« Eleonora Duse » : différence entre les versions

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'''Eleonora Duse''' est une [[comédienne]] [[italie]]nne née le {{Date|3|octobre|1858|au théâtre}} à [[Vigevano]] et morte le {{Date|21|avril|1924|au théâtre}} à [[Pittsburgh]]. Elle est considérée comme l'une des plus grandes comédiennes de son temps. Rivale de [[Sarah Bernhardt]], elle lui voua cependant une admiration profonde.
'''Eleonora Duse''' est une [[comédienne]] [[italie]]nne née le {{Date|3|octobre|1858|au théâtre}} à [[Vigevano]] et morte le {{Date|21|avril|1924|au théâtre}} à [[Pittsburgh]]. Elle est considérée comme l'une des plus grandes comédiennes de son temps. Rivale de [[Sarah Bernhardt]], elle lui voua cependant une admiration profonde.


== Biographie ==
== Biographie ==


Née dans une famille de comédiens de [[Chioggia]], Eleonora Duse passe son enfance dans la troupe amateur itinérante de ses parents, Alessandro Vincenzo Duse et Angelica Cappelletto. La famille Duse est apparentée à une autre famille de comédiens ambulants, les Vitaliani dont la fille {{Lien|langue=it|fr=Italia Vitaliani|texte=Italia}} est la cousine d'Eleonora. Dès l'âge de quatre ans, elle joue, en [[1862 au théâtre|1862]], le rôle de [[Cosette]] dans une version théâtrale des [[Les Misérables|''Misérables'']]. En [[1878 au théâtre|1878]], elle tient les rôles de [[Emploi (théâtre)#Jeune premier et jeune première|« première amoureuse »]] dans la [[compagnie théâtrale|compagnie]] Ciotti-Belli Blanes et, à tout juste vingt ans, est à la tête d'une compagnie aux côtés de {{Lien|langue=it|fr=Giacinta Pezzana}}. Elle connaît son premier succès en [[1879 au théâtre|1879]] dans le rôle de [[Thérèse Raquin]], dans la [[pièce de théâtre]] du même titre adaptée de son roman par [[Émile Zola]] en [[1873 au théâtre|1873]], qui lui vaut l'adoration du public et la reconnaissance de la [[critique dramatique|critique]].
Née dans une famille de comédiens de [[Chioggia]], Eleonora Duse passe son enfance dans la troupe amateur itinérante de ses parents, Alessandro Vincenzo Duse et Angelica Cappelletto. La famille Duse est apparentée à une autre famille de comédiens ambulants, les Vitaliani dont la fille {{Lien|langue=it|fr=Italia Vitaliani|texte=Italia}} est la cousine d'Eleonora. Dès l'âge de quatre ans, elle joue, en [[1862 au théâtre|1862]], le rôle de [[Cosette]] dans une version théâtrale des [[Les Misérables|''Misérables'']]. En [[1878 au théâtre|1878]], elle tient les rôles de [[Emploi (théâtre)#Jeune premier et jeune première|« première amoureuse »]] dans la [[compagnie théâtrale|compagnie]] Ciotti-Belli Blanes et, à tout juste vingt ans, est à la tête d'une compagnie aux côtés de {{Lien|langue=it|fr=Giacinta Pezzana}}. Elle connaît son premier succès en [[1879 au théâtre|1879]] dans le rôle de [[Thérèse Raquin]], dans la [[pièce de théâtre]] éponyme adaptée de son roman par [[Émile Zola]] en [[1873 au théâtre|1873]], qui lui vaut l'adoration du public et la reconnaissance de la [[critique dramatique|critique]].


En 1879, elle entre dans la troupe semi-permanente de [[Turin]] de Cesare Rossi où elle portera à maturation son choix esthétique, recueillant l'héritage du passé mais rompant en même temps avec la tradition du « grand acteur » de la première moitié du {{XIXe siècle}}. C'est au cours de cette période, dans les années 1880, que la Duse accomplit les choix de répertoire qui marqueront son parcours artistique et sa carrière théâtrale. Un répertoire qui lui permet d'exprimer son sentiment de crise face à son époque. Étant donné l'absence significative de [[dramaturgie (théâtre)|dramaturgie]] en Italie (de {{Lien|langue=it|fr=Paolo Giacometti}}, [[Giuseppe Giacosa]], {{Lien|langue=it|fr=Achille Torelli}}, [[Emilio Praga]] ne subsiste au mieux qu'un texte de chacun) elle privilégie les {{citation|pièces bien faites}} françaises : modernes, mondaines, adaptées à l'évolution des goûts du public de cette fin du {{s-|XIX|e}}, aux mécanismes parfaitement huilés pour coller aux valeurs bourgeoises. Mais entre les mains de la Duse, les [[Drame (théâtre)|drames]] de [[Victorien Sardou]] et d'[[Alexandre Dumas fils]] deviennent des pièces à démonter et à remplir ensuite d'une vie nouvelle, du message infiniment personnel de la Duse qui veut représenter les valeurs de cette classe telle qu'elle se présente dans la réalité qui l'entoure et non pas les approuver sans réserve. Ses thèmes de prédilection, les plus difficiles à affronter, sont les plus représentatifs de la société bourgeoise de l'époque : l'argent, le sexe, la famille, le mariage, le rôle de la femme. Il en ressort le portrait d'une société respectable mais en réalité hypocrite, brillante en apparence mais dépravée en substance, obnubilée par un dieu de l'argent régulateur de toute relation humaine, un monde dans lequel il est impossible d'éprouver des émotions sincères. Mais en émerge également l'intériorité féminine de la Duse : une intériorité brisée, aliénée, névrosée. Son répertoire est moderne et attractif : du [[vérisme]] de la ''[[Cavalleria rusticana]]'' de Giovanni Verga aux drames de Victorien Sardou et d'Alexandre Dumas fils qui sont également ceux du répertoire de [[Sarah Bernhardt]]. Entre les deux comédiennes nait rapidement une rivalité qui divise les critiques.
En 1879, elle entre dans la troupe semi-permanente de [[Turin]] de Cesare Rossi où elle portera à maturation son choix esthétique, recueillant l'héritage du passé mais rompant en même temps avec la tradition du « grand acteur » de la première moitié du {{XIXe siècle}}. C'est au cours de cette période, dans les années 1880, que la Duse accomplit les choix de répertoire qui marqueront son parcours artistique et sa carrière théâtrale. Un répertoire qui lui permet d'exprimer son sentiment de crise face à son époque. Étant donné l'absence significative de [[dramaturgie (théâtre)|dramaturgie]] en Italie (de [[Paolo Giacometti]], [[Giuseppe Giacosa]], {{Lien|langue=it|fr=Achille Torelli}}, [[Emilio Praga]] ne subsiste au mieux qu'un texte de chacun) elle privilégie les {{citation|pièces bien faites}} françaises : modernes, mondaines, adaptées à l'évolution des goûts du public de cette fin du {{s-|XIX|e}}, aux mécanismes parfaitement huilés pour coller aux valeurs bourgeoises. Mais entre les mains de la Duse, les [[Drame (théâtre)|drames]] de [[Victorien Sardou]] et d'[[Alexandre Dumas fils]] deviennent des pièces à démonter et à remplir ensuite d'une vie nouvelle, du message infiniment personnel de la Duse qui veut représenter les valeurs de cette classe telle qu'elle se présente dans la réalité qui l'entoure et non pas les approuver sans réserve. Ses thèmes de prédilection, les plus difficiles à affronter, sont les plus représentatifs de la société bourgeoise de l'époque : l'argent, le sexe, la famille, le mariage, le rôle de la femme. Il en ressort le portrait d'une société respectable mais en réalité hypocrite, brillante en apparence mais dépravée en substance, obnubilée par un dieu de l'argent régulateur de toute relation humaine, un monde dans lequel il est impossible d'éprouver des émotions sincères. Mais en émerge également l'intériorité féminine de la Duse : une intériorité brisée, aliénée, névrosée. Son répertoire est moderne et attractif : du [[vérisme]] de la ''[[Cavalleria rusticana]]'' de [[Giovanni Verga]] aux drames de Victorien Sardou et d'Alexandre Dumas fils qui sont également ceux du répertoire de [[Sarah Bernhardt]]. Entre les deux comédiennes nait rapidement une rivalité qui divise les critiques.


