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« Camps d'internement du Xinjiang » : différence entre les versions

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Les '''camps d'internement du Xinjiang''' sont des camps situés dans la province [[Chine|chinoise]] du [[Xinjiang]], construits à partir de 2014 dans le but d'interner des centaines de milliers de [[musulman]]s pratiquants [[ouïghours]] et [[kazakhs]]. Un million de Ouïghours y seraient internés de façon préventive et sans [[procès]] dans le cadre d’une vaste campagne d’[[antiterrorisme]] visant les [[Islamisme|islamistes]] et les [[Indépendantisme|indépendantistes]] après de nombreux attentats en 2013 et 2014.


La Chine nie l'existence de ces camps avant d'en reconnaître officiellement l'existence en octobre 2018 sous le nom de {{Citation|camps de transformation par l’éducation}}. Elle les décrit comme des centres de formation professionnelle, avec pour objectif de lutter contre le terrorisme et l’extrémisme musulmans. À l’étranger, plusieurs pays et ONG qualifient ces camps de [[camp de concentration|camps de concentration]] et soulignent des conditions de détention portant atteinte aux droits humains. D’autres pays soutiennent ouvertement la Chine, affirmant qu’elle lutte efficacement contre le terrorisme. De plus, les camps d'internement du Xinjiang ont été comparés à plusieurs reprises aux méthodes d'endoctrinement mises en œuvre pendant la [[révolution culturelle]] chinoise<ref>{{Article |titre=Répression des Ouïgours : « Comme lors de la révolution culturelle, on assiste à un mépris de la religion et du sacré » |périodique=[[Le Monde]] |date=2019-11-25 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/11/25/china-cables-comme-lors-de-la-revolution-culturelle-on-assiste-a-un-mepris-de-la-religion-et-du-sacre_6020467_3210.html |consulté le=2019-12-30}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=Ouïghours : les camps secrets du régime chinois |url=https://www.liberation.fr/planete/2018/08/29/ouighours-les-camps-secrets-du-regime-chinois_1675335 |site=[[Libération (journal)|Libération]] |date=2018-08-29 |consulté le=2019-12-30}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=Camps d'internement au Xinjiang : la Chine sous pression internationale |url=https://asialyst.com/fr/2018/09/14/camps-internement-xinjiang-chine-sous-pression-communaute-internationale/ |site=Asialyst |date=2018-09-14 |consulté le=2019-12-30}}.</ref>{{,}}<ref>{{Article |langue=en |auteur1=[[Adrian Zenz]]|prénom1=Adrian |nom1=Zenz |titre=You Can’t Force People to Assimilate. So Why Is China at It Again? |périodique=[[The New York Times]] |date=2019-07-16 |issn=0362-4331 |lire en ligne=https://www.nytimes.com/2019/07/16/opinion/china-xinjiang-repression-uighurs-minorities-backfire.html |consulté le=2019-12-30}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=China's mass indoctrination camps evoke Cultural Revolution |url=https://apnews.com/6e151296fb194f85ba69a8babd972e4b |site=AP NEWS |date=2018-05-18 |consulté le=2019-12-30}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |langue=en-US |nom1=Ingram |prénom1=Ruth |titre=The Land Drenched in Tears: In Xinjiang, It's the Cultural Revolution |url=https://bitterwinter.org/in-xinjiang-its-the-cultural-revolution/ |site=bitterwinter.org |date=2019-08-07 |consulté le=2019-12-30}}.</ref>.


CIA PROPAGANDA
Les [[Xinjiang Papers]], documents internes [[Chine|chinois]] transmis au ''[[The New York Times|New York Times]]'' en novembre 2019, documentent la répression contre la [[minorité]] [[Musulman|musulmane]] et la nature des camps. Les [[China Cables]], enquête du [[Consortium international des journalistes d'investigation]] publiée le 24 novembre 2019, confirment le caractère carcéral des camps d'internement.


