« Année liturgique du rite de l'Église de Jérusalem » : différence entre les versions

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== Le sanctoral ==
== Le sanctoral ==
On peut ici de dresser la liste, non pas de tous les saints (ce serait la tâche d’un index du lectionnaire géorgien, travail qui est par ailleurs en cours de réalisation), mais de toutes les dates du [[sanctoral]] qui sont pourvues de lectures, avec un lien à la page du jour de l’année. Dans certains cas, après avoir lu les textes, on peut constater des mots communs aux lectures. Il semble que, conformément à un principe herméneutique que [[Jacob Mann]] a mis en évidence dans les homélies juives palestiniennes de la période byzantine<ref>J. Mann, The Bible as read and preached in the old Synagogue, 1, 1940 (1971), {{p.|10}})</ref>.
Alors que le [[lectionnaire]] géorgien est dépourvu d'index de noms, une source importante pour l'étude du culte des [[saint]]s à [[Jérusalem]] à l'époque byzantine est le calendrier de [[Jean Zosime]], un copiste géorgien du {{Xe}} s., moine de [[Monastère Mar Saba|Mar-Saba]], qui avait utilisé un manuscrit du lectionnaire proche de ceux qui ont été conservés et dont l'édition par Garitte est accompagnée d'un riche commentaire. À côté des deux cycles de [[carême]] et de [[pentecôte]], où le sanctoral est réduit au minimum, presque chaque jour est consacré à la mémoire d'un ou plusieurs saints (près de 300 noms de saints ou groupes de saints, contre 24 dans le vieux lectionnaire arménien et aucun dans la description liturgique d'Égérie).

C'est à partir de l'[[invention de reliques|invention des reliques]] d'Étienne en 415 que se développe le culte des saints, sur les bases de la liturgie stationnale primitive qui, comme le montre la description d'Égérie, était organisée uniquement autour des lieux bibliques. [[Juvénal de Jérusalem|Juvénal]], et [[Eudoxie (épouse de Théodose II)|Eudocie]] qui lui est contemporaine, s'en sont faits les plus importants propagateurs : une vingtaine de sanctuaires nouveaux peuvent être plus ou moins bien datés entre 430 et 460. Mais le moteur de cette expansion est le culte des reliques, dont la grande majorité provient de l'étranger. On compte une cinquantaine de groupes de reliques explicitement mentionnés, répartis dans une trentaine de lieux. Or les saints dont les reliques proviennent de Jérusalem même sont peu nombreux : le prophète [[invention de reliques#Isaïe|Isaïe]], et le groupe « [[Lieux de station de la liturgie de Jérusalem#Paul|Zacharie]] (postexilique), [[Siméon]] et [[Jacques]] ». S'ajoutent, pour la région limitrophe de Jérusalem, [[invention de reliques|Étienne]] venant de Kfar Gimal, [[Lieux de station de la liturgie de Jérusalem#Village de Bethphagé ; Saint-Zacharie|Zacharie]] (préexilique) venant d'Éleuthéropolis, le groupe [[Jean le Baptiste|Jean-Baptiste]], [[Élisée]], [[Abdias]] venant de [[Samarie|Sébaste]], peut-être [[Joseph fils de Jacob|Joseph]] patriarche venant de [[Sichem]].

On peut ici de dresser la liste, non pas de tous les saints (ce serait la tâche d’un index du lectionnaire géorgien, travail qui est par ailleurs en cours de réalisation), mais de toutes les dates du [[sanctoral]] qui sont pourvues de lectures, avec un lien à la page du jour de l’année. Dans certains cas, après avoir lu les textes, on peut constater des mots communs aux lectures. Il semble que, conformément à un principe herméneutique que [[Jacob Mann]] a mis en évidence dans les homélies juives palestiniennes de la période byzantine<ref>J. Mann, The Bible as read and preached in the old Synagogue, 1, 1940 (1971), {{p.|10}})</ref>, une lecture ne pouvait être choisie que si elle possédait un mot commun avec la péricope principale, à savoir pour le lectionnaire chrétien l’Évangile. Le principe n’est pas toujours vérifié mais quand il l’est, on peut présumer que le choix de la lecture remonte à une source judéo-chrétienne.

Il reste à examiner les homélies conservées sur la péricope évangélique pour voir si, comme dans les homélies juives, le mot qui sert de point de contact entre les lectures est aussi le mot sur lequel l’homélie était normalement faite.