En [[1881 au théâtre|1881]], Eleonora Duse épouse Tebaldo Checchi, un acteur de sa compagnie. L'union, de laquelle naît une fille, Henriette, se révèle rapidement malheureuse et se termine par une séparation définitive. En [[1884 au théâtre|1884]], la Duse se lie avec [[Arrigo Boito]] qui traduit pour elle l'''[[Antoine et Cléopâtre]]'' de [[Shakespeare]]. La relation, restée secrète, dure plusieurs années entre hauts et bas. Les rencontres ont lieu à [[Ivrée]], dans le château de San Jose, demeure d'un ami commun, Giuseppe Bianchi. Pendant cette période, la comédienne fréquente le milieu de la ''[[scapigliatura]]'', et son répertoire s'enrichit des drames de Giuseppe Giacosa, ami de Boito. Elle entretiendra par la suite une liaison avec la jeune rebelle féministe [[Lina Poletti]], qui dura deux ans. Son amitié avec [[Isadora Duncan]] qu'elle rencontre lors de tournées européennes est très commentée. Néanmoins il ne fut jamais prouvé qu'elles furent engagées dans une relation amoureuse. En [[1886 au théâtre|1886]], elle fonde sa propre compagnie. Elle porte sur les scènes italiennes les drames d'[[Henrik Ibsen]], dont elle interprète ''[[Une maison de poupée]]'', ''[[Hedda Gabler]]'', ''[[La Dame de la mer]]'' et ''[[Rosmersholm]]'' À partir de [[1890 au théâtre|1890]], elle joue principalement hors d'[[Italie]], notamment à [[Paris]], où elle connaît la consécration en [[1897 au théâtre|1897]]. ''Rosmersholm'' d'Ibsen est notamment repris au [[Théâtre de l'Œuvre]] en [[1898 au théâtre|1898]] dans la mise en scène de [[Lugné-Poe]] puis dans les décors mémorables d'[[Edward Gordon Craig]] en [[1906 au théâtre|1906]].
En [[1881 au théâtre|1881]], Eleonora Duse épouse Tebaldo Checchi, un acteur de sa compagnie. L'union, de laquelle naît une fille, Henriette, se révèle rapidement malheureuse et se termine par une séparation définitive. En [[1884 au théâtre|1884]], la Duse se lie avec [[Arrigo Boito]] qui traduit pour elle l'''[[Antoine et Cléopâtre]]'' de [[Shakespeare]]. La relation, restée secrète, dure plusieurs années entre hauts et bas. Les rencontres ont lieu à [[Ivrée]], dans le château de San Jose, demeure d'un ami commun, Giuseppe Bianchi. Pendant cette période, la comédienne fréquente le milieu de la ''[[scapigliatura]]'', et son répertoire s'enrichit des drames de Giuseppe Giacosa, ami de Boito. Son amitié avec [[Isadora Duncan]] qu'elle rencontre lors de tournées européennes est très commentée. Néanmoins il ne fut jamais prouvé qu'elles furent engagées dans une relation amoureuse. En [[1886 au théâtre|1886]], elle fonde sa propre compagnie. Elle porte sur les scènes italiennes les drames d'[[Henrik Ibsen]], dont elle interprète ''[[Une maison de poupée]]'', ''[[Hedda Gabler]]'', ''[[La Dame de la mer]]'' et ''[[Rosmersholm]]'' À partir de [[1890 au théâtre|1890]], elle joue principalement hors d'[[Italie]], notamment à [[Paris]], où elle connaît la consécration en [[1897 au théâtre|1897]]. ''Rosmersholm'' d'Ibsen est notamment repris au [[Théâtre de l'Œuvre]] en [[1898 au théâtre|1898]] dans la mise en scène de [[Lugné-Poe]] puis dans les décors mémorables d'[[Edward Gordon Craig]] en [[1906 au théâtre|1906]].


