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« Disgrâce (roman) » : différence entre les versions

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== Analyse ==
== Analyse ==
Ce roman très sombre décrit avec une extrême froideur la société sud-africaine post-[[Apartheid en Afrique du Sud|apartheid]], dans laquelle aucune justice n'existe, laissant place à des horreurs en tout genre, sous le couvert d'un gouvernement impuissant. L'auteur utilise très peu de descriptions, il s'attache essentiellement aux personnages, à leurs relations, à leurs actions et à leurs états d'âme. Le roman est dans la tradition du ''bildungsroman'' ou [[roman d'apprentissage]] dans lequel le personnage principal évolue dans sa compréhension du monde environnant ou des autres personnages au fur et à mesure de la narration. C'est ici un homme mûr qui voit ses convictions s'ébranler et qui réalise son impuissance à agir sur le monde.
Ce roman très sombre décrit avec une extrême froideur la société sud-africaine post-[[Apartheid en Afrique du Sud|apartheid]], dans laquelle aucune justice n'existe, laissant place à des horreurs en tout genre, sous le couvert d'un gouvernement impuissant. L'auteur utilise très peu de descriptions, il s'attache essentiellement aux personnages, à leurs relations, à leurs actions et à leurs états d'âme. Le roman est dans la tradition du bildungsroman ou [[roman d'apprentissage]] dans lequel le personnage principal évolue dans sa compréhension du monde environnant ou des autres personnages au fur et à mesure de la narration. C'est ici un homme mûr qui voit ses convictions s'ébranler et qui réalise son impuissance à agir sur le monde.


''Disgrâce'' est le dernier roman de Coetzee avant son départ pour l'Australie.
''Disgrâce'' est le dernier roman de Coetzee avant son départ pour l'Australie.

'''Analyse selon le point de vue du "<u>[[narrateur incertain]]</u>", tradition narrative du roman anglophone :'''

Très inspiré du [[Lolita]] de [[Nabokov|Vladimir Nabokov]], ''Disgrace'' est raconté du point de vue de David Lurie, un professeur sud-africain blanc de [[Littérature européenne|littérature occidentale]], narrateur incertain tout aussi habile au [[déni]] et à la minimisation que Humbert Humbert. Le choix du nom est révélateur, puisqu'il est phonétiquement proche de l'expression ''to lure'', "attirer par la ruse, appâter, piéger". Dans l'[[Afrique du Sud]] post-[[apartheid]], Lurie décrit froidement le viol de Mélanie Isaacs, une de ses étudiantes, trop sidérée pour réagir et se défendre, sans jamais que le mot "[[viol]]" ne soit posé sur l'acte. Plus tard, fuyant l'université après que Mélanie porte sur lui l'accusation mineure de "[[harcèlement sexuel]]", Lurie part se faire oublier dans la ferme de sa fille Lucy au moment où celle-ci est cambriolée avec une violence spectaculaire. Séparé de sa fille et assommé pendant l'attaque, Lurie reste persuadé que sa fille a été violée par les cambrioleurs et s'offusque qu'elle ne porte plainte que pour "[[cambriolage]]" (un [[délit]]) et non pour "[[viol]]" (un [[crime]]), tandis qu'elle se défausse en lui rappelant que lui-même ne peut rien dire puisqu'il n'a rien vu. La grossesse non-désirée de Lucy, célibataire et lesbienne, confirme cependant les soupçons de son père. Le contraste des deux histoires atteint le niveau d'un paradoxe : les deux femmes sont victimes du même [[Agression sexuelle|crime sexuel]], mais à travers les yeux de Lurie, le viol de Mélanie, inférieure socialement de par son sexe, son âge et son statut (et peut-être noire de peau), perpétré par lui-même chez lui, un homme blanc puissant et respecté, est totalement invisible même quand il le montre ; au contraire, le viol de Lucy, blanche de peau et éduquée, par des hommes noirs et indigents qui ont pénétré par effraction chez elle armés jusqu'aux dents, lui saute aux yeux comme une évidence presque caricaturale sans même qu'il y ait assisté. L'histoire de Mélanie reste dans l'ombre (son prénom signifie "la Noire, l'Obscure") même en pleine lumière, tandis que celle de Lucy est transparente pour tout lecteur (son prénom signifie "Lumière") alors même que la narration la laisse hors-champ, dans l'obscurité. Mélanie Isaacs est la [[victime]] absolue, à la fois meurtrie et privée de toute reconnaissance du préjudice subi, comme l'est le personnage biblique dont elle porte le nom (dans la ''[[Livre de la Genèse|Genèse]]'', [[Abraham]] est récompensé par [[Yahweh|Yahvé]] d'avoir accepté de sacrifier son fils [[Isaac]], sans jamais que ce meurtre seulement évité par le miracle de l'intervention divine ne soit reconnu comme un crime à l'égard de l'enfant victime de tentative d'infanticide). L'usage du narrateur incertain interroge le lecteur sur sa propre capacité à voir et à nommer les choses et sur l'influence des [[Oppression|hiérarchies sociales]] (sexistes, racistes, classistes, etc.) qui rendent borgnes et indifférents les spectateurs comme les auteurs de crimes ordinaires.
*


