie suédoise [[Horace Engdahl]], qui justifiait devant l'[[Associated Press]] en [[octobre 2008]] la précellence accordée par les jurés aux auteurs européens, ont déclenché un tollé au sein des milieux littéraires outre-Atlantique :
{{Citation bloc|Il existe bien sûr des auteurs forts dans toutes les grandes cultures, mais on ne peut pas nier le fait que l'Europe est toujours le centre du monde littéraire … pas les [[États-Unis]] […] Les États-Unis sont trop isolés, ils ne traduisent pas assez et ne participent pas au dialogue des littératures<ref>[http://www.radio-canada.ca/arts-spectacles/livres/2008/10/01/001-Horace_Engdahl_AP.asp Voir sur ''radio-canada.ca''.]</ref>.}}


L'année suivante, le nouveau secrétaire perpétuel [[Peter Englund]] enraye la polémique en expliquant qu'{{Citation|il est forcément plus facile pour les Européens d'être en phase avec la littérature européenne<ref>« Herta Müller Wins Nobel Prize in Literature ». By MOTOKO RICH and NICHOLAS KULISH. Published: 8 October 2009. [https://www.nytimes.com/2009/10/09/books/09nobel.html?_r=1 ''NY Times''.]</ref>.}}
L'année suivante, le nouveau secrétaire perpétuel [[Peter Englund]] enraye la polémique en expliquant qu'{{Citation|il est forcément plus facile pour les Européens d'être en phase avec la littérature européenne}}<ref>{{lien web|langue=en|auteur1=Motoko Rich|auteur2=Nicholas Kulish|url=https://www.nytimes.com/2009/10/09/books/09nobel.html|titre=Herta Müller Wins Nobel Prize in Literature|périodique=[[The New York Times]]|date=8 octobre 2009|consulté le=25 mars 2024}}.</ref>.


=== Critiques récentes ===
=== Critiques récentes ===
La critique la plus insistante concerne la perspective euro-centrée ou occidentalo-centrée du jury et le fait que certaines zones géographiques soient totalement délaissées, faute de rayonnement ou de traductions suffisantes à l'instar de la [[littérature persane]]<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. Les lettres arabes trouveraient, quant à elles, peu d'échos car elles sont souvent contextualisées, référencées et ont un contenu assez social, ce qui suppose qu'elles correspondent mal à l’exigence universaliste du Nobel<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>.
La critique la plus insistante concerne la perspective euro-centrée ou occidentalo-centrée du jury et le fait que certaines zones géographiques soient totalement délaissées, faute de rayonnement ou de traductions suffisantes à l'instar de la [[littérature persane]]<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>. Les lettres arabes trouveraient, quant à elles, peu d'échos car elles sont souvent contextualisées, référencées et ont un contenu assez social, ce qui suppose qu'elles correspondent mal à l'exigence universaliste du Nobel<ref name="Qui sont les oubliés du prix Nobel ? (section littérature)"/>.


Au vu du nombre de lauréats (81 sur 113), l'[[Europe]] est sans conteste le continent le plus récompensé par l'Académie. Plusieurs journaux suédois ironisent d'ailleurs sur le fait que la [[Suède]] détient plus de prix Nobel que l'[[Asie]] (huit prix suédois contre quatre à peine pour le continent asiatique : deux japonais, un indien et un chinois<ref>En réalité, deux auteurs chinois ont été mis à l'honneur : [[Gao Xingjian]] (2000) et [[Mo Yan]] (2012). Il faut néanmoins mettre de côté le cas de Gao, qui écrit en [[mandarin (langue)|mandarin]] et a été récompensé pour avoir ouvert de nouvelles voies à l'art littéraire chinois. Mais il est un écrivain dissident et est mis à l'index dans son pays d'origine. Il a d'ailleurs accepté le prix sous bannière française (il a reçu la nationalité française en [[1997]]) et les autorités chinoises n'ont jamais reconnu ce prix Nobel : aucun journal n'a relayé l'information de sa victoire en 2000.</ref>)<ref>{{sv}} [http://www.dn.se/DNet/jsp/polopoly.jsp?d=3462&a=837512 « Akademien väljer helst en europé »], ''Dagens Nyheter''.</ref>. L'[[Afrique]] a attendu très longtemps son premier lauréat, le Nigérian d'expression anglaise [[Wole Soyinka]] en [[1986]]. L'ont suivi l'Égyptien arabophone [[Naguib Mahfouz]] en [[1988]], puis les Sud-Africains anglophones [[Nadine Gordimer]] et [[J. M. Coetzee]], récompensés respectivement en [[1991]] et [[2003]].
Au vu du nombre de lauréats (81 sur 113), l'[[Europe]] est sans conteste le continent le plus récompensé par l'Académie. Plusieurs journaux suédois ironisent d'ailleurs sur le fait que la [[Suède]] détient plus de prix Nobel que l'[[Asie]] (huit prix suédois contre quatre à peine pour le continent asiatique : deux japonais, un indien et un chinois<ref>En réalité, deux auteurs chinois ont été mis à l'honneur : [[Gao Xingjian]] (2000) et [[Mo Yan]] (2012). Il faut néanmoins mettre de côté le cas de Gao, qui écrit en [[mandarin (langue)|mandarin]] et a été récompensé pour avoir ouvert de nouvelles voies à l'art littéraire chinois. Mais il est un écrivain dissident et est mis à l'index dans son pays d'origine. Il a d'ailleurs accepté le prix sous bannière française (il a reçu la nationalité française en [[1997]]) et les autorités chinoises n'ont jamais reconnu ce prix Nobel : aucun journal n'a relayé l'information de sa victoire en 2000.</ref>)<ref>{{sv}} [http://www.dn.se/DNet/jsp/polopoly.jsp?d=3462&a=837512 « Akademien väljer helst en europé »], ''Dagens Nyheter''.</ref>. L'[[Afrique]] a attendu très longtemps son premier lauréat, le Nigérian d'expression anglaise [[Wole Soyinka]] en [[1986]]. L'ont suivi l'Égyptien arabophone [[Naguib Mahfouz]] en [[1988]], puis les Sud-Africains anglophones [[Nadine Gordimer]] et [[J. M. Coetzee]], récompensés respectivement en [[1991]] et [[2003]], et le Tanzanien anglophone [[Abdulrazak Gurnah]] en 2021.


De même, certains favoris de la presse sont systématiquement évincés, à l'instar de [[Philip Roth]], [[Amos Oz]], [[Ismaïl Kadaré]], [[Milan Kundera]], [[Adonis (poète)|Adonis]], [[Ko Un]], [[Haruki Murakami]] et [[Claudio Magris]]<ref>[http://www.evene.fr/celebre/biographie/ismail-kadare-2358.php# Fiche Evene d'Ismail Kadare]</ref>{{,}}<ref>[[Le Figaro]].fr, Blaise de Chabalier, ''Tomas Tranströmer, Prix Nobel de Littérature'', le 6 octobre 2011.</ref>.
De même, certains favoris de la presse sont systématiquement évincés, à l'instar de [[Philip Roth]], [[Amos Oz]], [[Ismaïl Kadaré]], [[Milan Kundera]], [[Adonis (poète)|Adonis]], [[Ko Un]], [[Haruki Murakami]] et [[Claudio Magris]]<ref>[http://www.evene.fr/celebre/biographie/ismail-kadare-2358.php# Fiche Evene d'Ismail Kadare]</ref>{{,}}<ref>[[Le Figaro]].fr, Blaise de Chabalier, ''Tomas Tranströmer, Prix Nobel de Littérature'', le 6 octobre 2011.</ref>.