=== Liste des dates pourvues de lectures ===
=== Liste des dates pourvues de lectures ===

Version du 19 septembre 2022 à 15:14

L'année liturgique de l'Église de Jérusalem peut être envisagée sous deux aspects : l'un diachronique – exposer autant que possible l'origine d'une fête ou d'une tradition liturgique, ainsi que les principales étapes de leur évolution – et l'autre synchronique – rendre compte brièvement des rubriques relatives à cette fête ou cette tradition liturgique, principalement d'après le lectionnaire arménien et géorgien.

Début de l'année

La tradition homilétique géorgienne représentée par Jean de Bolnisi a conservé un cycle complet d'homélies pour les dimanches de carême selon les évangiles de la tradition de Jérusalem, y compris le huitième dimanche avant Pâques selon l'ancienne lecture (Lc 7, 36-50). Il existerait également un cycle complet d'homélies pour le carême de l'évêque arabe Théodore Abu Qurra, mais elles sont inédites et on ignore si elles comprennent sept ou huit semaines (cet auteur étant proche de Jean Damascène, il serait logique qu'elles ne comprennent que sept semaines)[1].

La Grande Semaine

L'originalité de cette semaine est l'office de lectures dans le Martyrium, qui a lieu, au temps d'Égérie, à la 9e heure. Il montre la compréhension de la Passion du Christ que l'on se faisait à Jérusalem, sur les lieux mêmes où elle se déroula.
Le manuscrit Stavrou 43 de la bibliothèque du Patriarcat grec orthodoxe de Jérusalem est la principale source qu'il faut ajouter à Égérie et aux deux lectionnaires pour l'étude de cette semaine[2].

La vigile du vendredi de la Grande Semaine

On entre ici dans la chronologie synoptique, où la nuit du jeudi au vendredi saint concentre plusieurs épisodes : la proskynèse de Jésus (sa prière dans le Jardin des Oliviers), son arrestation, et, le matin, le procès devant Pilate suivi de la flagellation. Bien qu’Égérie n’y fasse pas allusion, les évangiles situent entre l’arrestation et le procès, un épisode de Jésus devant le grand-prêtre (et le « sanhédrin tout entier » dans les synoptiques, avec un déplacement de lieu indiqué par Lc et Jn), le soir juste après l'arrestation chez Mt. et Mc (et Jn), le matin chez Lc, suivi (ou précédé chez Lc) de l'épisode racontant les reniements de Pierre. C'est aussi là, chez le grand-prêtre, que Jésus passe la nuit. Sebastià Janeras, après Charles Renoux, a longuement analysé les sources concernant la procession au cours de laquelle ces évangiles étaient lus[3].

Pentecôte

De Pâques à Pentecôte

Pour l'eucharistie quotidienne de ce cycle, le système de lecture ancien privilégiait la lectio continua de trois livres bibliques[4].

Les trois processions de Pentecôte

Un jeu sur les chiffres a une fonction symbolique. On en trouve d'autres ailleurs dans la liturgie[5].

Deux autres fêtes majeures

Fête de l'Église : La Dédicace (Encénies) et son octave

En d'autres termes, on a procédé à la dédicace de l'Anastasis et du Martyrium à cette date du mois de septembre dans le but de déplacer la fête plus ancienne, judéo-chrétienne, du mois de décembre[6].

  1. La fête de la Dédicace ou Encénies ()
    « La sainte église qui se trouve à l’Anastasis, à l’endroit où le Seigneur est ressuscité après sa passion, a été consacrée à Dieu le même jour (que le Martyrium la veille) (…) la croix du Seigneur a été découverte ce jour-là. » (Égérie, 48, §1) La pèlerine précise que la station se fait, ces deux jours, au Martyrium. D’après le lectionnaire, un peu plus tard, la station du premier jour se fait à l’Anastasis (« dédicace des saints lieux de Jérusalem ») et la seconde seulement au Martyrium (le jour où « l'on montre la vénérable croix à toute l’assemblée »). Une évolution comparable existe dans l’octave de Pâques et de l’Épiphanie : alors qu’Égérie prévoit le même lieu de station pour les deux premiers jours de la fête, le lieu n’est plus le même ultérieurement.
    Cette évolution au tournant du Ves. est significative de l'importance que commence à prendre le culte de la Croix.
    La dédicace de l'église aurait eu lieu en fait non pas un 13 mais un (d’après la Chronique pascale, PG 92, col. 713). Les ides de septembre (et de novembre), le 13, sont la date de l'epulum Jovis in Capitolio, qui pouvait passer (selon une idée de Baumstark) pour la dédicace du temple de Jupiter capitolin à Rome. La même date devait donc être fêtée aussi à Jérusalem pour le sanctuaire de Jupiter qui avait été construit sur le Tombeau vide (Jérôme, Lettre, 58, §3), et dont le nom de la cité bâtie par Hadrien, Aelia capitolina, rappelle la consécration à Jupiter capitolin. On peut attribuer à Constantin le choix du changement de la date de la dédicace[7]

Le sanctoral

On peut ici de dresser la liste, non pas de tous les saints (ce serait la tâche d’un index du lectionnaire géorgien, travail qui est par ailleurs en cours de réalisation), mais de toutes les dates du sanctoral qui sont pourvues de lectures, avec un lien à la page du jour de l’année. Dans certains cas, après avoir lu les textes, on peut constater des mots communs aux lectures. Il semble que, conformément à un principe herméneutique que Jacob Mann a mis en évidence dans les homélies juives palestiniennes de la période byzantine[8].