== Adaptation au cinéma ==
== Adaptation au cinéma ==

Version du 12 octobre 2016 à 17:09

Disgrace

Disgrâce
Auteur John Maxwell Coetzee
Pays Drapeau d'Afrique du Sud Afrique du Sud
Genre Roman
Version originale
Langue Anglais
Titre Disgrace
Éditeur Secker & Warburg
Lieu de parution Royaume-Uni
Date de parution
ISBN 0-436-20489-4
Version française
Traducteur Catherine Lauga du Plessis
Éditeur Seuil
Collection Cadre vert
Date de parution
Nombre de pages 252
ISBN 2020387557

Disgrâce (titre original (en) Disgrace) est un roman de John Maxwell Coetzee, publié en anglais en 1999 et traduit en français en 2001. Disgrâce est un chef-d'œuvre de la littérature contemporaine qui a reçu le prestigieux prix Booker en 1999. Il fit beaucoup pour le prestige littéraire de J.M. Coetzee et l'obtention par ce dernier du prix Nobel de littérature en 2003.

Résumé

Disgrâce raconte l'histoire de David Lurie, professeur à l'université du Cap en Afrique du Sud, deux fois divorcé, qui a une aventure avec l'une de ses étudiantes, Mélanie Issacs. Cela vient à se savoir et David passe rapidement devant une commission disciplinaire. Sans même attendre le jugement, David décide de quitter tout ce qu'il a pour se réfugier chez sa fille, Lucy.

Cette dernière vit dans une exploitation agricole dans la campagne de Grahamstown avec son associé, Petrus. David participe à la vie de la ferme en s'occupant des chiens recueillis, en faisant les marchés… Il se trouve rapidement une occupation en travaillant avec Bev Shaw, une amie de Lucy qui soigne les animaux blessés et euthanasie les cas désespérés. Malheureusement, David et sa fille seront confrontés aux horreurs de la vie quotidienne dans l'Afrique du Sud contemporaine : viol, violence…

Analyse

Ce roman très sombre décrit avec une extrême froideur la société sud-africaine post-apartheid, dans laquelle aucune justice n'existe, laissant place à des horreurs en tout genre, sous le couvert d'un gouvernement impuissant. L'auteur utilise très peu de descriptions, il s'attache essentiellement aux personnages, à leurs relations, à leurs actions et à leurs états d'âme. Le roman est dans la tradition du bildungsroman ou roman d'apprentissage dans lequel le personnage principal évolue dans sa compréhension du monde environnant ou des autres personnages au fur et à mesure de la narration. C'est ici un homme mûr qui voit ses convictions s'ébranler et qui réalise son impuissance à agir sur le monde.

Disgrâce est le dernier roman de Coetzee avant son départ pour l'Australie.

Adaptation au cinéma