=== Nouvelle Académie et Nobel dit « alternatif » (2018) ===
=== Nouvelle Académie et Nobel dit « alternatif » (2018) ===
{{Loupe|Nouveau prix académique de littérature}}
{{Article détaillé|Nouveau prix académique de littérature}}
Dans le sillage du mouvement féministe suscité par le hashtag [[#BalanceTonPorc|#MeToo]], 18 femmes portent publiquement de graves accusations contre [[Jean-Claude Arnault]], époux de l'académicienne [[Katarina Frostenson]] dont le prestige, jusque-là, protégeait la réputation du photographe. L'académie, face au scandale médiatique déclenché par ces témoignages accablants, décide de reporter le Nobel de littérature à l'année suivante. Refusant d'avoir à subir le comportement d'un homme, des personnalités suédoises, dont Alexandra Pascalidou, autrice de ''Me too : Så går vi vidare Röster, redskap och råd'' (Lava Förlag, 2017), fonde une Nouvelle Académie chargée de décerner un prix littéraire de portée internationale en soulignant, précisément, le rôle crucial de la littérature à l'heure de #MeToo dans un monde qui se polarise. D'après elle, en tant que citoyenne d'un pays démocratique telle que la Suède, il était inadmissible de ne pas décerner de prix<ref>{{Lien web|langue=Anglais|titre=The New Academy Prize in Literature Award Ceremony|url=http://ceremony.wonderlandevent.se/?invite=df2f8899b3c7cf8a0dae5004391f8659939b|site=ceremony.wonderlandevent.se|date=2018|consulté le=2018-12-06|extrait="The New Academy was founded to warrant that an international literary prize will be awarded in 2018"}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|url=https://www.lexpress.fr/actualite/monde/le-nobel-de-litterature-annule-a-cause-d-un-francais_2005999.html|titre=Balance ton Nobel|auteur=Axel Gyldén|date=4 mai 2018|site=lexpress.fr}}.</ref>.
Dans le sillage du mouvement féministe suscité par le hashtag [[#BalanceTonPorc|#MeToo]], 18 femmes portent publiquement de graves accusations contre [[Jean-Claude Arnault]], époux de l'académicienne [[Katarina Frostenson]] dont le prestige, jusque-là, protégeait la réputation du photographe. L'académie, face au scandale médiatique déclenché par ces témoignages accablants, décide de reporter le Nobel de littérature à l'année suivante. Refusant d'avoir à subir le comportement d'un homme, des personnalités suédoises, dont Alexandra Pascalidou, autrice de ''Me too : Så går vi vidare Röster, redskap och råd'' (Lava Förlag, 2017), fonde une Nouvelle Académie chargée de décerner un prix littéraire de portée internationale en soulignant, précisément, le rôle crucial de la littérature à l'heure de #MeToo dans un monde qui se polarise. D'après elle, en tant que citoyenne d'un pays démocratique telle que la Suède, il était inadmissible de ne pas décerner de prix<ref>{{Lien web|langue=en|titre=The New Academy Prize in Literature Award Ceremony|url=http://ceremony.wonderlandevent.se/?invite=df2f8899b3c7cf8a0dae5004391f8659939b|site=ceremony.wonderlandevent.se|date=2018|consulté le=2018-12-06|extrait="The New Academy was founded to warrant that an international literary prize will be awarded in 2018"}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr|auteur=Axel Gyldén|url=https://www.lexpress.fr/actualite/monde/le-nobel-de-litterature-annule-a-cause-d-un-francais_2005999.html|titre=Balance ton Nobel|périodique=[[L'Express]]|date=4 mai 2018}}.</ref>.


La récipiendaire de ce prix Nobel qualifié d'« alternatif » par la presse est [[Maryse Condé]].
La récipiendaire de ce prix Nobel qualifié d'« alternatif » par la presse est [[Maryse Condé]].


Le {{date-|16 octobre 2018}}, quatre jours après l'annonce de la lauréate du prix, dans l'annexe de l'[[Université Columbia]] à Paris lors d'une rencontre avec les écrivains africains-américains [[Ta-Nehisi Coates]] et [[Jake Lamar]], l'universitaire Maboula Soumahoro prononce un discours dans lequel elle interroge le sens de ce label « alternatif » pour une femme noire écrivaine originaire de la [[Guadeloupe]]<ref>{{Lien web|langue=français|titre=Ta-Nehisi Coates: Huit ans au pouvoir, une tragédie américaine|url=https://globalcenters.columbia.edu/events/ta-nehisi-coates-huit-ans-au-pouvoir-une-tragedie-americaine|site=globalcenters.columbia.edu|date=2018|consulté le=2018-12-14}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=anglais, français|titre=Ta-Nehisi Coates in conversation with Jake Lamar|url=https://www.youtube.com/watch?v=zKVtWmeu5-o&feature=youtu.be&t=3563|site=Youtube.com|date=2018-11-23|consulté le=2018-12-14}}</ref>.
Le {{date-|16 octobre 2018}}, quatre jours après l'annonce de la lauréate du prix, dans l'annexe de l'[[université Columbia]] à Paris lors d'une rencontre avec les écrivains africains-américains [[Ta-Nehisi Coates]] et [[Jake Lamar]], l'universitaire Maboula Soumahoro prononce un discours dans lequel elle interroge le sens de ce label « alternatif » pour une femme noire écrivaine originaire de la [[Guadeloupe]]<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Ta-Nehisi Coates: Huit ans au pouvoir, une tragédie américaine|url=https://globalcenters.columbia.edu/events/ta-nehisi-coates-huit-ans-au-pouvoir-une-tragedie-americaine|site=globalcenters.columbia.edu|date=2018|consulté le=2018-12-14}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en+fr|titre=Ta-Nehisi Coates in conversation with Jake Lamar|url=https://www.youtube.com/watch?v=zKVtWmeu5-o&feature=youtu.be&t=3563|site=Youtube.com|date=2018-11-23|consulté le=2018-12-14}}.</ref>.


== Liste des lauréats ==
== Liste des lauréats ==
En tout, 115 prix Nobel de littérature ont été attribués à 119 lauréats. Le prix n'a pas été décerné 7 années (1914, 1918, 1935, 1940–1943)<ref>{{Lien web|titre=The Nobel Prize in Literature|url=http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/|site=www.nobelprize.org|consulté le=2016-10-14}}</ref> mais a été décerné à deux lauréats en 1904, 1917, 1966 et 1974.
En tout, 115 prix Nobel de littérature ont été attribués à 119 lauréats. Le prix n'a pas été décerné sept années (1914, 1918, 1935, 1940-1943)<ref>{{Lien web|langue=en|titre=All Nobel Prizes in Literature|url=https://www.nobelprize.org/prizes/lists/all-nobel-prizes-in-literature/|site=nobelprize.org|consulté le=2016-10-14}}.</ref> mais a été décerné à deux lauréats en 1904, 1917, 1966 et 1974.