Liste des dates pourvues de lectures

1er janvier 1er février 9 mars 18 avril 1er mai 3 juin 2 juillet 1er août 1er septembre 2 octobre 1er novembre 4 décembre
2 janvier 6 février 18 mars 19 avril 2 mai 4 juin 3 juillet 6 août 2 septembre 5 octobre 5 novembre 10 décembre
3 janvier 15 février 30 avril 5 mai 10 juin 15 juillet 13 août 3 septembre 8 octobre 9 novembre 20 décembre
4 janvier 18 février 7 mai 12 juin 18 juillet 15 août 4 septembre 9 octobre 10 novembre 21 décembre
11 janvier 8 mai 16 juin 26 juillet 20 août 8 septembre 12 octobre 14 novembre 23 décembre
17 janvier 9 mai 17 juin 27 juillet 21 août 11 septembre 13 octobre 15 novembre 26 décembre
18 janvier 17 mai 21 juin 30 juillet 22 août 13 septembre 15 octobre 20 novembre 27 décembre
19 janvier 22 mai 22 juin 24 août 14 septembre 17 octobre 21 novembre 28 décembre
22 janvier 25 mai 24 juin 25 août 15 septembre 18 octobre 23 novembre 29 décembre
27 janvier 26 mai 29 août 16 septembre 19 octobre 26 novembre 30 décembre
28 janvier 31 mai 30 août 17 septembre 20 octobre 27 novembre 31 décembre
29 janvier 18 septembre 23 octobre
31 janvier 19 septembre 24 octobre
20 septembre 27 octobre
26 septembre 29 octobre
27 septembre
29 septembre

À comparer sur Wikipédia anglais, une page recensant tous les saints provenant de Terre Sainte (en) ; à voir également et Liste de saints catholiques.

Note sur la répartition de la lecture des Évangiles

L'exemple d'Origène, qui à Césarée prêchait chaque matin à l'intention des candidats au baptême sur le texte de l'Écriture suivant celui qui avait été commenté la veille, suggère que, à Jérusalem également, à une époque relativement ancienne, un « didascale » comme Hésychius, commentait chaque jour, le matin, un texte de l'Écriture. De cet usage découle le principe que l'on voit à l'œuvre dans le lectionnaire : quand, pour la messe, un livre de la Bible est lu pendant une certaine période, comme l'Évangile de Jean durant le temps de Pâques par exemple, les péricopes se suivent dans l'ordre des chapitres de ce livre, même s'il y a souvent des passages omis. C'est le principe de ce qu'on appelle la lectio continua (ou Bahnlesung). On peut l'observer en particulier pour la lecture des Évangiles.

Ainsi, comme dans le rite byzantin actuel, le lectionnaire de Jérusalem conservé (respectivement no 742 et suivants, no 1693-1696, no 1427A, et no 1427B) montre qu'on lisait l'Évangile de Jean (Jn) pendant sept semaines après Pâques (y compris certains jours autres que les dimanches), l'Évangile de Matthieu (Mt.) pendant à peu près quinze dimanches après la Pentecôte (selon la date de Pâques), ensuite, mais là Jérusalem s'oppose à Byzance qui inverse les deux derniers, l'Évangile de Marc (Mc) pendant quatorze (ou quinze) dimanches après la fête de la Croix le et l'Évangile de Luc (Lc) pendant treize à dix-sept dimanches (selon la date du début du carême) après l'Épiphanie (y compris certains samedis pendant le temps de carême).

