Aller au contenu

Histoire de la justice en France

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 10 mars 2009 à 13:40 et modifiée en dernier par Pseudomoi (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)

Prémices

S'ils conservèrent leurs propres coutumes[réf. nécessaire], les peuples germaniques qui envahirent la Gaule au Ve siècle ne mirent pas fin aux usages juridiques des Gallo-Romains. Ainsi coexistèrent des lois différentes selon l'ethnie des sujets (personnalité des lois), système qui tomba progressivement en désuétude.[réf. nécessaire] Quant à l’Église, elle demeura soumise au droit canonique. L'inspiration des lois barbares était différente du droit romain : il fallait substituer à la vengeance de la victime ou de sa famille une compensation financière et en fixer le tarif. Les « preuves » reconnues par la procédure étaient mystiques et non pas rationnelles : épreuve par le fer rouge ou l'eau (ordalies), duel judiciaire.

À partir du Xe siècle, les seigneurs féodaux s'approprient la justice, imités bientôt par les villes érigées en communes. La justice royale n'est plus en vigueur que sur le domaine propre du roi. La plupart des normes juridiques sont alors le fruit de la coutume[réf. nécessaire], dont il faut prouver la teneur par des témoignages, et « qui restera une source importante du droit jusqu'à la Révolution », écrit Jean Bart[1]. La justice ecclésiastique profite elle aussi de l'effacement du pouvoir royal pour étendre sa compétence. Elle renoue au XIIe siècle avec le droit romain. Jusqu'au XIIe siècle, les seigneurs rendaient la justice en personne, puis ils ont délégué leur pouvoir de justice à des officiers. À partir du XIIIe siècle, la justice royale lance une offensive contre la justice seigneuriale[réf. nécessaire] ; au XIVe siècle, elle impose à la justice de l'Église de se limiter au seul domaine spirituel[2].

Autorité royale

Selon Jean Foyer[3], il faut attendre Saint Louis, au milieu du XIIIe siècle, pour qu'un retour s'amorce vers les preuves rationnelles, qui n'étaient demeurées en vigueur que devant les tribunaux ecclésiastiques. Il tenta en effet d'interdire le duel judiciaire sur son domaine.

Au XIVe siècle, les légistes du roi inventent la formule selon laquelle « le roi est source de toute justice et fontaine de justice ». Cela ne signifie pas que la loi édictée par le monarque est la seule source du droit, mais il devient possible de faire appel devant la justice royale des décisions de la justice seigneuriale. Le principe de prévention permet à la justice royale de se substituer au juge seigneurial en raison de son inaction. Enfin, les cas royaux, toujours plus largement définis, se voient soustraits à la justice seigneuriale. La justice dite concédée, seigneuriale ou ecclésiastique, survivra jusqu'à la Révolution.

La justice royale est essentiellement exercée par des officiers, qui sont propriétaires de leur charge ; cette vénalité des offices (qui remonte à Louis XI et surtout François Ier) permet au roi d'alimenter ses caisses, d'où pléthore de magistrats. Si le roi délègue ainsi la justice royale à des tribunaux, il conserve le droit de juger lui-même une cause, soustraite à la justice normalement compétente. Ainsi la justice déléguée peut à tout moment, en théorie, laisser la place à la justice retenue. Royer[4] note la persistance de l'infra-judiciaire sous l'Ancien Régime. Les transactions concernaient non seulement les grossesses illégitimes mais également certains meurtres, dont les motifs étaient jugés honorables. La criminalité judiciairement réprimée était en fait très faible[réf. nécessaire] au XVIIIe siècle.