== Contexte historique ==

=== Camps de rééducation en Chine ===
En 2013, les camps de rééducation par le travail, ou [[laojiao]] et [[laogai]], sont officiellement abolis en Chine. Il est commun que des [[Chinois (nation)|Chinois]] y soient envoyés par des organes du pouvoir sans procès ni procédure légale : le système est surtout utilisé pour les [[Dissidence|dissidents]] et les petits [[Délinquance|délinquants]]. Au moment de leur fermeture, on dénombre environ 350 camps qui regroupent {{Unité|160000 prisonniers}}<ref name="TWP">{{article |langue=en |url=https://www.washingtonpost.com/opinions/china-finally-admits-it-is-building-a-new-archipelago-of-concentration-camps-will-the-world-respond/2018/10/11/fb3b6004-ccc6-11e8-a3e6-44daa3d35ede_story.html?noredirect=on |titre=China finally admits it is building a new archipelago of concentration camps. Will the world respond? |périodique=[[The Washington Post]] |date=11 octobre 2018}}.</ref>.

En 2017, cinq à huit millions de chinois seraient détenus dans environ {{unité|1000 camps}}. le [[Sinologie|sinologue]] français [[Jean-Luc Domenach]] mentionne aussi le développement des [[Prison noire|prisons noires]], détention extrajudiciaire qui concerne {{unité|20000 à 30000 personnes}}<ref>{{Lien web|url=https://m.tdg.ch/articles/15616519|titre=Les camps de travail forcé, une « horreur » qui perdure|périodique=[[Tribune de Genève]]|date=3 avril 2018}}.</ref>.

=== Tensions ethniques au Xinjiang ===
{{article détaillé| Sinisation du Xinjiang|Troubles dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang}}
En 1949, le Xinjiang ou Turkestan oriental compte {{Unité|20000|Chinois}} de l'ethnie majoritaire [[Han (ethnie)|han]] ; en 2018, ils dépassent les dix millions. Les Hans volontaires sont souvent des habitants défavorisés d'autres régions, encouragés à peupler le Xinjiang en échange d'un meilleur salaire et d'un logement public et à qui on interdit ensuite de revenir dans leur région. En raison de ce processus, ils forment aujourd'hui 40 % de la population, pour 46 % de Ouïghours.

En 2009, des émeutes se déclarent à [[Ürümqi]], la capitale du Xinjiang, et font près de {{nombre|200|morts}}<ref name=":1" />. En 2013 et 2014, des attentats perpétrés par des indépendantistes ouïghours et des islamistes font des centaines de morts dans la région du Xinjiang, selon les médias d'État chinois<ref name=":0">{{Lien web|langue=en|nom1=Shih|prénom1=Gerry|titre='Permanent cure': Inside the re-education camps China is using to brainwash Muslims|url=https://www.businessinsider.com/what-is-life-like-in-xinjiang-reeducation-camps-china-2018-5|site=Business Insider|date=17 mai 2018|consulté le=2019-11-20}}.</ref>, et le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, {{Lien|langue=en|trad=Geng Shuang|fr=Geng Shuang}}, évoque même {{Citation|plusieurs milliers}} d'actes terroristes de 2013 à 2016<ref name=":5" />. En parallèle, le retrait des troupes américaines en [[Afghanistan]] inquiète le gouvernement chinois, qui estime que les forces terroristes de Syrie et d’Afghanistan pourraient se tourner vers le Xinjiang<ref name=":1" />. En avril 2014, des militants Ouïghours poignardent plus de {{Unité|150|personnes}} dans une gare, faisant {{Unité|31|morts}}, alors que Xi Jinping prépare une visite de quatre jours dans la région. Le dernier jour de la visite, en mai 2014, un attentat à la bombe fait un mort et quatre-vingt blessés. En juin 2014, un autre attentat dans un marché d’Umruqi fait {{nombre|94|blessés}} et au moins {{nombre|39|morts}}<ref name=":1" />.

[[Xi Jinping]] prononce alors une série de discours réservés à l’administration, appelant à combattre sévèrement le terrorisme, l’infiltration et le séparatisme. Au cours de ce discours, il appelle à s’inspirer de la [[guerre contre le terrorisme]] menée par les États-Unis et à observer l’exemple du [[Bloc de l'Est|bloc soviétique]], dont il dit que la croissance économique n’a pas empêché l’éclatement. La campagne est appelée {{Citation|Frapper fort contre l’extrémisme violent}}<ref name=":6">{{Article |langue=fr-FR |auteur1=Dorian Malovic |titre=La Chine réprime en masse les Ouïgours du Xinjiang |périodique=[[La Croix]] |date=2018-09-11 |issn=0242-6056 |lire en ligne=https://www.la-croix.com/Religion/Islam/Chine-reprime-masse-Ouigours-Xinjiang-2018-09-11-1200967881 |consulté le=2019-11-29}}.</ref>. Le contenu des discours n’est pas public, mais les médias nationaux font parfois allusion à leur existence. Xi mentionne en particulier sa volonté d’utiliser des outils de [[dictature]] pour éradiquer l’islam radical en Chine. Il précise ensuite, à la suite d’oppositions de la part de hauts fonctionnaires, qu’il ne faut pas discriminer les Ouïghours ou porter atteinte à leur [[Liberté de religion|liberté de culte]], ni chercher à éliminer toute trace d’islam dans le pays. Il critique cependant le fait que les populations chinoises musulmanes tendent à pratiquer leur religion quotidienne plus librement qu’avant les années 1990<ref name=":1" />.