<center>[[#Années 1900|Années 1900]] - [[#Années 1910|1910]] - [[#Années 1920|1920]] - [[#Années 1930|1930]] - [[#Années 1940|1940]] - [[#Années 1950|1950]] - [[#Années 1960|1960]] - [[#Années 1970|1970]] - [[#Années 1980|1980]] - [[#Années 1990|1990]] - [[#Années 2000|2000]] - [[#Années 2010|2010]] - [[#Années 2020|2020]]</center>
<center>[[#Années 1900|Années 1900]] - [[#Années 1910|1910]] - [[#Années 1920|1920]] - [[#Années 1930|1930]] - [[#Années 1940|1940]] - [[#Années 1950|1950]] - [[#Années 1960|1960]] - [[#Années 1970|1970]] - [[#Années 1980|1980]] - [[#Années 1990|1990]] - [[#Années 2000|2000]] - [[#Années 2010|2010]] - [[#Années 2020|2020]]</center>
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* [[1902 en littérature|1902]] : [[Theodor Mommsen]] {{Empire allemand}}
* [[1902 en littérature|1902]] : [[Theodor Mommsen]] {{Empire allemand}}
* [[1903 en littérature|1903]] : [[Bjørnstjerne Bjørnson]] {{Norvège}}
* [[1903 en littérature|1903]] : [[Bjørnstjerne Bjørnson]] {{Norvège}}
* [[1904 en littérature|1904]] : [[Frédéric Mistral]] {{France}}, écrit en [[Occitan|occitan provençal]] ;<br />et [[José de Echegaray]] {{Espagne}}
* [[1904 en littérature|1904]] : [[Frédéric Mistral]] {{France}}, écrit en [[Occitan|occitan provençal]] ;<br />et [[José de Echegaray]] {{Espagne bourbonienne}}
* [[1905 en littérature|1905]] : [[Henryk Sienkiewicz]] {{Royaume du Congrès}} (alors sous administration russe)
* [[1905 en littérature|1905]] : [[Henryk Sienkiewicz]] {{Royaume du Congrès}} (alors sous administration russe)
* [[1906 en littérature|1906]] : [[Giosuè Carducci]] {{drapeau|Italie|1861-state}} [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]]
* [[1906 en littérature|1906]] : [[Giosuè Carducci]] {{drapeau|Italie|1861-state}} [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]]
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* [[1975 en littérature|1975]] : [[Eugenio Montale]] {{Italie}}
* [[1975 en littérature|1975]] : [[Eugenio Montale]] {{Italie}}
* [[1976 en littérature|1976]] : [[Saul Bellow]] {{États-Unis}}, et {{Canada}}
* [[1976 en littérature|1976]] : [[Saul Bellow]] {{États-Unis}}, et {{Canada}}
* [[1977 en littérature|1977]] : [[Vicente Aleixandre]] {{Espagne}}
* [[1977 en littérature|1977]] : [[Vicente Aleixandre]] {{Drapeau|Espagne|1977}} [[Espagne]]
* [[1978 en littérature|1978]] : [[Isaac Bashevis Singer]] {{États-Unis}}, écrit en [[yiddish]]
* [[1978 en littérature|1978]] : [[Isaac Bashevis Singer]] {{États-Unis}}, écrit en [[yiddish]]
* [[1979 en littérature|1979]] : [[Odysséas Elýtis]] {{GRE}}
* [[1979 en littérature|1979]] : [[Odysséas Elýtis]] {{GRE}}
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* [[2006 en littérature|2006]] : [[Orhan Pamuk]] {{TUR}}
* [[2006 en littérature|2006]] : [[Orhan Pamuk]] {{TUR}}
* [[2007 en littérature|2007]] : [[Doris Lessing]] {{GBR}}
* [[2007 en littérature|2007]] : [[Doris Lessing]] {{GBR}}
* [[2008 en littérature|2008]] : [[J. M. G. Le Clézio]]<ref>{{Lien web|url=http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2008/index.html|titre=The Nobel Prize in Literature 2008|éditeur=fondation Nobel|année=2008|consulté le=5 février 2009}}</ref> {{France}}/{{Maurice}}
* [[2008 en littérature|2008]] : [[J. M. G. Le Clézio]]<ref>{{Lien web|url=http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2008/index.html|titre=The Nobel Prize in Literature 2008|éditeur=fondation Nobel|année=2008|consulté le=5 février 2009}}.</ref> {{France}}/{{Maurice}}
* [[2009 en littérature|2009]] : [[Herta Müller]] {{Allemagne}},{{Roumanie}} écrit en allemand
* [[2009 en littérature|2009]] : [[Herta Müller]] {{Allemagne}},{{Roumanie}} écrit en allemand
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=== Années 2020 ===
=== Années 2020 ===
*[[2020 en littérature|2020]] : [[Louise Glück]] {{USA}}
* [[2020 en littérature|2020]] : [[Louise Glück]] {{USA}}
*[[2021 en littérature|2021]] : [[Abdulrazak Gurnah]] {{Tanzanie}}, écrit en anglais
* [[2021 en littérature|2021]] : [[Abdulrazak Gurnah]] {{Tanzanie}}, écrit en anglais
*[[2022 en littérature|2022]] : [[Annie Ernaux]] {{France}}
* [[2022 en littérature|2022]] : [[Annie Ernaux]] {{France}}
* [[2023 en littérature|2023]] : [[Jon Fosse]] {{Norvège}}
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== Statistiques ==
== Statistiques ==
=== Récompenses par nationalité ===
=== Récompenses par nationalité ===
En 2022, les prix par nationalité se répartissent ainsi<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Classement des États du monde par lauréats du prix Nobel de Littérature |url=https://atlasocio.com/classements/education/nobel/classement-etats-par-prix-nobel-litterature-monde.php |site=Atlasocio.com |consulté le=2021-12-07}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Quel pays s’est le plus illustré au Nobel de littérature ? |url=https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/3141879-20211006-prix-nobel-pays-plus-illustre-litterature |site=www.20minutes.fr |consulté le=2021-12-07}}</ref> :
En 2023, les prix par nationalité se répartissent ainsi<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Classement des États du monde par lauréats du prix Nobel de Littérature |url=https://atlasocio.com/classements/education/nobel/classement-etats-par-prix-nobel-litterature-monde.php |site=Atlasocio.com |consulté le=2021-12-07}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Quel pays s'est le plus illustré au Nobel de littérature ?|url=https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/3141879-20211006-prix-nobel-pays-plus-illustre-litterature|périodique=[[20 Minutes (France)|20 Minutes]]|consulté le=2021-12-07}}.</ref> :
{| class="wikitable" align=right
{| class="wikitable" align=right
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! Nationalité<br /> !! Lauréats !! %
! Nationalité<br /> !! Lauréats !! %
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| {{France}} || 16 || {{Pct|16|119}}
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| {{États-Unis}} || 13 || {{Pct|13|119}}
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| {{Royaume-Uni}} || 11 || {{Pct|11|119}}
| {{Royaume-Uni}} || 11 || {{Pct|11|120}}
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| {{Allemagne}} || 8 || {{Pct|8|120}}
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| {{Suède}} || 8|| {{Pct|8|119}}
| {{Suède}} || 8|| {{Pct|8|120}}
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|-
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| {{Espagne}} || 6 || {{Pct|6|120}}
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| {{Italie}} || 6 || {{Pct|6|119}}
| {{Italie}} || 6 || {{Pct|6|120}}
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|-
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| {{Pologne}} || 5 ||{{Pct|5|120}}
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|-
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| {{Drapeau|URSS}} [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] || 3 || {{Pct|3|119}}
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| {{Norvège}} || 3 || {{Pct|3|119}}
| {{Drapeau|URSS}} [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] || 3 || {{Pct|3|120}}
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| {{Danemark}} || 3 || {{Pct|3|119}}
| {{Danemark}} || 3 || {{Pct|3|120}}
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|-
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| {{Suisse}} || 2 || {{Pct|2|119}}
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| {{Guatemala}} || 1 || {{Pct|1|120}}
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=== Récompenses par langue ===
=== Récompenses par langue ===
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=== Répartition par domaines linguistiques ===
=== Répartition par domaines linguistiques ===
En 2022, sur 119 écrivains récompensés par le Prix Nobel, seulement 8 (soit 6,7 %) utilisent des langues appartenant aux domaines linguistiques d'Asie et du Moyen-Orient.
En 2023, sur 121 écrivains récompensés par le Prix Nobel, seulement huit (soit 6,6 %) utilisent des langues appartenant aux domaines linguistiques d'Asie et du Moyen-Orient.


Les 111 écrivains restants (soit 93,2 %) utilisent des langues du domaine linguistique européen. Ils se répartissent de la manière suivante :
Les 113 écrivains restants (soit 93,3 %) utilisent des langues du domaine linguistique européen. Ils se répartissent de la manière suivante :
* écrivains anglophones : 30 (25,2 %)
* écrivains anglophones : 30 (24,8 %)
* écrivains francophones : 16 (13,4 %)
* écrivains francophones : 16 (13,2 %)
* écrivains scandinaves (suédois, norvégien, etc.) : 15 (12,6 %)
* écrivains scandinaves (suédois, norvégien, etc.) : 17 (14 %)
* écrivains germanophones : 14 (11,7 %)
* écrivains germanophones : 14 (11,6 %)
* écrivains slavophones (russe, polonais, etc.) : 13 (10,9 %)
* écrivains slavophones (russe, polonais, etc.) : 13 (10,7 %)
* écrivains hispanophones : 11 (9,2 %)
* écrivains hispanophones : 11 (9,1 %)
* écrivains italophones : 6 (5 %)
* écrivains italophones : 6 (5 %)
* autres langues : 6 (5 %)
* autres langues : 6 (5 %)


Les écrivains de langue anglaise (toutes origines confondues) représentent à eux seuls plus du quart des lauréats.
Les écrivains de langue anglaise (toutes origines confondues) représentent à eux seuls le quart des lauréats.


