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« Dragonnades » : différence entre les versions

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Les premières dragonnades précédèrent de quelques mois l'[[édit de Fontainebleau (1685)|édit de Fontainebleau]] de [[1685]] qui révoquait l'[[édit de Nantes]], et le furent elles-mêmes par les « missions bottées » de [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]]. Celui-ci commença, en 1681, dans le [[Limousin (ancienne région administrative)|Limousin]] et le [[Poitou]] qui relevaient de lui, écrivant aux intendants d'accabler les protestants de cavaliers à loger : {{citation|Si, suivant une répartition où ils en devraient porter dix, vous pouvez leur en faire donner vingt.}} Il fut obéi. [[René de Marillac]], l'intendant du Poitou, ordonna de faire le rôle des tailles et de marquer les réformés à la marge pour les grever, tant pour l'impôt que pour le logement des gens de guerre. Les nouveaux convertis étaient, au contraire, exempts de l'un et de l'autre. L'effet de ce genre de persécution au sein de chaque famille dépassa l'espérance de Louvois. Des milliers de protestants se déclarèrent catholiques tandis que ceux de l'[[Aunis]] et de la [[Saintonge]], pays maritimes, émigraient en foule. [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] s'étant ému de cet état de choses, il en avisa le roi et obtint trois mesures réparatrices : l'interdiction de ce moyen de conversion ; un ordre du conseil contre les violences qui {{citation|se faisaient en quelques lieux contre les religionnaires}} et la destitution de Marillac, intendant du Poitou. Cependant, la mort de Colbert en 1683 laissa les Le Tellier maîtres de la situation.
Les premières dragonnades précédèrent de quelques mois l'[[édit de Fontainebleau (1685)|édit de Fontainebleau]] de [[1685]] qui révoquait l'[[édit de Nantes]], et le furent elles-mêmes par les « missions bottées » de [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]]. Celui-ci commença, en 1681, dans le [[Limousin (ancienne région administrative)|Limousin]] et le [[Poitou]] qui relevaient de lui, écrivant aux intendants d'accabler les protestants de cavaliers à loger : {{citation|Si, suivant une répartition où ils en devraient porter dix, vous pouvez leur en faire donner vingt.}} Il fut obéi. [[René de Marillac]], l'intendant du Poitou, ordonna de faire le rôle des tailles et de marquer les réformés à la marge pour les grever, tant pour l'impôt que pour le logement des gens de guerre. Les nouveaux convertis étaient, au contraire, exempts de l'un et de l'autre. L'effet de ce genre de persécution au sein de chaque famille dépassa l'espérance de Louvois. Des milliers de protestants se déclarèrent catholiques tandis que ceux de l'[[Aunis]] et de la [[Saintonge]], pays maritimes, émigraient en foule. [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] s'étant ému de cet état de choses, il en avisa le roi et obtint trois mesures réparatrices : l'interdiction de ce moyen de conversion ; un ordre du conseil contre les violences qui {{citation|se faisaient en quelques lieux contre les religionnaires}} et la destitution de Marillac, intendant du Poitou. Cependant, la mort de Colbert en 1683 laissa les Le Tellier maîtres de la situation.


Au début de l'année 1685, Louis XIV avait envoyé dans le [[Béarn]] une armée pour menacer l'[[Espagne]]. Pendant le séjour de ces troupes dans cette province, l'[[Nicolas-Joseph Foucault|intendant Foucault]] déclara que le roi ne voulait plus qu'une religion dans ses États. Aussitôt il envoya les troupes contre les [[Calvinisme|calvinistes]], forcés de se convertir par les brutalités auxquelles ils furent soumis, et l'on annonça au roi que la grâce divine avait opéré ce miracle{{référence nécessaire}}.
Au début de l'année 1685, Louis XIV avait envoyé dans le [[Béarn]] une armée pour menacer l'[[Espagne]]. Pendant le séjour de ces troupes dans cette province, l'[[Nicolas-Joseph Foucault|intendant Foucault]] déclara que le roi ne voulait plus qu'une religion dans ses États.