La justice déléguée, en particulier le Parlement de Paris, se transforma en contre-pouvoir dès le règne de Charles VI. Louis XIV pourra bien enrayer le processus de harcèlement, mais non pas l'arrêter, note Jean-Pierre Royer[4]. |Jusqu'à la Révolution de 1789, l'histoire de la justice sera caractérisée par l'affrontement permanent de ces magistrats imbus de leurs prérogatives avec la monarchie. Cette politisation du juridique ne fit que s'accentuer « au fur et à mesure que l'on approchait du terme de la monarchie »[4]. Le Parlement s'opposa à toute réforme fiscale, et pour cette raison accula Louis XVI à réunir les États généraux. Mais la justice était elle-même la cible, à une époque où commençait à se constituer une opinion publique véritable, d'avocats et d'intellectuels, comme Beccaria ou Voltaire, qui lui reprochaient la cruauté de ses procédés (torture, abolie par Louis XVI) ou son intolérance religieuse (affaires Calas, Sirven, Chevalier de la Barre). Le Parlement sera hostile au doublement du nombre des députés du tiers état, ce qui lui fera perdre toute popularité. Il disparaîtra en même temps que l'Ancien Régime.

Justice moderne

La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen fut votée dès le . Le , l'Assemblée constituante entreprit de reconstruire l'ensemble du système judiciaire sur de nouvelles bases (Code pénal de 1791). Un rôle important était dévolu à l'arbitrage et à la conciliation dans le domaine de la justice civile. Les juges étaient élus par les citoyens actifs, le jury institué en justice criminelle. La Constituante croyait en la bonté naturelle de l'homme ; la Convention aura recours à la Terreur pour régénérer le peuple, et transformera l'appareil judiciaire en un instrument de cette politique. La procédure se fit vite expéditive. En thermidor, les Terroristes furent à leur tour victimes du Tribunal révolutionnaire.

Napoléon dessina les grandes lignes de l'organisation judiciaire contemporaine. Il rétablit les titres et les costumes d'Ancien Régime. La nomination des magistrats devint la règle. L'Empire, comme tous les régimes qui suivirent, se permit quelque liberté avec la règle de l'inamovibilité des magistrats du siège. Surtout, leur carrière dépendait du pouvoir politique.

L'affaire Dreyfus se conclura par la victoire, difficile, de l'idéal de justice sur la raison d'État. À la fin de l'entre-deux-guerres, les affaires financières et politiques mirent en évidence la collusion de la justice et du pouvoir politique. Il faudra attendre 1958 pour que l'indépendance de la justice commence à s'affirmer, grâce à la simplification de l'avancement et à l'institution d'un concours d'entrée à l'École nationale de la magistrature[5]. Tandis que la délinquance engorge les tribunaux, la crise du lien social conduit à une certaine judiciarisation de la société.[réf. nécessaire] Les juges apparaissent parfois comme le dernier rempart contre la corruption mais aussi contre les violations des droits de l'homme (tribunaux internationaux).

Sources

Notes et références

  1. Jean Bart, Histoire du droit, Dalloz, 1999.
  2. sanction de Bourges de 1438
  3. Jean Foyer, Histoire de la justice, PUF, 1996.
  4. a b et c Jean-Pierre Royer, Histoire de la justice en France, PUF, 1996.
  5. Michel Debré

Ouvrages utilisés

Droit dans l'Antiquité
  • (fr) Jean Gaudemet, Les institutions de l'Antiquité, Paris, Montchrestien, coll. « Domat Droit public », 5e éd., 1998, 511 p. (ISBN 2-7076-1063-1)
  • (fr) (it) Aldo Schiavone (trad. Geneviève et Jean Bouffartigue, préf. Aldo Schiavone), Ius : L'invention du droit en Occident [« Ius. L'invenzione del diritto in Occidente »], Paris, Belin, coll. « L'Antiquité au présent », , 539 p. (ISBN 978-2-7011-4419-1)
Droit contemporain
  • (fr) René David et Camille Jauffret-Spinosi, Les grands systèmes de droit contemporains, Paris, Dalloz, coll. « Précis », 11e éd., 2002 (ISBN 2-24702848-9)
    Ouvrage traduit en onze langues.

Sites web utilisés

Pour aller plus loin

Articles connexes

Bibliographie conseillée

Sites internet

Modèle:Wikiversity