Jusqu'en [[1904 au théâtre|1904]], elle est la maîtresse et l'interprète du poète [[Gabriele D'Annunzio]]. Elle quitte le théâtre en [[1908 au théâtre|1908]] et joue en [[1916 au cinéma|1916]] pour la seule fois au cinéma, dans ''[[Cenere (film)|Cenere]]'' d'[[Arturo Ambrosio]], film tiré du roman homonyme de [[Grazia Deledda]]. Elle revient au théâtre de [[1921 au théâtre|1921]] à [[1923 au théâtre|1923]]. Elle meurt, au cours d'une ultime tournée américaine, à [[Pittsburgh]], le {{date|21|avril|1924|au théâtre}}. Elle est enterrée au cimetière d'[[Asolo]] conformément à sa volonté.
Jusqu'en [[1904 au théâtre|1904]], elle est la maîtresse et l'interprète du poète [[Gabriele D'Annunzio]]. Elle quitte le théâtre en [[1908 au théâtre|1908]] et joue en [[1916 au cinéma|1916]] pour la seule fois au cinéma, dans ''[[Cenere (film)|Cenere]]'' d'[[Arturo Ambrosio]], film tiré du roman homonyme de [[Grazia Deledda]]. Elle entretient une liaison avec la jeune rebelle féministe [[Lina Poletti]], de 1909 à 1911.
Elle revient au théâtre de [[1921 au théâtre|1921]] à [[1923 au théâtre|1923]]. Elle meurt d'une [[Pneumonie aiguë|pneumonie]]<ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=Eleonora Duse |url=https://www.theflorentine.net/2011/03/24/eleonora-duse/ |site=The Florentine |date=2011-03-23 |consulté le=2021-08-13}}</ref>, au cours d'une ultime tournée américaine, à [[Pittsburgh]], le {{date|21|avril|1924|au théâtre}}. Elle est enterrée au cimetière d'[[Asolo]] conformément à sa volonté.


== La rencontre avec D'Annunzio ==
== La rencontre avec D'Annunzio ==
[[Fichier:Gabriele D'Annunzio.jpg|vignette|[[Gabriele D'Annunzio]]]]
[[File:Gabriele D'Annunzio (before 1938) - Archivio Storico Ricordi FOTO001172 (crop).jpg|vignette|[[Gabriele D'Annunzio]].]]


En [[1882 au théâtre|1882]] à [[Rome]], Eleonora Duse rencontre pour la première fois [[Gabriele D'Annunzio]]. C'est un jeune homme séduisant, arrivé depuis peu des [[Abruzzes]] mais avec déjà trois œuvres publiées. Il se présente à la Duse et, avec des paroles mélodieuses, lui propose sans autre préambule de coucher avec lui. Eleonora le congédie avec indignation mais, peut-être, avec aussi une secrète satisfaction. Ce jour-là, elle le décrit ainsi : {{Citation étrangère|lang=it|Già famoso e molto attraente, con i capelli biondi e qualcosa di ardente nella sua persona}}<ref>« Déjà célèbre et très séduisant, les cheveux blonds et quelque chose d'ardent dans sa personne »</ref>{{,}}<ref>[[Denis Mack Smith]], ''L' Italia del XX secolo'', vol. I (1899-1908) tome I, p. 48, ''edizioni Rizzoli'', 1977</ref>. En [[1888 au théâtre|1888]], Eleonora qui, sur la scène du [[teatro Valle]], vient tout juste de se repentir de ses plaisirs de dévoyée, de prendre en pleine face une poignée de fausse monnaie et est morte de phtisie et d'amour dans le rôle de la malheureuse [[La Dame aux camélias|''Dame aux camélias'']], se dirige encore pleine de soupirs et de sanglots vers sa loge. C'est alors qu'un frêle et élégant jeune homme surgit de la pénombre du corridor et lui crie, avec enthousiasme et assurance : {{Citation étrangère|lang=it|O grande amatrice!}}<ref>« Ô, grande séductrice ! »</ref>. Eleonora un peu épouvantée, le dévisage un moment et poursuit son chemin. C'était encore D'Annunzio<ref>Denis Mack Smith, {{opcit}} pp. 48/49</ref>. Juin [[1892 au théâtre|1892]] est la date que D'Annunzio inscrit, avec la dédicace {{Citation étrangère|lang=it|Alla divina Eleonora Duse}} sur un exemplaire de ses ''[[Elegie romane]]''. De ces livres, naît en Eleonora le désir d'une rencontre avec l'auteur. Et, lors de la rencontre, {{Citation étrangère|lang=en|si abbandona alla presa di quegli occhi chiari, si sorprende a dimenticare tutta la sua amara sapienza della vita e a godere della lusinga che essi esprimono}}<ref>« Elle s'abandonne à l'emprise de ces yeux clairs, se surprend à oublier toute l'amère expérience de sa vie et à jouir de la flatterie exprimée par ce regard »</ref>{{,}}<ref>Denis Mack Smith, {{opcit}} p. 49</ref>.
En [[1882 au théâtre|1882]] à [[Rome]], Eleonora Duse rencontre pour la première fois [[Gabriele D'Annunzio]]. C'est un jeune homme séduisant, arrivé depuis peu des [[Abruzzes]] mais avec déjà trois œuvres publiées. Il se présente à la Duse et, avec des paroles mélodieuses, lui propose sans autre préambule de coucher avec lui. Eleonora le congédie avec indignation mais, peut-être, avec aussi une secrète satisfaction. Ce jour-là, elle le décrit ainsi : {{Citation étrangère|lang=it|Già famoso e molto attraente, con i capelli biondi e qualcosa di ardente nella sua persona}}<ref>« Déjà célèbre et très séduisant, les cheveux blonds et quelque chose d'ardent dans sa personne »</ref>{{,}}<ref>[[Denis Mack Smith]], ''L' Italia del XX secolo'', vol. I (1899-1908) tome I, p. 48, ''edizioni Rizzoli'', 1977</ref>. En [[1888 au théâtre|1888]], Eleonora qui, sur la scène du [[teatro Valle]], vient tout juste de se repentir de ses plaisirs de dévoyée, de prendre en pleine face une poignée de fausse monnaie et est morte de phtisie et d'amour dans le rôle de la malheureuse [[La Dame aux camélias|''Dame aux camélias'']], se dirige encore pleine de soupirs et de sanglots vers sa loge. C'est alors qu'un frêle et élégant jeune homme surgit de la pénombre du corridor et lui crie, avec enthousiasme et assurance : {{Citation étrangère|lang=it|O grande amatrice!}}<ref>« Ô, grande séductrice ! »</ref>. Eleonora un peu épouvantée, le dévisage un moment et poursuit son chemin. C'était encore D'Annunzio<ref>Denis Mack Smith, {{opcit}} pp. 48/49</ref>. Juin [[1892 au théâtre|1892]] est la date que D'Annunzio inscrit, avec la dédicace {{Citation étrangère|lang=it|Alla divina Eleonora Duse}} sur un exemplaire de ses ''[[Elegie romane]]''. De ces livres, naît en Eleonora le désir d'une rencontre avec l'auteur. Et, lors de la rencontre, {{Citation étrangère|lang=en|si abbandona alla presa di quegli occhi chiari, si sorprende a dimenticare tutta la sua amara sapienza della vita e a godere della lusinga che essi esprimono}}<ref>« Elle s'abandonne à l'emprise de ces yeux clairs, se surprend à oublier toute l'amère expérience de sa vie et à jouir de la flatterie exprimée par ce regard »</ref>{{,}}<ref>Denis Mack Smith, {{opcit}} p. 49</ref>.