La première expédition connue sous le nom de « dragonnade » eut lieu lorsque, par suite des concessions de la cour d'Espagne, la présence d'une armée étant devenue inutile dans le Béarn, Louvois, ordonna, par une lettre du [[31 juillet]] de la même année, au [[Louis François de Boufflers|marquis de Boufflers]] d'employer ces troupes à supprimer l'« hérésie », ainsi que les catholiques appelaient la [[Église réformée de France|religion prétendue réformée]] (RPR) dans les [[Généralité de Bordeaux|généralités de Bordeaux]] et de [[Généralité de Montauban|Montauban]]. En réalité, l'infanterie fut également employée dans cette opération mais, comme les dragons précédaient les autres corps de l'armée dans toutes les localités et qu'ils étaient assez mal disciplinés à cette époque et qu'ils commettaient le plus d'excès, leur arme donna son nom à ces exécutions brutales. Par un comble de cruauté, les « dragonnés » devaient supporter eux-mêmes les frais de leur persécution par les troupes.
La première expédition connue sous le nom de « dragonnade » eut lieu lorsque, par suite des concessions de la cour d'Espagne, la présence d'une armée étant devenue inutile dans le Béarn, Louvois, ordonna, par une lettre du [[31 juillet]] de la même année, au [[Louis François de Boufflers|marquis de Boufflers]] d'employer ces troupes à supprimer l'« hérésie », ainsi que les catholiques appelaient la [[Église réformée de France|religion prétendue réformée]] (RPR) dans les [[Généralité de Bordeaux|généralités de Bordeaux]] et de [[Généralité de Montauban|Montauban]]. En réalité, l'infanterie fut également employée dans cette opération mais, comme les dragons précédaient les autres corps de l'armée dans toutes les localités et qu'ils étaient assez mal disciplinés à cette époque et qu'ils commettaient le plus d'excès, leur arme donna son nom à ces exécutions brutales. Par un comble de cruauté, les « dragonnés » devaient supporter eux-mêmes les frais de leur persécution par les troupes.
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{{citation bloc|Les conversions, écrivait le duc de Noailles, à la fin de l'année 1685, ont été si générales et ont marché avec une si grande vitesse, que l'on n'en saurait assez remercier Dieu ni songer trop sérieusement aux moyens d'achever entièrement cet ouvrage, en donnant à ces peuples les instructions dont ils ont besoin et qu'ils demandent avec instance.}}
{{citation bloc|Les conversions, écrivait le duc de Noailles, à la fin de l'année 1685, ont été si générales et ont marché avec une si grande vitesse, que l'on n'en saurait assez remercier Dieu ni songer trop sérieusement aux moyens d'achever entièrement cet ouvrage, en donnant à ces peuples les instructions dont ils ont besoin et qu'ils demandent avec instance.}}


Les dragonnades eurent lieu partout comme en [[Histoire de la Bourgogne|Bourgogne]], en [[Poitou]], en [[Champagne (province)|Champagne]] en [[Guyenne]], en [[Normandie]] comme en [[Languedoc]]. Seul Paris, où {{citation|les cris, observe [[Voltaire]], se seraient fait entendre au trône de trop près}} n'eut pas à subir celles-ci. L'Alsace, protégée par les traités, connut néanmoins des dragonnades dans les bailliages réformés et luthériens, après les actes de réunion de 1680 et 1681, comme le bailliage réformé et [[Palatinat du Rhin|palatin]] de [[Seltz]] en 1684 et le bailliage luthérien et [[comté de Hanau-Lichtenberg|hanauvo-lichtenbergeois]] d'[[Offendorf]] en 1685. Les dragons et les jésuites convertirent de force des villages entiers de la bande rhénane.
Dans cette affaire, Louis XIV fut abusé{{référence nécessaire}} par des courtisans vénaux ou fanatiques. Il était comblé de joie en recevant la liste des conversions, en général de 250 à 400 par jour. Persuadé que tout son royaume était catholique ou près de l'être, ce fut ce qui le détermina à révoquer l'édit de Nantes. Dès lors, les dragonnades redoublèrent de rigueur et devinrent générales. Elles s'étendirent même hors France, dans les vallées du [[Piémont]] où elles furent plus atroces que partout ailleurs. Ces conversions, dont on exagérait{{référence nécessaire}} l'importance au roi, s'effectuaient avec un évêque, un intendant, un subdélégué ou un curé{{Pas clair|2=Curé avec quelle légitimité ? Simple prêtre ? Aumônier ? pourquoi ce vocabulaire ?}} marchant à la tête des soldats. Les principales familles calvinistes, surtout celles qu'on croyait les plus faciles à convertir, étaient assemblées sur la place de l'endroit. Elles renonçaient à leur religion au nom des autres et les obstinés étaient livrés aux soldats, qui avaient toute licence, excepté celle de tuer{{référence nécessaire}}.