Cette répartition des Évangiles revient à diviser l'année en trois parties d'à peu près quinze semaines et une partie de sept semaines. En creusant un peu plus, on constate qu'il existe une célébration des Apôtres le septième dimanche après la Pentecôte (dimanche dit « d'Athénogène » dans la tradition géorgienne, de « Vardavar » dans la tradition arménienne). On connaît par ailleurs, dans la tradition liturgique syrienne orientale (ou assyrienne ou chaldéenne), une division de l'année liturgique en sept périodes de sept semaines, avec trois ou quatre semaines intercalaires[9]. Certains détails comme la fête du septième dimanche après la Pentecôte se retrouvent en Palestine byzantine et pointent vers une origine commune du cycle, qui pourrait avoir été l'Église judéo-chrétienne à la source des autres traces d'influence juive que nous avons notées (structure du carême, Encénies, 15 août, 25 décembre et son octave, etc.). En effet la division de l'année en périodes de cinquante jours se retrouve en partie dans le calendrier essénien, qui connaît une fête de type agricole le cinquantième jour après Pentecôte (shavou'ôt) et une autre cinquante jours plus tard, avec des offrandes successives du blé nouveau, du vin nouveau et de l'huile nouvelle (sans oublier à Pâques l'offrande de l'orge nouveau)[10]. Or c'est dans la tradition juive que le principe de la lectio continua (de la Torah en l'occurrence) est respecté de la manière la plus rigoureuse (encore dans la pratique juive actuelle). Le principe aurait donc été transposé aux Évangiles dans une communauté judéo-chrétienne (au IIIe s., date du diakonikon de la Sainte-Sion ?), sans doute d'abord, comme le suggère Origène à Césarée, pour la catéchèse matinale.

Sources

  • P. Maraval, Égérie. Journal de voyage (Itinéraire) – Valère du Bierzo. Lettre à la louange de la très bienheureuse Égérie (par M. C. Diaz y Diaz), (Sources chrétiennes, 296), Paris, 1982 (réimpr. 1997)
  • A. [C.] Renoux, [Le codex arménien Jérusalem 121, t. II]. Édition comparée du texte et de deux autres manuscripts, introduction, textes, traduction et notes, Patrologia Orientalis, 36 (1971), 141-390
  • M. Tarchnišvili, Le grand lectionnaire de l'Église de Jérusalem (VeVIIIe siècle), t.I (CSCO vol. 188, Scriptores iberici t. 9, texte ; vol. 189, Scriptores iberici t.10, version) & t.II, (CSCO vol. 204, Scriptores iberici t.13 texte ; vol. 205, Scriptores iberici t. 14, version), Louvain, 1959 & 1960
  • G. Garitte, Le calendrier palestino-géorgien du sinaiticus 34 (Xe siècle), (Subsidia hagiographica, 30), Bruxelles, 1958

Notes

  1. Les remarques de cette section sont discutées en détail dans deux publications de Stéphane Verhelst : Histoire ancienne de la durée du carême à Jérusalem, Questions liturgiques, 84 (2003), 23-50 ; et l'introduction à l'ouvrage cité note précédente.
  2. A. Papadopoulos-Kerameus, Analekta Hierosolumitikês Stachuologias, II, Saint-Pétersbourg, 1894, p. 1-254; voir le tableau comparatif (avec Égérie et le lectionnaire) de R. Zerfaß, Die Schriftlesung im Kathedraloffizium Jerusalems (LQF 48), Münster, 1968, p. 75-95.
  3. S. Janeras, Le Vendredi-Saint dans la tradition liturgique byzantine. Structure et histoire de ses offices (Studia anselmiana, 99), Rome, 1988, p. 51-95, en distinguant l’ordo sabaïte (p. 95-109).
  4. Selon une observation déjà faite par A. Baumstark, Die Sonntägliche Evangelienlesung im Vorbyzantinischen Jerusalem, Byz. Zeitschrift, 30 (1929-30), 350-359
  5. S. Verhelst, La place des prophètes dans le sanctoral de Jérusalem, Questions liturgiques, 84 (2003), 182-203, p. 203.
  6. Détails de cette question dans le livre de S. Verhelst, Les traditions judéo-chrétiennes dans la liturgie de Jérusalem, spécialement la Liturgie de saint Jacques frère de Dieu (Textes et études liturgiques. Studies in Liturgy, 18), Louvain (Leuven), 2003, p. 172-174.
  7. Selon un argument développé en même temps mais séparément (?) par E.D. HUNT, Constantine and Jerusalem, Jour. Eccl. Hist. 48 (1997), 405-423, p. 420-421 et M.F. FRASER, Constantine and the Encaenia, Studia Patristica, 29 (1997), 25-28
  8. J. Mann, The Bible as read and preached in the old Synagogue, 1, 1940 (1971), p. 10)
  9. Éléments dans J. Mateos, Lelya-Sapra. Les offices chaldéens de la nuit et du matin (OCA 156), 1re éd. 1959, Rome, 1972, p. 14-16.
  10. Y. Yadin, The Temple Scroll, I, Jérusalem, 1983, p. 99-124.