Le tournant décisif de la vie et la carrière artistique d'Eleonora Duse fut la rencontre définitive à [[Venise]], en 1884, avec Gabriele D'Annunzio, alors à peine trentenaire. Le lien sentimental et artistique tempétueux qui s'établit entre la comédienne et le jeune poète dura une dizaine d'années et contribua de manière déterminante à asseoir la réputation de D'Annunzio. Eleonora Duse, déjà célèbre et acclamée en [[Europe]] et outre-atlantique, porta sur toutes les scènes les drames dannunziens (''Il sogno di un mattino di primavera'', ''La Gioconda'', ''Francesca da Rimini'', ''La città morta'', ''La figlia di Iorio''), finançant souvent elle-même les productions et leur assurant le succès et l'attention de la critique y compris hors d'Italie. Cependant, en [[1896 au théâtre|1896]], D'Annunzio lui préféra [[Sarah Bernhardt]] pour la première française de ''La ville morte''. Les périodes de proximité et de collaboration entre les deux artistes alterneront avec les crises et les ruptures. D'Annunzio suivait rarement l'actrice dans ses tournées mais, en [[1898 au théâtre|1898]], il loua la villa de la ''Capponcina'' à [[Florence]], dans la ''[[frazione]]'' de [[Settignano]], pour se rapprocher de la ''Porziuncola'', la demeure d'Eleonora. En [[1900 au théâtre|1900]], D'Annunzio publia son roman ''[[Il fuoco]]'', inspiré de sa relation avec Eleonora Duse, suscitant de vives critiques de la part des admirateurs de la comédienne.
Le tournant décisif de la vie et la carrière artistique d'Eleonora Duse fut la rencontre définitive à [[Venise]], en 1894, avec Gabriele D'Annunzio, alors à peine trentenaire. Le lien sentimental et artistique tempétueux qui s'établit entre la comédienne et le jeune poète dura une dizaine d'années et contribua de manière déterminante à asseoir la réputation de D'Annunzio. Eleonora Duse, déjà célèbre et acclamée en [[Europe]] et outre-atlantique, porta sur toutes les scènes les drames dannunziens (''Il sogno di un mattino di primavera'', ''La Gioconda'', ''Francesca da Rimini'', ''La città morta'', ''La figlia di Iorio''), finançant souvent elle-même les productions et leur assurant le succès et l'attention de la critique y compris hors d'Italie. Cependant, en [[1896 au théâtre|1896]], D'Annunzio lui préféra [[Sarah Bernhardt]] pour la première française de ''La ville morte''. Les périodes de proximité et de collaboration entre les deux artistes alterneront avec les crises et les ruptures. D'Annunzio suivait rarement l'actrice dans ses tournées mais, en [[1898 au théâtre|1898]], il loua la villa de la ''Capponcina'' à [[Florence]], dans la ''[[frazione]]'' de [[Settignano]], pour se rapprocher de la ''Porziuncola'', la demeure d'Eleonora. En [[1900 au théâtre|1900]], D'Annunzio publia son roman ''[[Il fuoco]]'', inspiré de sa relation avec Eleonora Duse, suscitant de vives critiques de la part des admirateurs de la comédienne.


== Postérité ==
== Postérité ==
Après sa mort, de [[Teatro Duse|nombreux théâtres]] sont baptisés de son nom, tout comme des écoles et autres toponymes de villes italiennes. Le [[Teatro Duse (Bologne)|Teatro Duse]] de [[Bologne]] fait exception puisqu'il est renommé en son honneur de son vivant, en 1898, à l'occasion d'un changement de propriétaire.
Après sa mort, de [[Teatro Duse|nombreux théâtres]] sont baptisés de son nom, tout comme des écoles et autres toponymes de villes italiennes. Elle fut une amie d'[[Axel Munthe]]<ref>{{en}} [http://www.keats-shelley-house.org/en/writers/writers-axel-munthe Une courte biographie d'Axel Munthe sur le site keats-shelley-house.org]</ref> qui l'évoque dans ''[[Le Livre de San Michele]]'' ([[1929 en littérature|1929]]) dont est tiré en [[1962 au cinéma|1962]] un [[Le Livre de San Michele (film)|film]] du même titre réalisé par [[Giorgio Capitani]] et [[Rudolf Jugert]] et dans lequel son rôle est interprété par [[Valentina Cortese]]. En [[1953 au cinéma|1953]], [[Luigi Comencini]] lui a consacré un film biographique, ''{{Lien|langue=it|fr=La Valigia dei sogni}}''. Ses costumes de scène, restaurés par le [[styliste]] italien [[Fausto Sarli]] sont exposés dans les musées du monde entier. Son nom inspira celui d'Éléonoradus, metteur en scène au théâtre romain de [[Rennes|Condate]] dans ''[[Astérix et le chaudron]]'' (1968). Un [[Cratère d'impact|cratère]] de {{unité|30|km}} de diamètre sur la planète [[Vénus (planète)|Vénus]] lui est dédié en 1974<ref>{{en}} [http://planetarynames.wr.usgs.gov/Feature/1674?__fsk=2110729923 Le cratère Duse sur Vénus]</ref>.

Elle fut une amie d'[[Axel Munthe]]<ref>{{en}} [http://www.keats-shelley-house.org/en/writers/writers-axel-munthe Une courte biographie d'Axel Munthe sur le site keats-shelley-house.org]</ref> qui l'évoque dans ''[[Le Livre de San Michele]]'' ([[1929 en littérature|1929]]) dont est tiré en [[1962 au cinéma|1962]] un [[Le Livre de San Michele (film)|film du même titre]] réalisé par [[Giorgio Capitani]] et [[Rudolf Jugert]] et dans lequel son rôle est interprété par [[Valentina Cortese]].