=== Liste des lauréates ===
=== Liste des lauréates ===
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De {{Date-|1901}} à {{Date-|2023}}, 17 des 120 Prix ont été attribués à des écrivaines<ref>{{Lien web |langue=fr |auteur=Laurence Houât |titre=Nobel de littérature : qui sont ces 16 femmes (contre 101 hommes) couronnées depuis la création du prix ?|url=https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/prix-litteraires/nobel-de-litterature-qui-sont-ces-15-femmes-contre-98-hommes-couronnees-depuis-la-creation-du-prix_4133597.html |date=8 octobre 2020 |site=francetvinfo.fr |consulté le=10 septembre 2021}}.</ref>.

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== Notes et références ==
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=== Références ===
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=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
* Burton Feldman, ''The Nobel Prize: A History of Genius, Contreversy and Prestige'', Arcade Publishing, [[2001]], {{ISBN|1-55970-592-2|9781559 705929}}
* Burton Feldman, ''The Nobel Prize: A History of Genius, Contreversy and Prestige'', Arcade Publishing, [[2001]], {{ISBN|1-55970-592-2|978-1-5597-0592-9}}


=== Articles connexes ===
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=== Liens externes ===
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Version du 31 mars 2024 à 12:33

Prix Nobel de littérature
Nom original Nobelpriset i litteratur
Description Prix récompensant une contribution majeure en littérature
Organisateur Académie suédoise
Pays Drapeau de la Suède Suède
Date de création 1901
Dernier récipiendaire Jon Fosse (2023)
Site officiel nobelprize.org
Collection Prix Nobel de littérature aux éditions Rombaldi (59 volumes).

Le prix Nobel de littérature (Nobelpriset i litteratur en suédois) récompense annuellement, depuis 1901, un écrivain ayant rendu de grands services à l'humanité grâce à une œuvre littéraire qui, selon le testament du chimiste suédois Alfred Nobel, « a fait la preuve d'un puissant idéal »[1].

Récompense considérée comme la plus prestigieuse et la plus médiatique au monde, le prix Nobel de littérature met en lumière un auteur et ses travaux. Il lui assure une promotion à l'échelle planétaire, une renommée internationale et une certaine aisance financière.

Il n'est pas rare que le prix Nobel prenne une signification politique, ayant parfois valeur de désaveu face à des régimes autoritaires. En effet, plusieurs écrivains exilés, dissidents, contestataires, persécutés ou interdits de publication dans leur pays ont été récompensés, tels Miguel Ángel Asturias, Boris Pasternak, Pablo Neruda, Alexandre Soljenitsyne et Gao Xingjian[2],[3].

Le prix Nobel de littérature honore avant tout les romanciers, essayistes, poètes et dramaturges. Toutefois, la liste des lauréats inclut également cinq philosophes (Rudolf Christoph Eucken, Henri Bergson, Albert Camus et Bertrand Russell) dont Jean-Paul Sartre qui le refusa, un historien (Theodor Mommsen), un homme d'État (Winston Churchill, distingué aussi pour ses discours politiques), une nouvelliste (Alice Munro)[4],[5] et un auteur-compositeur-interprète (Bob Dylan).

Nominations et mode de fonctionnement

Annonce du prix Nobel de littérature à Stockholm en 2008.

Chaque fin d'année, le prix Nobel est attribué par l'Académie suédoise[6]. Celle-ci constitue ses nominations avec l'aide d'autres membres d'académies et de sociétés littéraires nationales et étrangères, d'éminents professeurs d'université en littérature, langue et linguistique, d'anciens lauréats du prix ou encore des présidents d'associations d'écrivains, représentant la culture littéraire de leurs pays[6]. L'Académie compose le Comité Nobel (rattaché à la fondation Nobel) avec 5 de ses membres, désignés par cooptation pour 3 ans[7]. Ces 5 académiciens vérifient la pertinence et le critère d'éligibilité des écrivains secrètement nommés pour la récompense[7]. Durant l'automne, un courrier du Comité est expédié à près de 700 adresses afin d'être retourné pour le choix de l'année suivante[7]. Toutes les personnes ou institutions sollicitées proposent en conséquence une liste de plusieurs noms[7]. Il leur est fortement conseillé de détailler, expliquer ou motiver leurs choix bien que le règlement de la fondation Nobel ne l'oblige pas[7]. Il est en revanche formellement interdit aux personnalités démarchées de voter pour elles-mêmes si elles sont éligibles pour le prix[7]. Près de 350 noms sont proposés annuellement aux membres du Comité qui les éliminent à partir du 1er février pour ne garder que 15 à 20 candidatures en avril[6]. Cette première sélection est soumise au préalable à tous les membres de l'Académie qui procèdent à des recommandations[7]. Fin mai, le Comité Nobel fixe une liste finale de 5 noms, avalisée par l'ensemble des académiciens qui aura alors à désigner le récipiendaire du prix[6]. Si l'un des auteurs proposés n'est pas publié dans une langue accessible à la majorité du jury, l'Académie peut réclamer une traduction spéciale[7]. De même, si un écrivain nommé est méconnu du Comité mais semble légitime pour le prix, la fondation Nobel dépêche des experts qui éclairent l'Académie sur la portée de l'œuvre du candidat potentiel[7]. Après avoir étudié en détail, durant l'été, les ouvrages des auteurs en lice, les jurés organisent plusieurs discussions[7]. Il arrive souvent que les travaux d'un écrivain, nommé à plusieurs reprises, soient déjà lus[7]. Dans ce cas, l'Académie prend en compte les nouvelles publications de l'auteur sélectionné[7]. En conclusion des débats, début octobre, le jury procède à un vote[7]. La personne qui obtient plus de la moitié des voix est désignée comme lauréate du prix. Les 4 recalés sont réinscrits d'office pour les sélections de l'année suivante[2]. Le jury peut aussi déroger à la règle à la suite d'une décision exceptionnelle comme dans le cas très rare d'attribution d'un prix double ou conjoint. Ce mode de fonctionnement est similaire pour toutes les autres catégories du prix Nobel. L'identité du récipiendaire est révélée par le secrétaire perpétuel de l'Académie, courant octobre, lors d'une conférence de presse dans le bâtiment de Börshuset, situé dans la vieille ville de Stockholm. Le contenu des délibérations et la liste finale des 5 personnalités sont gardés secrets pendant 50 ans[8]. Le nom du vainqueur fait en conséquence l'objet de spéculations au sein des milieux littéraires.

Même si le montant de la somme inhérente au prix a évolué au cours de son histoire, il est fixé aujourd'hui à 10 millions de couronnes suédoises, à savoir environ un million d'euros[9]. Chaque personnalité récompensée se voit décerner, par le roi de Suède, la médaille d'or et le diplôme de la fondation Nobel au cours d'une cérémonie de remise des prix, le à Stockholm, date-anniversaire de la mort d'Alfred Nobel. Auparavant, le gagnant doit faire un discours devant les membres de l'Académie suédoise dans lequel il définit son œuvre et ses aspirations artistiques.

Depuis sa création, le prix est revenu à 17 femmes et 5 membres de l'Académie suédoise, élus de manière antérieure ou postérieure à la réception de leur récompense[9]. La personnalité la plus âgée à avoir obtenu cette distinction est Doris Lessing (1919-2013), récompensée en 2007 à 87 ans, 11 mois et 19 jours. Le plus jeune lauréat est Rudyard Kipling (1865-1936), récompensé en 1907 à 41 ans.