Les exécuteurs des dragonnades employaient aussi contre leurs victimes le feu, la brûlure, l'[[estrapade (supplice)|estrapade]], la suspension par les parties les plus sensibles du corps{{Référence nécessaire|date=7 septembre 2017}}. Les dragonnades eurent lieu partout comme en [[Histoire de la Bourgogne|Bourgogne]], en [[Poitou]], en [[Champagne (province)|Champagne]] en [[Guyenne]], en [[Normandie]] comme en [[Languedoc]]. Seul Paris, où {{citation|les cris, observe [[Voltaire]], se seraient fait entendre au trône de trop près}} n'eut pas à subir celles-ci. L'Alsace, protégée par les traités, connut néanmoins des dragonnades dans les bailliages réformés et luthériens, après les actes de réunion de 1680 et 1681, comme le bailliage réformé et [[Palatinat du Rhin|palatin]] de [[Seltz]] en 1684 et le bailliage luthérien et [[comté de Hanau-Lichtenberg|hanauvo-lichtenbergeois]] d'[[Offendorf]] en 1685. Les dragons et les jésuites convertirent de force des villages entiers de la bande rhénane. À [[Seltz]], vingt réformés, qui refusaient d'abjurer, furent noyés dans le [[Seltzbach]]{{Référence nécessaire|date=7 septembre 2017}}. Par peur des dragonnades, des villages du comté de Hanau-Lichtenberg ([[Willgottheim|Wœllenheim]] et [[Hohatzenheim]]) ou la seigneurie de [[Landersheim]], abjurèrent le luthéranisme{{Référence nécessaire|date=7 septembre 2017}}.


Les réformés tentant de se soustraire aux dragonnades par la fuite étaient censés couvrir les frais de logement dans les hôtelleries locales des dragons auxquels ils tentaient d'échapper :{{citation bloc|Le provost et un lieutenant du régiment d'infanterie du roy logera chez Monsieur de la Bouillonnière, rue et paroisse Saint-Pierre, conformément aux ordres de sa Majesté. Fait en l'hôtel de Caen, le 13 novembre 1685 […] En cas que la maison ne soit ouverte, logeront à l'Aigle d'or, aux frais dudit sieur de la Bouillonnière<ref>[http://www.bmlisieux.com/normandie/dragonad.htm La Carte à payer d'une dragonnade normande en 1685.]</ref>.}}
Les réformés tentant de se soustraire aux dragonnades par la fuite étaient censés couvrir les frais de logement dans les hôtelleries locales des dragons auxquels ils tentaient d'échapper :{{citation bloc|Le provost et un lieutenant du régiment d'infanterie du roy logera chez Monsieur de la Bouillonnière, rue et paroisse Saint-Pierre, conformément aux ordres de sa Majesté. Fait en l'hôtel de Caen, le 13 novembre 1685 […] En cas que la maison ne soit ouverte, logeront à l'Aigle d'or, aux frais dudit sieur de la Bouillonnière<ref>[http://www.bmlisieux.com/normandie/dragonad.htm La Carte à payer d'une dragonnade normande en 1685.]</ref>.}}

Les dragonnades se multiplièrent durant toute la fin du règne de Louis XIV et même sous [[Louis XV de France|Louis XV]]{{Référence nécessaire|date=7 septembre 2017}}. L'invention de Louvois lui survécut ; pendant près d'un siècle avant de tomber graduellement en désuétude, les dragonnades devinrent le moyen régulièrement employé pour réduire les protestants récalcitrants de toute une contrée, pour obtenir d'eux des actes de catholicité et, par exemple, faire baptiser en masse leurs enfants. On cite comme particulièrement rigoureuses les dragonnades du [[Rouergue]] en 1745, du [[Languedoc]] en 1752, en Guyenne en 1758{{référence nécessaire}}.

Comme si cela ne suffisait pas, de véritables brigands, pour prendre part à ce pillage général, se déguisaient en dragons {{citation|et faisaient plus de mal que les dragons mêmes, afin de justifier ce nom épouvantable}}{{référence nécessaire}}.