En 1948, dans son film Le comédien, Sacha Guitry fait brièvement apparaître le personnage de la Duse comme spectatrice de sa pièce de théâtre Pasteur, alors que Lucien Guitry, interprète du rôle-titre, improvisant sur scène une dédicace, lui fait parvenir un petit mot.

En [[1953 au cinéma|1953]], [[Luigi Comencini]] lui a consacré un film biographique, ''[[La valigia dei sogni]]''. Ses costumes de scène, restaurés par le [[styliste]] italien [[Fausto Sarli]], sont exposés dans les musées du monde entier.

Son nom inspira celui d'Éléonoradus, [[metteur en scène]] au théâtre romain de [[Rennes|Condate]] dans ''[[Astérix et le Chaudron]]'' (1968).

En 1994, l'[[Union astronomique internationale]] a donné son nom à un [[Cratère d'impact|cratère]] de {{unité|30|km}} de diamètre de la planète [[Vénus (planète)|Vénus]]<ref>{{en}} [http://planetarynames.wr.usgs.gov/Feature/1674?__fsk=2110729923 Le cratère Duse sur Vénus]</ref>.


== Galerie ==
== Galerie ==
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file:Eleonora Duse Antonio e Cleopatra 1888.jpg|[[1888 au théâtre|1888]] : ''[[Antoine et Cléopâtre]]''
file:Eleonora Duse Antonio e Cleopatra 1888.jpg|[[1888 au théâtre|1888]] : ''[[Antoine et Cléopâtre]]''.
File:Eleonora Duse in La Locandiera 1891.jpg|[[1891 au théâtre|1891]] : ''[[La locandiera]]''
File:Eleonora Duse in La Locandiera 1891.jpg|[[1891 au théâtre|1891]] : ''[[La locandiera]]''.
File:Eleonora Duse, by Vittorio Matteo Corcos (1859-1933).jpg|Eleonora Duse par [[Vittorio Matteo Corcos]]
File:Eleonora Duse, by Vittorio Matteo Corcos (1859-1933).jpg|Eleonora Duse par [[Vittorio Matteo Corcos]].
File:Nunes Vais, Mario (1856-1932), Eleonora Duse come Margherita Gautier ne La Signora delle Camelie di Alexander Dumas fils, 1904 circa.jpg|[[1904 au théâtre|1904]] : ''[[La Dame aux camélias]]
File:Nunes Vais, Mario (1856-1932), Eleonora Duse come Margherita Gautier ne La Signora delle Camelie di Alexander Dumas fils, 1904 circa.jpg|[[1904 au théâtre|1904]] : ''[[La Dame aux camélias]].
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<center>{{Commons-inline|Category:Eleonora Duse|D'autres portraits d'Eleonora Duse}}</center>
<center>{{Commons-inline|Category:Eleonora Duse|D'autres portraits d'Eleonora Duse}}</center>


== Annexes ==
== Annexes ==
{{autres projets|commons=Category:Eleonora Duse}}

=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
;En français
* {{Autorité}}
; en français
{{...}}
{{...}}