Histoire controversée

Nombre de critiques, spécialistes et cercles de lecteurs déplorent le fait que la qualité des apports poétique et esthétique d'une œuvre au domaine des Lettres n'est pas le seul critère impartial sur lequel s'axe l'Académie suédoise pour attribuer le prix Nobel. Son histoire est jalonnée de controverses et il entraîne régulièrement des contestations.

Premières années

Le poète français Sully Prudhomme est le premier lauréat du prix Nobel de littérature.

Lors des premières années de l'attribution du prix Nobel, le critère d'« idéalisme », fixé par le testament d'Alfred Nobel[10] est la principale cause de l'oubli d'écrivains et de dramaturges aussi importants que Léon Tolstoï, Anton Tchekhov, Émile Zola, August Strindberg, Jack London, Henry James, Thomas Hardy ou encore Henrik Ibsen dont les œuvres sont jugées trop pessimistes. Selon l'historien de la littérature François Comba, l'Académie suédoise, sous l'influence du secrétaire perpétuel Carl David af Wirsén, rapproche au départ la notion d'« idéalisme » de « patriotisme » et met à l'honneur toute la littérature nationaliste ou régionaliste européenne (Theodor Mommsen, Henryk Sienkiewicz, Frédéric Mistral…)[11]. Pendant la Première Guerre mondiale à laquelle la Suède ne participe pas, le comité revendique une ligne de neutralité, récompensant des auteurs de pays non-belligérants (comme le Danemark) ou des écrivains tels que Romain Rolland dont la vision universaliste et optimiste fait consensus[11].

Dans les années 1920, l'Académie change de ligne de conduite et prime des écrivains ouvertement sceptiques et critiques comme Carl Spitteler et Anatole France dont l'œuvre s'accommode mal avec l'idéal exigé par Alfred Nobel[11]. Dans les années 1930, le jury s'ouvre au continent américain et récompense Sinclair Lewis[11]. Aucun écrivain allemand ou autrichien susceptible de gêner Adolf Hitler n'est distingué à l'instar de Bertolt Brecht, Hermann Broch, Joseph Roth, Stefan Zweig ou encore Robert Musil[11]. Pour cette raison, l'écrivain tchécoslovaque Karel Čapek, farouchement opposé au national-socialisme et nommé sept fois pour le prix entre 1932 et 1938, est également écarté[12]. En 1931, la récompense est attribuée à l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie Erik Axel Karlfeldt, décédé en avril. Auparavant, l'auteur avait déjà été proposé par ses collègues mais il aurait refusé le prix en 1919[13]. Il s'agit de la seule fois dans l'histoire des Nobel que la distinction est décernée intentionnellement de manière posthume[14]. Bien que réfugié en France et déchu de sa nationalité soviétique, Ivan Bounine devient le premier écrivain de langue russe à être distingué en 1933 car le comité préfère écarter Maxime Gorki, jugé trop proche de Staline et se ranger à l'avis d'un neveu d'Alfred Nobel dont les faveurs allaient à Bounine[15]. Au cours de la même décennie, la candidature de Sigmund Freud est étudiée et rejetée[16]. Lors de la Seconde Guerre mondiale, le prix est suspendu de 1940 à 1943 à la demande du gouvernement suédois qui affiche une politique de neutralité dans le conflit[11].

Au milieu des années 1940, alors que le comité a laissé mourir des grands créateurs comme James Joyce, Virginia Woolf et surtout Paul Valéry, mort en 1945 alors qu'il était le favori pour remporter le prix cette année-là, il s'agit de faire du rattrapage et de mettre à l'honneur des écrivains dont le prestige littéraire est mondial : William Faulkner, Hermann Hesse ou encore André Gide[11]. Lors de la Guerre froide, les académiciens donnent le prix à des pays méprisés lors des premières années comme le Guatemala, la Grèce et l'Islande, ce qui préfigure l'ouverture au tiers-monde et à la littérature cosmopolite, qui connaît son apogée avec la récompense décernée à Gabriel García Márquez en 1982[11].

Choix des lauréats dans les années 1950

En 1953, le comité distingue Winston Churchill, unique ancien Chef du gouvernement à recevoir ce prix. Ce dernier lui est décerné « pour sa maîtrise de la description historique et biographique ainsi que pour ses discours brillants pour la défense des valeurs humaines »[17]. Lors de l'annonce de sa victoire, Churchill est à la fois déçu car il souhaitait obtenir le prix Nobel de la paix et surpris, s'exclamant : « Tiens, je ne savais pas que j'écrivais si bien »[18]. La candidature de Charles de Gaulle est sérieusement étudiée dix ans plus tard, car l'Académie apprécie la qualité littéraire de ses ouvrages[19].

En 1954, 27 écrivains sont pressentis, dont l'Espagnol Ramón Menéndez Pidal, l'Américain Ernest Hemingway, et les Français André Malraux et Albert Camus dont les noms circulent depuis la fin des années 1940. Même si les jurés suédois ont une préférence pour Malraux, celui-ci n'a pas écrit de romans depuis longtemps, ce qui rend son choix impossible. Hemingway, quant à lui, vient d'écrire Le Vieil Homme et la Mer deux ans plus tôt. Le cynisme, la sécheresse et la brutalité de son écriture ne s'accordent pas avec l'idéal souhaité par le testament d'Alfred Nobel mais l'écrivain a une forme d'héroïsme qui séduit certains jurés. Il l'emporte[20].

En 1955, 46 noms figurent sur la première liste de pressentis, dont les Français Albert Camus, Henri Bosco, André Malraux, Jules Romains et Georges Duhamel. L'Islandais Halldór Laxness est choisi.

En 1956, parmi les 44 écrivains pressentis, il y a 12 Français : Georges Duhamel, Marcel Pagnol, Henry de Montherlant, Henri Bosco, Jean Guitton, Marthe Bibesco, Saint-John Perse, André Malraux, Gabriel Marcel, Albert Camus, Jean Schlumberger et Jules Supervielle. Mais l'Espagnol Ramón Menéndez Pidal obtient le plus de parrainages de personnalités et d'institutions. Pour Anders Österling, secrétaire perpétuel de l'Académie, le choix doit se faire entre lui et Juan Ramón Jiménez : « Il est évident que la zone espagnole a été sérieusement négligée depuis 1922, lorsque le dramaturge Jacinto Benavente a été récompensé. Le choix doit se faire entre lui et Jimenez »[20]. Camus vient alors de publier La Chute, un récit qui, pour les membres du comité, peut être comparé à La Peste pour son impact. Cette nouvelle œuvre renforce indéniablement les mérites d'Albert Camus et ses chances d'obtenir le Nobel, mais le jury préfère attendre un examen approfondi et privilégie les lettres espagnoles, négligées depuis une trentaine d'années. Juan Ramon Jimenez est donc choisi.

En 1957, 49 noms sont cités sur les listes dont 12 nouveaux. Cette fois, le choix, unanime, du comité se porte sur Albert Camus. Quelques mois auparavant, le , Anders Österling écrit une critique élogieuse de L'Exil et le Royaume dans le quotidien Stockholms Tidningen. Le , Albert Camus est désigné « pour son importante œuvre littéraire qui met en lumière, avec un sérieux pénétrant, les problèmes qui se posent de nos jours à la conscience des hommes »[20].

En 1958, l'attribution du prix à Boris Pasternak déclenche la colère des autorités soviétiques. L'auteur est forcé de décliner la récompense pour s'épargner des sanctions[21].