=== Chronologie ===
=== Chronologie ===
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== Perceptions ==
== Perceptions ==

=== Réactions catholiques ===
Seuls quelques catholiques osèrent rappeler que ces communions forcées n'étaient, pour l'Église, qu'autant de sacrilèges. La reine [[Christine de Suède]], qui, elle-même convertie, vivait à [[Rome]] en [[catholicisme|catholique]] zélée depuis trente ans, flétrit les dragonnades de sa désapprobation, peu suspecte, dans une lettre du {{date|1er|février|1686}}{{référence nécessaire}} :
{{citation bloc|De bonne foi, êtes-vous bien persuadé de la sincérité des nouveaux convertis ? Je souhaite qu'ils obéissent sincèrement à Dieu et à leur roi ; mais je crains leur opiniâtreté, et je ne voudrais pas avoir sur mon compte tous les sacrilèges que commettront ces catholiques, forcés par des missionnaires qui traitent trop cavalièrement nos saints mystères. Les gens de guerre sont d'étranges apôtres, et je les crois plus propres à tuer, à voler, à violer, qu'à persuader : aussi des relations (desquelles on ne peut douter) nous apprennent qu'ils s'acquittent de leur mission fort à leur mode.}}


Les dragonnades ont également trouvé leurs apologistes : ''Traité dogmatique et historique des édits et autres moyens d'établir l'unité de l'Église catholique'', par les RR. PP. [[Louis Thomassin|Thomassin]] et [[Charles Bordes|Bordes]] de l'Oratoire, 3 vol. in-4°, 1703. ''Réponse aux plaintes des protestants'', par [[Denis de Sainte-Marthe|Sainte-Marthe]], bénédictin, 1688 ; ''Réponse à ce qu'on a écrit contre l'instruction pour les nouveaux catholiques'', par le [[Louis Doucin|R. P. Doucin]], jésuite, Caen, 1687.
Les dragonnades ont également trouvé leurs apologistes : ''Traité dogmatique et historique des édits et autres moyens d'établir l'unité de l'Église catholique'', par les RR. PP. [[Louis Thomassin|Thomassin]] et [[Charles Bordes|Bordes]] de l'Oratoire, 3 vol. in-4°, 1703. ''Réponse aux plaintes des protestants'', par [[Denis de Sainte-Marthe|Sainte-Marthe]], bénédictin, 1688 ; ''Réponse à ce qu'on a écrit contre l'instruction pour les nouveaux catholiques'', par le [[Louis Doucin|R. P. Doucin]], jésuite, Caen, 1687.
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=== Les dragonnades dans les écrits protestants ===
=== Les dragonnades dans les écrits protestants ===
Bayle et quelques écrivains calvinistes emploient le mot de « conversions dragonnes » sur lesquelles [[Jacques Pineton de Chambrun|Pineton de Chambrun]], pasteur d'[[Orange (Vaucluse)|Orange]] donne des détails dans son ''Histoire de la persécution des protestants en la principauté d'Orange, par le roi de France (de 1660 à 1687)'' publiée en anglais à [[Londres]], en 1689, relation qui existe au [[British Museum]].
Bayle et quelques écrivains calvinistes emploient le mot de « conversions dragonnes » sur lesquelles [[Jacques Pineton de Chambrun|Pineton de Chambrun]], pasteur d'[[Orange (Vaucluse)|Orange]] donne des détails dans son ''Histoire de la persécution des protestants en la principauté d'Orange, par le roi de France (de 1660 à 1687)'' publiée en anglais à [[Londres]], en 1689, relation qui existe au [[British Museum]].

[[Élie Benoît]] a donné, dans son ''Histoire de l'Édit de Nantes'', publiée en Hollande en 1695, la description détaillée des diverses violences exercées par les soldats logés à discrétion chez les calvinistes réfractaires{{Passage non neutre||nocat=Utiliser un auteur protestant du XVIIe n'est pas neutre.}} : ils faisaient quelquefois danser leurs hôtes jusqu'à ce que ceux-ci tombent en défaillance. Ils bernaient les autres jusqu'à ce qu'ils n'en puissent plus. Quand ils ne pouvaient forcer ces malheureux à fumer avec eux, ils leur soufflaient la fumée dans la figure. Ils leur faisaient avaler du tabac en feuilles. Quand ils ne pouvaient les faire boire de bonne volonté, ils leur mettaient un entonnoir dans la bouche pour leur faire avaler du [[vin]] ou de l'[[eau-de-vie]]. Si, dans un pareil état, ces infortunés laissaient échapper quelque parole qui pût passer pour un acte de conversion, les dragons les déclaraient catholiques sur-le-champ. À d'autres, ils faisaient boire de l'eau et les contraignaient d'en avaler vingt ou trente verres. On versa de l'eau bouillante dans la bouche à quelques-uns.{{référence nécessaire}}