; en italien {{it}}
;En italien
* Paola Bertolone. ''I copioni di Eleonora Duse : Adriana Lecouvreur, Francesca da Rimini, Monna Vanna, Spettri''. Pisa, Giardini, 2000
* Paola Bertolone, ''I copioni di Eleonora Duse : Adriana Lecouvreur, Francesca da Rimini, Monna Vanna, Spettri''. Pisa, Giardini, 2000
* {{Ouvrage |langue= |auteur1=Paola Bertolone |titre=Sarò bella e vincente |sous-titre=Le lettere di Eleonora Duse al conte Giuseppe Primoli |éditeur=Edizioni di storia e letteratura |collection=Quaderni di Cultura Francese |numéro dans collection=52 |lieu=Roma |année=2019 |volume= |tome= |pages totales=368 |passage= |isbn=9788893592710 |lire en ligne= }}.
* {{Ouvrage |langue=it |auteur1=Paola Bertolone |titre=Sarò bella e vincente |sous-titre=Le lettere di Eleonora Duse al conte Giuseppe Primoli |éditeur=Edizioni di storia e letteratura |collection=Quaderni di Cultura Francese |lieu=Rome |numéro dans collection=52 |année=2019 |pages totales=368 |isbn=978-88-9359-271-0}}.
* Nino Bolla. ''Eleonora Duse : la grande tragica''. Roma, Società Nazionale Editrice, 1974
* Nino Bolla, ''Eleonora Duse : la grande tragica''. Roma, Società Nazionale Editrice, 1974
* Vittore Branca. ''Vocazione letteraria di Eleonora Duse : con una serie di documenti inediti''. In: «Nuova Antologia», n. 2178 (aprile-giugno 1991)
* [[Vittore Branca]], ''Vocazione letteraria di Eleonora Duse : con una serie di documenti inediti''. In: «Nuova Antologia», n. 2178 (aprile-giugno 1991)
* Mario Cacciaglia. ''Eleonora Duse, ovvero Vivere ardendo''. Milano, Rusconi, 1998
* Mario Cacciaglia, ''Eleonora Duse, ovvero Vivere ardendo''. Milano, Rusconi, 1998
* Gerardo Guerrieri. ''Eleonora Duse : nove saggi''; a cura di Lina Vito. Roma, Bulzoni, 1993
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* Nicola Mangini. ''Eleonora Duse nella storia del teatro europeo''. In: «Archivio Veneto», serie 5., vol. 121. (1983)
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* Franca Minnucci. "La Figlia di Iorio - Era mia, era mia e me l'hanno presa". Pescara, Ianieri, 2004.
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* Franca Minnucci. "Eleonora Duse - La fine dell'incantesimo". Pescara, Inaieri, 2010.
* Franca Minnucci, ''Eleonora Duse - La fine dell'incantesimo''. Pescara, Inaieri, 2010.
* Cesare Molinari. ''L'attrice divina. Eleonora Duse nel teatro italiano fra i due secoli''. Roma, Bulzoni, 1985
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* Daniela Musini. "Mia Divina Eleonora". Pescara, Ianieri, 2008
* Daniela Musini, ''Mia Divina Eleonora''. Pescara, Ianieri, 2008
* Donatella Orecchia, "La prima Duse. Nascita di un'attrice moderna", Roma, Artemide, 2007.
* Donatella Orecchia, ''La prima Duse. Nascita di un'attrice moderna'', Roma, Artemide, 2007.
* Maria Pia Pagani. ''Mirandolina e Vasilisa: due volti di Eleonora Duse''. In: «Viglevanum: miscellanea di studi storici e artistici», 16(2006)
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* Luigi Rasi. ''La Duse''. Roma, Bulzoni, 1986
* Luigi Rasi, ''La Duse''. Roma, Bulzoni, 1986
* Federico von Rieger. ''Eleonora Duse''. Milano, Nord-Ovest, 1981
* Federico von Rieger, ''Eleonora Duse''. Milano, Nord-Ovest, 1981
* Mirella Schino. ''Il teatro di Eleonora Duse''. Bologna, Il Mulino, 1992
* Mirella Schino, ''Il teatro di Eleonora Duse''. Bologna, Il Mulino, 1992
* Helen Sheehy. ''Eleonora Duse: la donna, le passioni, la leggenda''. Milano, Mondolibri, stampa 2006
* Helen Sheehy, ''Eleonora Duse: la donna, le passioni, la leggenda''. Milano, Mondolibri, stampa 2006
* Olga Signorelli, Eleonora Duse, 1959
* Olga Signorelli, ''Eleonora Duse'', 1959
* John Stokes, Michael R. Booth, Susan Bassnett. ''Tre attrici e il loro tempo: Sarah Bernhardt, Ellen Terry, Eleonora Duse''. Genova, Costa & Nolan, 1991
* John Stokes, Michael R. Booth, Susan Bassnett, ''Tre attrici e il loro tempo: Sarah Bernhardt, Ellen Terry, Eleonora Duse''. Genova, Costa & Nolan, 1991
* Matilde Tortora (a cura di). ''Matilde Serao a Eleonora Duse : lettere''. Napoli, Graus, 2004 * William Weaver. ''Eleonora Duse''. Milano, Bompiani, 1985
* Matilde Tortora (éd.), ''Matilde Serao a Eleonora Duse : lettere''. Napoli, Graus, 2004 * William Weaver. ''Eleonora Duse''. Milano, Bompiani, 1985
* ''Eleonora Duse nella vita e nell'arte (1858 - 1924)''. Venezia, Marsilio, 2001
* ''Eleonora Duse nella vita e nell'arte (1858-1924)''. Venezia, Marsilio, 2001
* ''Amarti ora e sempre : Eleonora Duse e Francesca da Rimini''. [Catalogo della mostra tenuta a Rocca di Gradara nel 2006, a cura di Laura Villani, Maria Ida Biggi, Maria Rosaria Valazzi ; con la collaborazione di Daniele Diotallevi]. Urbino, QuattroVenti, 2006
* ''Amarti ora e sempre : Eleonora Duse e Francesca da Rimini''. [Catalogo della mostra tenuta a Rocca di Gradara nel 2006, a cura di Laura Villani, Maria Ida Biggi, Maria Rosaria Valazzi ; con la collaborazione di Daniele Diotallevi]. Urbino, QuattroVenti, 2006
* Museo Teatrale alla Scala. ''Eleonora Duse: un vestire che divenne moda''. Mostra, 3 marzo-1 aprile 1973. Catalogo a cura di Dada Saligeri; introduzione di Carlo Fontana. Milano, Arti grafiche G. Ferrari, 1973
* Museo Teatrale alla Scala, ''Eleonora Duse: un vestire che divenne moda''. Mostra, 3 marzo-1 aprile 1973. Catalogo a cura di Dada Saligeri; introduzione di Carlo Fontana. Milano, Arti grafiche G. Ferrari, 1973

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Eleonora Duse
Portrait de Eleonora Duse
par Vittorio Matteo Corcos.
Biographie
Naissance
Décès
Surnom
La Duse
Nationalités
sarde (jusqu'en )
italienne ( - )Voir et modifier les données sur Wikidata
Domicile
Activités
Autres informations
Archives conservées par
Archivi dell'Istituto per il Teatro e il Melodramma (d)[1]Voir et modifier les données sur Wikidata
signature d'Eleonora Duse
Signature

Eleonora Duse est une comédienne italienne née le à Vigevano et morte le à Pittsburgh. Elle est considérée comme l'une des plus grandes comédiennes de son temps. Rivale de Sarah Bernhardt, elle lui voua cependant une admiration profonde.

Biographie[modifier | modifier le code]

Née dans une famille de comédiens de Chioggia, Eleonora Duse passe son enfance dans la troupe amateur itinérante de ses parents, Alessandro Vincenzo Duse et Angelica Cappelletto. La famille Duse est apparentée à une autre famille de comédiens ambulants, les Vitaliani dont la fille Italia (it) est la cousine d'Eleonora. Dès l'âge de quatre ans, elle joue, en 1862, le rôle de Cosette dans une version théâtrale des Misérables. En 1878, elle tient les rôles de « première amoureuse » dans la compagnie Ciotti-Belli Blanes et, à tout juste vingt ans, est à la tête d'une compagnie aux côtés de Giacinta Pezzana (it). Elle connaît son premier succès en 1879 dans le rôle de Thérèse Raquin, dans la pièce de théâtre éponyme adaptée de son roman par Émile Zola en 1873, qui lui vaut l'adoration du public et la reconnaissance de la critique.