Le Nobel dans les années 1960 et 1970

Lorsqu'en 2012, la fondation Nobel rend publiques les archives des délibérations vieilles de cinquante ans comme le stipule le règlement, elle révèle que John Steinbeck fut récompensé par défaut[22],[23]. Les quatre autres auteurs retenus dans la sélection finale de 1962 étaient la Danoise Karen Blixen, le Français Jean Anouilh, puis les Britanniques Lawrence Durrell et Robert Graves[22],[23]. Il fut d'emblée décidé que Durell serait écarté[22]. Son œuvre ne faisait pas l'unanimité au sein du jury qui avait déjà évincé sa candidature l'année précédente sur l'insistance d'un membre du comité trouvant que ses livres avaient un « arrière-goût douteux », en raison d'une « préoccupation monomaniaque pour les développements érotiques »[22]. Blixen mourut un mois avant l'élection du gagnant et Anouilh fut évincé car sa victoire aurait été trop proche de celle Saint-John Perse, le dernier lauréat français[22],[23]. Graves, quant à lui, était connu comme poète bien qu'il ait publié quelques romans[23]. Mais pour Anders Österling, secrétaire perpétuel d'alors, personne dans la poésie anglophone n'égalait le talent d'Ezra Pound, dont il fut décidé qu'il serait privé de la récompense à cause de ses positions politiques[23]. Steinbeck obtint finalement le prix. L'annonce de son couronnement fut mal reçue par la presse suédoise et américaine pour qui il était un auteur du passé[23]. En effet, l'écrivain américain n'avait rien publié de marquant depuis longtemps et ses grands romans (Les Raisins de la colère, Des souris et des hommes et À l'est d'Éden) étaient derrière lui[23]. Quand il répondit à un journaliste lui demandant s'il méritait la distinction, Steinbeck, lui-même surpris par sa victoire, répondit : « Franchement, non »[22]. Jamais par la suite, Anouilh, Graves et Durrell ne furent primés.

En 1964, Jean-Paul Sartre décline le prix Nobel qui, selon lui, est « beaucoup trop tourné vers l'Occident »[24].

En 1968, le prix est décerné à Yasunari Kawabata sur recommandation d'experts de la littérature japonaise car le jury souhaitait équilibrer son palmarès et s'ouvrir à l'Asie[11].

Le lauréat de l'année 1970 Alexandre Soljenitsyne, dissident soviétique, ne veut pas se rendre à Stockholm de peur de ne pas être autorisé à retourner en Union soviétique où il est assigné à résidence et où son œuvre, mise à l'index, circule clandestinement. Mais après le refus du gouvernement suédois d'honorer Soljenitsyne par une remise du prix avec lecture et discours publics lors d'une cérémonie organisée à l'ambassade de Moscou, l'écrivain est prêt à décliner la récompense et l'argent, rejetant les conditions suédoises qui, selon lui, sont « une insulte au prix Nobel lui-même ». Il ne peut percevoir sa distinction qu'après avoir été déchu de sa nationalité soviétique et exclu d'URSS en 1974[25].

En 1974, Graham Greene, Vladimir Nabokov et Saul Bellow, gardés dans la liste finale, sont donnés favoris. Mais le comité préfère attribuer un prix conjoint aux écrivains suédois Eyvind Johnson et Harry Martinson, tous deux membres de l'Académie et donc jurés du prix Nobel. Bellow est finalement honoré deux ans plus tard en 1976, mais ni Greene ni Nabokov ne seront récompensés[26].

Un prix politique ?

La non-attribution du prix est souvent polémique dans la mesure où elle peut avoir valeur de sanction politique, à l'instar de Louis-Ferdinand Céline et d'Ezra Pound, écartés respectivement pour leurs prises de position antisémite et pro-fasciste[27],[28]. Maintes fois retenu sur les listes, Jorge Luis Borges n'aurait, de son côté, jamais été récompensé comme le suppose son biographe Edwin Williamson dans Jorge Luis Borges, une vie, en raison de ses relations conciliantes, voire troubles, avec les dictatures argentine et chilienne[29].

Josepha Laroche soutient justement la thèse selon laquelle les motivations de l'Académie suédoise dépassent l'évaluation de la qualité littéraire d'une œuvre ou de son apport novateur pour s'inscrire dans une dimension éminemment diplomatique : « Il n'y a pas d'équation entre la valeur littéraire et le Nobel. Un grand écrivain novateur ne mérite pas forcément le prix. Il s'agit d'incarner dans sa personne, mais aussi dans son œuvre, des valeurs de respect des droits des peuples. Le Nobel, y compris en littérature, a pour horizon la pacification des relations internationales »[27]. François Comba nuance cette affirmation, expliquant que la valeur esthétique et littéraire reste primordiale dans l'attribution du prix même si le critère politique n'est pas évincé : « De manière générale, les prix Nobel font preuve de bonne volonté, et ne commettent pas tant d'erreurs que cela : sur 109 lauréats, on trouve une quarantaine de très grands noms. […] Il s'agit fondamentalement d'un prix de littérature, même s'il inclut des considérations géographiques et politiques. C'est ce qui explique son poids »[11].

Cependant, les oublis notables contrastent avec certains choix du comité comme le fait de récompenser Pablo Neruda et Jean-Paul Sartre, proches du communisme, Gabriel García Márquez, proche ami de Fidel Castro ou encore Camilo José Cela, qui a toujours oscillé entre connivence et critique du franquisme, ayant assuré un temps la fonction de censeur littéraire, entre 1943 et 1944, tout en étant lui-même censuré[30],[31],[32].

En août 2006, à la suite du chahut médiatique provoqué par la révélation de l'engagement volontaire au sein de la Waffen-SS en 1944 de Günter Grass (récompensé en 1999), la fondation Nobel intervient face aux sommations de la droite allemande et d'une partie de la presse qui demandent à l'écrivain de rendre sa récompense et la somme d'argent reçue. Le président du comité déclare que « l'attribution des prix est irréversible car aucun prix Nobel n'a été retiré à quiconque par le passé »[33]. En avril 2012, après la publication du poème polémique « Ce qui doit être dit » dans lequel l'auteur accuse Israël de menacer la paix mondiale, Peter Englund, secrétaire perpétuel de l'Académie, exclut une nouvelle fois toute sanction vis-à-vis de Grass, rappelant que le prix lui a été attribué pour son mérite littéraire uniquement[34],[35].

Les choix du jury dans le courant des années 2000 ont été soupçonnés, par une partie de la presse, d'être motivés par l'actualité politique, notamment avec le couronnement d'Harold Pinter en 2005 qui concorde avec ses virulentes prises de position contre la guerre d'Irak ou celui d'Orhan Pamuk en 2006 après la reconnaissance publique par ce dernier du génocide arménien et du massacre des Kurdes par la Turquie[36],[37].

Le comité est en effet souvent taxé d'« élitisme » et d'« engagement gauchiste » par une partie de la presse car il met régulièrement à l'honneur des romanciers ou des poètes méconnus du grand public, pour la plupart engagés à gauche, mais le jury a toujours revendiqué son indépendance[37]. Néanmoins, le choix de récompenser Mario Vargas Llosa en 2010 (auteur très engagé à droite et candidat du parti libéral lors de l'élection présidentielle du Pérou en 1990) est à considérer[38].

En 2012, le choix du Chinois Mo Yan entraîne de vives contestations au sein du monde des arts, des lettres et de la culture en raison de la proximité supposée de l'auteur avec les autorités de Pékin et son silence vis-à-vis de la répression des opposants politiques, du non-respect des droits de l'homme et de l'application de la censure en Chine[39]. Parmi ses détracteurs se trouvent l'artiste Ai Weiwei, l'écrivain indo-britannique Salman Rushdie et la romancière germano-roumaine Herta Müller, lauréate du prix en 2009, qui considère ce Nobel comme une « honte », une « catastrophe » et « une claque pour tous ceux qui travaillent au respect de la démocratie et les droits de l'homme »[40],[41].

Des attributions parfois contestées

Plusieurs spécialistes regrettent que la liste des lauréats comporte pléthore d'oublis majeurs[42].