Les exécuteurs des dragonnades n'avaient ni plus de pitié ni plus de respect pour les femmes que pour les hommes{{Passage non neutre||nocat=Utiliser un auteur protestant du XVIIe n'est pas neutre.}}. {{citation|Ils abusaient, dit un contemporain, de la tendre pudeur qui est une des propriétés de leur sexe, et ils s'en prévalaient pour leur faire de plus sensibles outrages.}}{{référence nécessaire}}. Quant à la conduite des officiers dans ces circonstances, Élie Benoît observe que {{citation|Comme la plupart avaient plus d'honneur que leurs soldats, on craignit à la cour que leur présence n'empêchât les conversions, et on donna des ordres fort exprès aux intendants de ne les loger point avec leurs troupes, principalement chez les gentilshommes, de peur que par civilité ils ne repoussassent l'insolence des dragons}}. Les relations du temps montrent pourtant que si les officiers ne partageaient pas les excès de leurs soldats, ils les acceptaient du moins{{référence nécessaire}}. C'est ce qui a fait dire à [[Pierre Bayle|Bayle]] :{{citation bloc|N'est-ce pas une chose qui fait honte au nom chrétien, que pendant que votre soldatesque a été logée dans les maisons de ceux de la religion, les gouverneurs, les intendants et les évêques aient tenu table ouverte pour les officiers des troupes, où on rapportait, pour divertir la compagnie, tous les bons tours dont les soldats s'étaient avisés pour faire peur à leurs hôtes, pour leur escroquer de l'argent.}}

Les dégâts commis par les dragons convertisseurs n'étaient que trop comparables à leurs cruautés envers les personnes{{Passage non neutre||nocat=Utiliser un auteur protestant du XVIIe n'est pas neutre.}}. {{citation|Il n'y avait point de meubles précieux, ou chez les riches marchands, ou chez les personnes de qualité, qu'ils ne prissent plaisir à gâter. Ils ne mettaient leurs chevaux que dans des chambres de parade. Ils leur faisaient litière de ballots de laine, ou de coton, ou de soie ; et quelquefois, par un barbare caprice, ils se faisaient donner le plus beau linge qu'il y eût, et des draps de toile de Hollande, pour y faire coucher leurs chevaux… Ils avaient ordre même de démolir les maisons des prétendus opiniâtres. Cela fut exécuté dans toutes les provinces… Dans les lieux où les gentilshommes avaient, ou des bois, ou des jardins, ou des allées plantées de beaux arbres, on les abattait sans formalité ni prétexte… Dans les terres mêmes des princes, on logeait des troupes à discrétion. Le [[Louis II de Bourbon-Condé|prince de Condé]] voyait, pour ainsi dire, des fenêtres de sa maison de [[Chantilly]], piller ses sujets, ruiner leurs maisons, traîner les inflexibles dans les cachots. Du seul village de [[Villiers-le-Bel]], il fut emporté par les soldats, ou par d'autres voleurs qui prenaient le nom de dragons, plus de 200 charretées de bons meubles, sans compter ceux qu'on brûlait ou qu'on brisait.}}{{référence nécessaire}}


==Lieux et monuments==
==Lieux et monuments==
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* [[William Duckett fils]], ''Dictionnaire de la conversation et de la lecture'', t. 8, Paris, Michel Lévy, 1854, {{p.}}8-9
* [[William Duckett fils]], ''Dictionnaire de la conversation et de la lecture'', t. 8, Paris, Michel Lévy, 1854, {{p.}}8-9
* [[Maurice Block]], ''Dictionnaire général de la politique'', Paris, O. Lorenz, 1873, {{p.}}716-7
* [[Maurice Block]], ''Dictionnaire général de la politique'', Paris, O. Lorenz, 1873, {{p.}}716-7

=== Article connexe ===
* [[Violence politique]]


=== Liens externes ===
=== Liens externes ===

Version du 31 octobre 2020 à 14:17

Le « dragon missionnaire » : « Qui peut me résister est bien fort ».