En 1879, elle entre dans la troupe semi-permanente de Turin de Cesare Rossi où elle portera à maturation son choix esthétique, recueillant l'héritage du passé mais rompant en même temps avec la tradition du « grand acteur » de la première moitié du XIXe siècle. C'est au cours de cette période, dans les années 1880, que la Duse accomplit les choix de répertoire qui marqueront son parcours artistique et sa carrière théâtrale. Un répertoire qui lui permet d'exprimer son sentiment de crise face à son époque. Étant donné l'absence significative de dramaturgie en Italie (de Paolo Giacometti, Giuseppe Giacosa, Achille Torelli (it), Emilio Praga ne subsiste au mieux qu'un texte de chacun) elle privilégie les « pièces bien faites » françaises : modernes, mondaines, adaptées à l'évolution des goûts du public de cette fin du XIXe siècle, aux mécanismes parfaitement huilés pour coller aux valeurs bourgeoises. Mais entre les mains de la Duse, les drames de Victorien Sardou et d'Alexandre Dumas fils deviennent des pièces à démonter et à remplir ensuite d'une vie nouvelle, du message infiniment personnel de la Duse qui veut représenter les valeurs de cette classe telle qu'elle se présente dans la réalité qui l'entoure et non pas les approuver sans réserve. Ses thèmes de prédilection, les plus difficiles à affronter, sont les plus représentatifs de la société bourgeoise de l'époque : l'argent, le sexe, la famille, le mariage, le rôle de la femme. Il en ressort le portrait d'une société respectable mais en réalité hypocrite, brillante en apparence mais dépravée en substance, obnubilée par un dieu de l'argent régulateur de toute relation humaine, un monde dans lequel il est impossible d'éprouver des émotions sincères. Mais en émerge également l'intériorité féminine de la Duse : une intériorité brisée, aliénée, névrosée. Son répertoire est moderne et attractif : du vérisme de la Cavalleria rusticana de Giovanni Verga aux drames de Victorien Sardou et d'Alexandre Dumas fils qui sont également ceux du répertoire de Sarah Bernhardt. Entre les deux comédiennes nait rapidement une rivalité qui divise les critiques.

En 1881, Eleonora Duse épouse Tebaldo Checchi, un acteur de sa compagnie. L'union, de laquelle naît une fille, Henriette, se révèle rapidement malheureuse et se termine par une séparation définitive. En 1884, la Duse se lie avec Arrigo Boito qui traduit pour elle l'Antoine et Cléopâtre de Shakespeare. La relation, restée secrète, dure plusieurs années entre hauts et bas. Les rencontres ont lieu à Ivrée, dans le château de San Jose, demeure d'un ami commun, Giuseppe Bianchi. Pendant cette période, la comédienne fréquente le milieu de la scapigliatura, et son répertoire s'enrichit des drames de Giuseppe Giacosa, ami de Boito. Son amitié avec Isadora Duncan qu'elle rencontre lors de tournées européennes est très commentée. Néanmoins il ne fut jamais prouvé qu'elles furent engagées dans une relation amoureuse. En 1886, elle fonde sa propre compagnie. Elle porte sur les scènes italiennes les drames d'Henrik Ibsen, dont elle interprète Une maison de poupée, Hedda Gabler, La Dame de la mer et Rosmersholm À partir de 1890, elle joue principalement hors d'Italie, notamment à Paris, où elle connaît la consécration en 1897. Rosmersholm d'Ibsen est notamment repris au Théâtre de l'Œuvre en 1898 dans la mise en scène de Lugné-Poe puis dans les décors mémorables d'Edward Gordon Craig en 1906.

Jusqu'en 1904, elle est la maîtresse et l'interprète du poète Gabriele D'Annunzio. Elle quitte le théâtre en 1908 et joue en 1916 pour la seule fois au cinéma, dans Cenere d'Arturo Ambrosio, film tiré du roman homonyme de Grazia Deledda. Elle entretient une liaison avec la jeune rebelle féministe Lina Poletti, de 1909 à 1911.

Elle revient au théâtre de 1921 à 1923. Elle meurt d'une pneumonie[2], au cours d'une ultime tournée américaine, à Pittsburgh, le . Elle est enterrée au cimetière d'Asolo conformément à sa volonté.

La rencontre avec D'Annunzio[modifier | modifier le code]

Gabriele D'Annunzio.

En 1882 à Rome, Eleonora Duse rencontre pour la première fois Gabriele D'Annunzio. C'est un jeune homme séduisant, arrivé depuis peu des Abruzzes mais avec déjà trois œuvres publiées. Il se présente à la Duse et, avec des paroles mélodieuses, lui propose sans autre préambule de coucher avec lui. Eleonora le congédie avec indignation mais, peut-être, avec aussi une secrète satisfaction. Ce jour-là, elle le décrit ainsi : « Già famoso e molto attraente, con i capelli biondi e qualcosa di ardente nella sua persona »[3],[4]. En 1888, Eleonora qui, sur la scène du teatro Valle, vient tout juste de se repentir de ses plaisirs de dévoyée, de prendre en pleine face une poignée de fausse monnaie et est morte de phtisie et d'amour dans le rôle de la malheureuse Dame aux camélias, se dirige encore pleine de soupirs et de sanglots vers sa loge. C'est alors qu'un frêle et élégant jeune homme surgit de la pénombre du corridor et lui crie, avec enthousiasme et assurance : « O grande amatrice! »[5]. Eleonora un peu épouvantée, le dévisage un moment et poursuit son chemin. C'était encore D'Annunzio[6]. Juin 1892 est la date que D'Annunzio inscrit, avec la dédicace « Alla divina Eleonora Duse » sur un exemplaire de ses Elegie romane. De ces livres, naît en Eleonora le désir d'une rencontre avec l'auteur. Et, lors de la rencontre, « si abbandona alla presa di quegli occhi chiari, si sorprende a dimenticare tutta la sua amara sapienza della vita e a godere della lusinga che essi esprimono »[7],[8].

Le tournant décisif de la vie et la carrière artistique d'Eleonora Duse fut la rencontre définitive à Venise, en 1894, avec Gabriele D'Annunzio, alors à peine trentenaire. Le lien sentimental et artistique tempétueux qui s'établit entre la comédienne et le jeune poète dura une dizaine d'années et contribua de manière déterminante à asseoir la réputation de D'Annunzio. Eleonora Duse, déjà célèbre et acclamée en Europe et outre-atlantique, porta sur toutes les scènes les drames dannunziens (Il sogno di un mattino di primavera, La Gioconda, Francesca da Rimini, La città morta, La figlia di Iorio), finançant souvent elle-même les productions et leur assurant le succès et l'attention de la critique y compris hors d'Italie. Cependant, en 1896, D'Annunzio lui préféra Sarah Bernhardt pour la première française de La ville morte. Les périodes de proximité et de collaboration entre les deux artistes alterneront avec les crises et les ruptures. D'Annunzio suivait rarement l'actrice dans ses tournées mais, en 1898, il loua la villa de la Capponcina à Florence, dans la frazione de Settignano, pour se rapprocher de la Porziuncola, la demeure d'Eleonora. En 1900, D'Annunzio publia son roman Il fuoco, inspiré de sa relation avec Eleonora Duse, suscitant de vives critiques de la part des admirateurs de la comédienne.