L'Académie reconnaît avoir raté des monuments de la littérature universelle, en raison du décès prématuré de certains écrivains : Marcel Proust, Rainer Maria Rilke et Antonin Artaud (morts tous trois à 51 ans), Vladimir Maïakovski et Paul Celan (qui se sont respectivement donné la mort à 36 et 49 ans) ou encore Federico García Lorca (exécuté sommairement à 38 ans)[27].

L'actuel membre du jury Kjell Espmark rappelle par ailleurs que l'essentiel de l'œuvre de Franz Kafka, Fernando Pessoa, Constantin Cavafy et Ossip Mandelstam a été publié après leur mort et qu'en conséquence les jurés n'ont jamais pu en évaluer la portée de leur vivant[43].

Sur son site, l'Académie reconnaît cependant quelques choix d'un goût discutable et l'indigence de certains résultats, notamment lors de la décennie 1930-1939 : « La période offre plusieurs lauréats légitimement jugés médiocres, et qui cachent autant de négligences : Virginia Woolf aurait dû être récompensée à la place de Pearl Buck, etc. »[27],[N 1],[44] .

Les médias notent, de plus, que beaucoup de poètes ont été récompensés, dans un esprit fidèle à celui d'Alfred Nobel, grand amateur de poésie[27]. À l'inverse les écrivains qui privilégient une multitude de petits ouvrages aux grandes sommes semblent défavorisés. Selon le professeur en littérature comparée de Harvard, David Damrosh, Italo Calvino n'a jamais été nobelisé pour cette raison[27]. Toutefois, le prix décerné en 2013 à Alice Munro, qui écrit surtout des nouvelles, semble marquer un changement.

En 1989, la romancière Kerstin Ekman « démissionne » de l'Académie suédoise pour cause de non-condamnation, de la part de ses collègues, de la fatwa islamique contre Salman Rushdie, écarté du palmarès[45],[37]. Elle a toujours sa place à l'Académie, mais refuse depuis l'affaire Rushdie de participer aux réunions.

L'année de l'attribution surprise du prix à l'homme de théâtre Dario Fo, en 1997, Salman Rushdie et Arthur Miller en lice, faisaient figure de favoris. Mais le jury aurait considéré leur éventuelle victoire comme « beaucoup trop prévisible », émanant d'un choix « trop populaire »[46].

Le choix d'Elfriede Jelinek en 2004 n'a pas seulement divisé la presse, il a également été l'objet de violents débats au sein de l'Académie[37]. Sur l'exemple d'Ekman, le professeur en littérature scandinave Knut Ahnlund quitte sa fonction d'académicien en 2005, jugeant l'honneur fait à l'écrivain autrichien être un « choc d'une extrême gravité, ayant causé des dommages irréparables à la littérature de manière générale et à la réputation du prix en particulier »[45]. Il n'a plus participé à aucun débat de l'Académie jusqu'à son décès en 2012.

Les propos de l'ancien secrétaire perpétuel de l'Académie suédoise Horace Engdahl, qui justifiait devant l'Associated Press en octobre 2008 la précellence accordée par les jurés aux auteurs européens, ont déclenché un tollé au sein des milieux littéraires outre-Atlantique :

« Il existe bien sûr des auteurs forts dans toutes les grandes cultures, mais on ne peut pas nier le fait que l'Europe est toujours le centre du monde littéraire … pas les États-Unis […] Les États-Unis sont trop isolés, ils ne traduisent pas assez et ne participent pas au dialogue des littératures[47]. »

L'année suivante, le nouveau secrétaire perpétuel Peter Englund enraye la polémique en expliquant qu'« il est forcément plus facile pour les Européens d'être en phase avec la littérature européenne »[48].

Critiques récentes

La critique la plus insistante concerne la perspective euro-centrée ou occidentalo-centrée du jury et le fait que certaines zones géographiques soient totalement délaissées, faute de rayonnement ou de traductions suffisantes à l'instar de la littérature persane[27]. Les lettres arabes trouveraient, quant à elles, peu d'échos car elles sont souvent contextualisées, référencées et ont un contenu assez social, ce qui suppose qu'elles correspondent mal à l'exigence universaliste du Nobel[27].

Au vu du nombre de lauréats (81 sur 113), l'Europe est sans conteste le continent le plus récompensé par l'Académie. Plusieurs journaux suédois ironisent d'ailleurs sur le fait que la Suède détient plus de prix Nobel que l'Asie (huit prix suédois contre quatre à peine pour le continent asiatique : deux japonais, un indien et un chinois[49])[50]. L'Afrique a attendu très longtemps son premier lauréat, le Nigérian d'expression anglaise Wole Soyinka en 1986. L'ont suivi l'Égyptien arabophone Naguib Mahfouz en 1988, puis les Sud-Africains anglophones Nadine Gordimer et J. M. Coetzee, récompensés respectivement en 1991 et 2003, et le Tanzanien anglophone Abdulrazak Gurnah en 2021.

De même, certains favoris de la presse sont systématiquement évincés, à l'instar de Philip Roth, Amos Oz, Ismaïl Kadaré, Milan Kundera, Adonis, Ko Un, Haruki Murakami et Claudio Magris[51],[52].

Nouvelle Académie et Nobel dit « alternatif » (2018)

Dans le sillage du mouvement féministe suscité par le hashtag #MeToo, 18 femmes portent publiquement de graves accusations contre Jean-Claude Arnault, époux de l'académicienne Katarina Frostenson dont le prestige, jusque-là, protégeait la réputation du photographe. L'académie, face au scandale médiatique déclenché par ces témoignages accablants, décide de reporter le Nobel de littérature à l'année suivante. Refusant d'avoir à subir le comportement d'un homme, des personnalités suédoises, dont Alexandra Pascalidou, autrice de Me too : Så går vi vidare Röster, redskap och råd (Lava Förlag, 2017), fonde une Nouvelle Académie chargée de décerner un prix littéraire de portée internationale en soulignant, précisément, le rôle crucial de la littérature à l'heure de #MeToo dans un monde qui se polarise. D'après elle, en tant que citoyenne d'un pays démocratique telle que la Suède, il était inadmissible de ne pas décerner de prix[53],[54].

La récipiendaire de ce prix Nobel qualifié d'« alternatif » par la presse est Maryse Condé.

Le , quatre jours après l'annonce de la lauréate du prix, dans l'annexe de l'université Columbia à Paris lors d'une rencontre avec les écrivains africains-américains Ta-Nehisi Coates et Jake Lamar, l'universitaire Maboula Soumahoro prononce un discours dans lequel elle interroge le sens de ce label « alternatif » pour une femme noire écrivaine originaire de la Guadeloupe[55],[56].

Liste des lauréats

En tout, 115 prix Nobel de littérature ont été attribués à 119 lauréats. Le prix n'a pas été décerné sept années (1914, 1918, 1935, 1940-1943)[57] mais a été décerné à deux lauréats en 1904, 1917, 1966 et 1974.