Des dragonnades sont les persécutions dirigées sous Louis XIV contre les communautés protestantes de toutes les régions de France pour l'exercice de leur culte. Les dragons employés pour obtenir par la force ces conversions étaient, à l'origine, des compagnies régulières qui servaient, en temps ordinaire, à percevoir l'impôt, et spécialement celui de contribuables redevables d'arriérés qui devaient loger à leurs frais les soldats jusqu'au paiement effectif, voire garnisaire.

Histoire

Chiffres

La première dragonnade organisée en 1681 par l'intendant du Poitou, René de Marillac, permit à cet agent du pouvoir royal d'annoncer 30 000 conversions obtenues entre août et novembre. « Le procédé imaginé par Marillac était le logement forcé des troupes dans les logis des réformés qui devaient satisfaire toutes leurs exigences[1] ».

Les dragonnades qui s'étaient multipliées et étendues au cours de l'année 1685 entraînèrent des conversions en masse . On estime qu'à la fin de l'été 1685 – soit avant l'édit de Fontainebleau –, le nombre de ceux qui signèrent sous la contrainte une confession de foi catholique préparée à cette fin atteignit environ 400 000[1].

Récit des événements

Les premières dragonnades précédèrent de quelques mois l'édit de Fontainebleau de 1685 qui révoquait l'édit de Nantes, et le furent elles-mêmes par les « missions bottées » de Louvois. Celui-ci commença, en 1681, dans le Limousin et le Poitou qui relevaient de lui, écrivant aux intendants d'accabler les protestants de cavaliers à loger : « Si, suivant une répartition où ils en devraient porter dix, vous pouvez leur en faire donner vingt. » Il fut obéi. René de Marillac, l'intendant du Poitou, ordonna de faire le rôle des tailles et de marquer les réformés à la marge pour les grever, tant pour l'impôt que pour le logement des gens de guerre. Les nouveaux convertis étaient, au contraire, exempts de l'un et de l'autre. L'effet de ce genre de persécution au sein de chaque famille dépassa l'espérance de Louvois. Des milliers de protestants se déclarèrent catholiques tandis que ceux de l'Aunis et de la Saintonge, pays maritimes, émigraient en foule. Colbert s'étant ému de cet état de choses, il en avisa le roi et obtint trois mesures réparatrices : l'interdiction de ce moyen de conversion ; un ordre du conseil contre les violences qui « se faisaient en quelques lieux contre les religionnaires » et la destitution de Marillac, intendant du Poitou. Cependant, la mort de Colbert en 1683 laissa les Le Tellier maîtres de la situation.

Au début de l'année 1685, Louis XIV avait envoyé dans le Béarn une armée pour menacer l'Espagne. Pendant le séjour de ces troupes dans cette province, l'intendant Foucault déclara que le roi ne voulait plus qu'une religion dans ses États.

La première expédition connue sous le nom de « dragonnade » eut lieu lorsque, par suite des concessions de la cour d'Espagne, la présence d'une armée étant devenue inutile dans le Béarn, Louvois, ordonna, par une lettre du 31 juillet de la même année, au marquis de Boufflers d'employer ces troupes à supprimer l'« hérésie », ainsi que les catholiques appelaient la religion prétendue réformée (RPR) dans les généralités de Bordeaux et de Montauban. En réalité, l'infanterie fut également employée dans cette opération mais, comme les dragons précédaient les autres corps de l'armée dans toutes les localités et qu'ils étaient assez mal disciplinés à cette époque et qu'ils commettaient le plus d'excès, leur arme donna son nom à ces exécutions brutales. Par un comble de cruauté, les « dragonnés » devaient supporter eux-mêmes les frais de leur persécution par les troupes.

Le duc de Noailles, qui commandait dans le Languedoc, partagea avec le marquis de Boufflers la responsabilité des premières dragonnades. Leur succès fut prompt : à la seule vue des troupes, les conversions se faisaient par milliers.