Postérité[modifier | modifier le code]

Après sa mort, de nombreux théâtres sont baptisés de son nom, tout comme des écoles et autres toponymes de villes italiennes. Le Teatro Duse de Bologne fait exception puisqu'il est renommé en son honneur de son vivant, en 1898, à l'occasion d'un changement de propriétaire.

Elle fut une amie d'Axel Munthe[9] qui l'évoque dans Le Livre de San Michele (1929) dont est tiré en 1962 un film du même titre réalisé par Giorgio Capitani et Rudolf Jugert et dans lequel son rôle est interprété par Valentina Cortese.

En 1948, dans son film Le comédien, Sacha Guitry fait brièvement apparaître le personnage de la Duse comme spectatrice de sa pièce de théâtre Pasteur, alors que Lucien Guitry, interprète du rôle-titre, improvisant sur scène une dédicace, lui fait parvenir un petit mot.

En 1953, Luigi Comencini lui a consacré un film biographique, La valigia dei sogni. Ses costumes de scène, restaurés par le styliste italien Fausto Sarli, sont exposés dans les musées du monde entier.

Son nom inspira celui d'Éléonoradus, metteur en scène au théâtre romain de Condate dans Astérix et le Chaudron (1968).

En 1994, l'Union astronomique internationale a donné son nom à un cratère de 30 km de diamètre de la planète Vénus[10].

Galerie[modifier | modifier le code]

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

En français
En italien
  • Paola Bertolone, I copioni di Eleonora Duse : Adriana Lecouvreur, Francesca da Rimini, Monna Vanna, Spettri. Pisa, Giardini, 2000
  • (it) Paola Bertolone, Sarò bella e vincente : Le lettere di Eleonora Duse al conte Giuseppe Primoli, Rome, Edizioni di storia e letteratura, coll. « Quaderni di Cultura Francese » (no 52), , 368 p. (ISBN 978-88-9359-271-0).
  • Nino Bolla, Eleonora Duse : la grande tragica. Roma, Società Nazionale Editrice, 1974
  • Vittore Branca, Vocazione letteraria di Eleonora Duse : con una serie di documenti inediti. In: «Nuova Antologia», n. 2178 (aprile-giugno 1991)
  • Mario Cacciaglia, Eleonora Duse, ovvero Vivere ardendo. Milano, Rusconi, 1998
  • Gerardo Guerrieri, Eleonora Duse : nove saggi; a cura di Lina Vito. Roma, Bulzoni, 1993
  • Nicola Mangini, Eleonora Duse nella storia del teatro europeo. In: «Archivio Veneto», serie 5., vol. 121. (1983)
  • Franca Minnucci, La Figlia di Iorio - Era mia, era mia e me l'hanno presa. Pescara, Ianieri, 2004.
  • Franca Minnucci, Eleonora Duse - La fine dell'incantesimo. Pescara, Inaieri, 2010.
  • Cesare Molinari, L'attrice divina. Eleonora Duse nel teatro italiano fra i due secoli. Roma, Bulzoni, 1985
  • Daniela Musini, Mia Divina Eleonora. Pescara, Ianieri, 2008
  • Donatella Orecchia, La prima Duse. Nascita di un'attrice moderna, Roma, Artemide, 2007.
  • Maria Pia Pagani, Mirandolina e Vasilisa: due volti di Eleonora Duse. In: «Viglevanum: miscellanea di studi storici e artistici», 16(2006)
  • Luigi Rasi, La Duse. Roma, Bulzoni, 1986
  • Federico von Rieger, Eleonora Duse. Milano, Nord-Ovest, 1981
  • Mirella Schino, Il teatro di Eleonora Duse. Bologna, Il Mulino, 1992
  • Helen Sheehy, Eleonora Duse: la donna, le passioni, la leggenda. Milano, Mondolibri, stampa 2006
  • Olga Signorelli, Eleonora Duse, 1959
  • John Stokes, Michael R. Booth, Susan Bassnett, Tre attrici e il loro tempo: Sarah Bernhardt, Ellen Terry, Eleonora Duse. Genova, Costa & Nolan, 1991
  • Matilde Tortora (éd.), Matilde Serao a Eleonora Duse : lettere. Napoli, Graus, 2004 * William Weaver. Eleonora Duse. Milano, Bompiani, 1985
  • Eleonora Duse nella vita e nell'arte (1858-1924). Venezia, Marsilio, 2001
  • Amarti ora e sempre : Eleonora Duse e Francesca da Rimini. [Catalogo della mostra tenuta a Rocca di Gradara nel 2006, a cura di Laura Villani, Maria Ida Biggi, Maria Rosaria Valazzi ; con la collaborazione di Daniele Diotallevi]. Urbino, QuattroVenti, 2006
  • Museo Teatrale alla Scala, Eleonora Duse: un vestire che divenne moda. Mostra, 3 marzo-1 aprile 1973. Catalogo a cura di Dada Saligeri; introduzione di Carlo Fontana. Milano, Arti grafiche G. Ferrari, 1973

Notes et références[modifier | modifier le code]

(it) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en italien intitulé « Eleonora Duse » (voir la liste des auteurs).
  1. « https://archivi.cini.it/teatromelodramma/archive/IT-CST-GUI001-000004/eleonora-duse.html » (consulté le )
  2. (en-US) « Eleonora Duse », sur The Florentine, (consulté le )
  3. « Déjà célèbre et très séduisant, les cheveux blonds et quelque chose d'ardent dans sa personne »
  4. Denis Mack Smith, L' Italia del XX secolo, vol. I (1899-1908) tome I, p. 48, edizioni Rizzoli, 1977
  5. « Ô, grande séductrice ! »
  6. Denis Mack Smith, op. cit. pp. 48/49
  7. « Elle s'abandonne à l'emprise de ces yeux clairs, se surprend à oublier toute l'amère expérience de sa vie et à jouir de la flatterie exprimée par ce regard »
  8. Denis Mack Smith, op. cit. p. 49
  9. (en) Une courte biographie d'Axel Munthe sur le site keats-shelley-house.org
  10. (en) Le cratère Duse sur Vénus

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]

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