Années 1900 - 1910 - 1920 - 1930 - 1940 - 1950 - 1960 - 1970 - 1980 - 1990 - 2000 - 2010 - 2020

Années 1900

Années 1910

Années 1920

Années 1930

Années 1940

Années 1950

Années 1960

Années 1970

Années 1980

Années 1990

Années 2000

Années 2010

Années 2020

Statistiques

Récompenses par nationalité

En 2023, les prix par nationalité se répartissent ainsi[59],[60] :

Nationalité
Lauréats %
Drapeau de la France France 16 13,3 %
Drapeau des États-Unis États-Unis 13 10,8 %
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni 11 9,17 %
Drapeau de l'Allemagne Allemagne 8 6,67 %
Drapeau de la Suède Suède 8 6,67 %
Drapeau de l'Espagne Espagne 6 5 %
Drapeau de l'Italie Italie 6 5 %
Drapeau de la Pologne Pologne 5 4,17 %
Drapeau de l'Irlande Irlande 4 3,33 %
Drapeau de la Norvège Norvège 4 3,33 %
Drapeau de l'URSS URSS 3 2,5 %
Drapeau du Danemark Danemark 3 2,5 %
Drapeau de la Russie Russie et URSS 3 2,5 %
Drapeau du Japon Japon 2 1,67 %
Drapeau de la Suisse Suisse 2 1,67 %
Drapeau du Chili Chili 2 1,67 %
Drapeau de la Grèce Grèce 2 1,67 %
Drapeau d'Afrique du Sud Afrique du Sud 2 1,67 %
Drapeau de l'Autriche Autriche 2 1,67 %
Drapeau de l'Inde Inde 1 0,833 %
Drapeau de la Belgique Belgique 1 0,833 %
Drapeau de la Finlande Finlande 1 0,833 %
Drapeau de l'Islande Islande 1 0,833 %
Drapeau de la République fédérative socialiste de Yougoslavie Yougoslavie 1 0,833 %
Drapeau d’Israël Israël 1 0,833 %
Drapeau du Guatemala Guatemala 1 0,833 %
Drapeau de l'Australie Australie 1 0,833 %
Drapeau de la Colombie Colombie 1 0,833 %
Drapeau de la Tchécoslovaquie Tchécoslovaquie 1 0,833 %
Drapeau du Nigeria Nigeria 1 0,833 %
Drapeau de l'Égypte Égypte 1 0,833 %
Drapeau du Mexique Mexique 1 0,833 %
Drapeau du Portugal Portugal 1 0,833 %
Drapeau de la Hongrie Hongrie 1 0,833 %
Drapeau de la Turquie Turquie 1 0,833 %
Drapeau de Sainte-Lucie Sainte-Lucie 1 0,833 %
Drapeau du Pérou Pérou 1 0,833 %
Drapeau de la République populaire de Chine Chine 1 0,833 %
Drapeau du Canada Canada 1 0,833 %
Drapeau de la Biélorussie Biélorussie 1 0,833 %
Drapeau de la Tanzanie Tanzanie 1 0,833 %
Drapeau de la Roumanie Roumanie 1
France: 16 (13,1 %)États-Unis: 13 (10,7 %)Royaume-Uni: 11 (9 %)Allemagne: 8 (6,6 %)Suède: 8 (6,6 %)Espagne: 6 (4,9 %)Italie: 6 (4,9 %)Pologne: 5 (4,1 %)Irlande: 4 (3,3 %)Norvège: 4 (3,3 %)Danemark: 3 (2,5 %)URSS: 3 (2,5 %)Afrique du Sud: 2 (1,6 %)Chili: 2 (1,6 %)Grèce: 2 (1,6 %)Suisse: 2 (1,6 %)Japon: 2 (1,6 %)Autriche: 2 (1,6 %)autres: 23 (18,9 %)
  •   France: 16 (13,1 %)
  •   États-Unis: 13 (10,7 %)
  •   Royaume-Uni: 11 (9 %)
  •   Allemagne: 8 (6,6 %)
  •   Suède: 8 (6,6 %)
  •   Espagne: 6 (4,9 %)
  •   Italie: 6 (4,9 %)
  •   Pologne: 5 (4,1 %)
  •   Irlande: 4 (3,3 %)
  •   Norvège: 4 (3,3 %)
  •   Danemark: 3 (2,5 %)
  •   URSS: 3 (2,5 %)
  •   Afrique du Sud: 2 (1,6 %)
  •   Chili: 2 (1,6 %)
  •   Grèce: 2 (1,6 %)
  •   Suisse: 2 (1,6 %)
  •   Japon: 2 (1,6 %)
  •   Autriche: 2 (1,6 %)
  •   autres: 23 (18,9 %)

Récompenses par langue

En 2016, les prix par langue d'écriture se répartissent ainsi[9] :

Langue
Lauréats %
Anglais 29 25,4 %
Français 14[N 2] 12,3 %
Allemand 13 11,4 %
Espagnol 11 9,65 %
Suédois 7 6,14 %
Italien 6 5,26 %
Russe 6 5,26 %
Polonais 5 3,51 %
Norvégien 3 2,63 %
Danois 3 2,63 %
Grec 2 1,75 %
Japonais 2 1,75 %
Chinois mandarin 2 1,75 %
Arabe 1 0,877 %
Bengali 1 0,877 %
Finnois 1 0,877 %
Hébreu 1 0,877 %
Hongrois 1 0,877 %
Islandais 1 0,877 %
Provençal 1 0,877 %
Portugais 1 0,877 %
Serbo-croate 1 0,877 %
Tchèque 1 0,877 %
Turc 1 0,877 %
Yiddish 1 0,877 %
anglais: 29 (25,4 %)français: 14 (12,3 %)allemand: 13 (11,4 %)espagnol: 11 (9,6 %)suédois: 7 (6,1 %)italien: 6 (5,3 %)russe: 6 (5,3 %)polonais: 4 (3,5 %)norvégien: 3 (2,6 %)danois: 3 (2,6 %)autres: 18 (15,8 %)
  •   anglais: 29 (25,4 %)
  •   français: 14 (12,3 %)
  •   allemand: 13 (11,4 %)
  •   espagnol: 11 (9,6 %)
  •   suédois: 7 (6,1 %)
  •   italien: 6 (5,3 %)
  •   russe: 6 (5,3 %)
  •   polonais: 4 (3,5 %)
  •   norvégien: 3 (2,6 %)
  •   danois: 3 (2,6 %)
  •   autres: 18 (15,8 %)

Répartition par domaines linguistiques

En 2023, sur 121 écrivains récompensés par le Prix Nobel, seulement huit (soit 6,6 %) utilisent des langues appartenant aux domaines linguistiques d'Asie et du Moyen-Orient.

Les 113 écrivains restants (soit 93,3 %) utilisent des langues du domaine linguistique européen. Ils se répartissent de la manière suivante :

  • écrivains anglophones : 30 (24,8 %)
  • écrivains francophones : 16 (13,2 %)
  • écrivains scandinaves (suédois, norvégien, etc.) : 17 (14 %)
  • écrivains germanophones : 14 (11,6 %)
  • écrivains slavophones (russe, polonais, etc.) : 13 (10,7 %)
  • écrivains hispanophones : 11 (9,1 %)
  • écrivains italophones : 6 (5 %)
  • autres langues : 6 (5 %)

Les écrivains de langue anglaise (toutes origines confondues) représentent à eux seuls le quart des lauréats.

Liste des lauréates

De à , 17 des 120 Prix ont été attribués à des écrivaines[61].

Notes et références

Notes

  1. Un exemple concernant les écrivaines est celui de Concha Espina, proposée vingt-cinq fois en neuf ans sans jamais être lauréate.
  2. Samuel Beckett, qui a écrit plusieurs de ses ouvrages en français avant de les traduire en anglais, est comptabilisé par l'Académie Nobel comme un auteur d'expression anglaise. Gao Xingjian a écrit plusieurs pièces de théâtre ainsi qu'un essai et un recueil de poésie en français mais écrit ses romans en mandarin, langue à laquelle il reste associé par l'Académie.

Références

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  14. En 2011, le prix Nobel de médecine est décerné à Ralph Steinman alors que ce dernier vient de mourir quelques jours auparavant sans que le jury en soit informé ; le prix est maintenu malgré les statuts.
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  49. En réalité, deux auteurs chinois ont été mis à l'honneur : Gao Xingjian (2000) et Mo Yan (2012). Il faut néanmoins mettre de côté le cas de Gao, qui écrit en mandarin et a été récompensé pour avoir ouvert de nouvelles voies à l'art littéraire chinois. Mais il est un écrivain dissident et est mis à l'index dans son pays d'origine. Il a d'ailleurs accepté le prix sous bannière française (il a reçu la nationalité française en 1997) et les autorités chinoises n'ont jamais reconnu ce prix Nobel : aucun journal n'a relayé l'information de sa victoire en 2000.
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  52. Le Figaro.fr, Blaise de Chabalier, Tomas Tranströmer, Prix Nobel de Littérature, le 6 octobre 2011.
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Annexes

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Bibliographie

Articles connexes

Liens externes