« Les conversions, écrivait le duc de Noailles, à la fin de l'année 1685, ont été si générales et ont marché avec une si grande vitesse, que l'on n'en saurait assez remercier Dieu ni songer trop sérieusement aux moyens d'achever entièrement cet ouvrage, en donnant à ces peuples les instructions dont ils ont besoin et qu'ils demandent avec instance. »

Les dragonnades eurent lieu partout comme en Bourgogne, en Poitou, en Champagne en Guyenne, en Normandie comme en Languedoc. Seul Paris, où « les cris, observe Voltaire, se seraient fait entendre au trône de trop près » n'eut pas à subir celles-ci. L'Alsace, protégée par les traités, connut néanmoins des dragonnades dans les bailliages réformés et luthériens, après les actes de réunion de 1680 et 1681, comme le bailliage réformé et palatin de Seltz en 1684 et le bailliage luthérien et hanauvo-lichtenbergeois d'Offendorf en 1685. Les dragons et les jésuites convertirent de force des villages entiers de la bande rhénane.


Les réformés tentant de se soustraire aux dragonnades par la fuite étaient censés couvrir les frais de logement dans les hôtelleries locales des dragons auxquels ils tentaient d'échapper :

« Le provost et un lieutenant du régiment d'infanterie du roy logera chez Monsieur de la Bouillonnière, rue et paroisse Saint-Pierre, conformément aux ordres de sa Majesté. Fait en l'hôtel de Caen, le 13 novembre 1685 […] En cas que la maison ne soit ouverte, logeront à l'Aigle d'or, aux frais dudit sieur de la Bouillonnière[2]. »

Chronologie

Perceptions

Les dragonnades ont également trouvé leurs apologistes : Traité dogmatique et historique des édits et autres moyens d'établir l'unité de l'Église catholique, par les RR. PP. Thomassin et Bordes de l'Oratoire, 3 vol. in-4°, 1703. Réponse aux plaintes des protestants, par Sainte-Marthe, bénédictin, 1688 ; Réponse à ce qu'on a écrit contre l'instruction pour les nouveaux catholiques, par le R. P. Doucin, jésuite, Caen, 1687.

Les dragonnades dans les écrits protestants

Bayle et quelques écrivains calvinistes emploient le mot de « conversions dragonnes » sur lesquelles Pineton de Chambrun, pasteur d'Orange donne des détails dans son Histoire de la persécution des protestants en la principauté d'Orange, par le roi de France (de 1660 à 1687) publiée en anglais à Londres, en 1689, relation qui existe au British Museum.

Lieux et monuments

Notes et références

Annexes

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Sources

  • Journal de Samuel de Pechels, (Je ne changerai pas, éd. Ampelos, 2008) : le 26 août 1685, deux mois avant la Révocation officielle de l'Édit de Nantes, les dragons de Louis XIV pillent la maison de Samuel de Pechels, bourgeois protestant de Montauban et s'y installent. Quelques jours plus tard, s'y ajoutent des fusiliers « missionnaires » qui chassent Samuel de Pechels, sa femme et ses 4 jeunes enfants. Séparé de sa famille, il est enfermé dans la Tour de Constance puis déporté aux Antilles).

Bibliographie

  • Marianne Carbonnier-Burkard et Patrick Cabanel, Une histoire des protestants en France XVIe - XXe siècle, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, 215 p. (ISBN 2-220-04190-5)
  • Henri Dubief et Jacques Poujol, La France protestante, Histoire et Lieux de mémoire, Montpellier, Max Chaleil, 1992, rééd. 2006, 450 p. (ISBN 2-84062-001-4)
  • Élisabeth Labrousse, La révocation de l'édit de Nantes, Paris, édition Payot, 1990, 221p
  • Daniel Ligou, Le protestantisme en France de 1598 à 1715, Paris, société d'édition d'enseignement supérieur, 1968, 277p
  • Geste éditions / témoignage le journal de Jean Migault : les dragonnades en Poitou et Saintonge, Geste éditions, 2000, 302p (ISBN 2-84561-012-2)
  • Lucien Bély (dir.), Dictionnaire Louis XIV, Paris, éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1405 p. (ISBN 978-2-221-12482-6)

Sur le mot "dragonnades"

  • William Duckett fils, Dictionnaire de la conversation et de la lecture, t. 8, Paris, Michel Lévy, 1854, p. 8-9
  • Maurice Block, Dictionnaire général de la politique, Paris, O. Lorenz, 1873, p. 716-7

Liens externes