== Historique ==

=== Débuts de la répression ===
Dès 2014, des premières personnes soupçonnées d’être radicalisées sont arrêtées dans le Xinjiang. Les premiers camps regroupent quelques dizaines ou centaines de prisonniers, qui sont amenés à renier l’Islam et à affirmer leur dévotion au parti communiste<ref name=":1" />.

=== Essor des camps d'internement ===
La répression gagne en ampleur en août 2016, à l’arrivée de [[Chen Quanguo]], ancien responsable de la [[région autonome du Tibet]], en tant que chef du parti au Xinjiang<ref name=":1" />{{,}}<ref name=":6" />. Chen distribue les discours de Xi Jinping à tous les hauts fonctionnaires de la région. En février 2017, il les exhorte à {{Traduction|langue=zh|ying shou jin shou|rafler tous ceux qui doivent l’être}} : la phrase revient dans plusieurs de ses discours à partir de 2017<ref name=":1" />{{,}}<ref name=":5">{{Lien web|langue=fr|titre=Ouïghours opprimés dans le Xinjiang : Xi Jinping a donné l'ordre d'être « sans pitié |url=https://www.lexpress.fr/actualite/monde/asie/ouighours-opprimes-dans-le-xinjiang-des-documents-montrent-l-implication-de-xi-jinping_2107765.html|périodique=[[L'Express]]|date=2019-11-18|consulté le=2019-11-27}}.</ref>. Plusieurs hauts fonctionnaires expriment leur désaccord avec ces mesures, opposant à Chen qu’elles aggraveront les tensions raciales et empêcheront la croissance économique dans la région. Ils perdent généralement leur emploi ; l’un en particulier, {{Lien|langue=zh|trad=王勇智|fr=Wang Yongzhi (homme politique)|texte=Wang Yongzhi}}, est emprisonné après avoir signé une confession d’ivresse au travail, après avoir secrètement libéré plus de sept mille prisonniers. En tout, {{Unité|12000|membres}} du parti au Xinjiang font l’objet d’une enquête pour leur opposition aux mesures de répression<ref name=":1" />.

Les arrestations préventives se fondent sur une liste de plusieurs dizaines de {{Citation|signes de radicalisation}}, qui incluent des pratiques culturelles courantes dans le Xinjiang, comme le port d’une longue barbe, le fait de ne pas boire ni fumer, l’étude de la langue arabe ou la prière en dehors des [[Mosquée|mosquées]]<ref name=":1" />. Avec le temps, les motifs d'arrestation deviennent de plus en plus mineurs : en 2018, la possession d'une application mobile de lecture du Coran, le fait d'aller à la mosquée un autre jour que le vendredi, ou un contact à l'étranger peuvent suffire à l'incarcération. Le système opère en dehors du système judiciaire, sans procès ni défense<ref name="TWP" />. Pour [[Rebiya Kadeer]], présidente honoraire du [[Congrès mondial des Ouïghours]], {{citation|c’est un système arbitraire total, une sorte de détention préventive, basés sur la détention administrative, c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire d’avoir été condamné pour y être emprisonné. Nulle procédure, nulle possibilité de recourir à un avocat et même nul chef d’inculpation. On peut rester dans ces camps très longtemps, certains à perpétuité}}<ref name="orientxxi.info" />.

Quand des membres d'une famille dont les autres membres ont été internés en leur absence reviennent au Xinjiang, on leur fournit des réponses préparées à l’avance. Les autorités leur disent que leurs proches sont dans des centres de formation et que sans être accusés d’un quelconque crime, ils ne peuvent pas en sortir librement. Les autorités ajoutent que le comportement de la personne a une incidence sur la durée de la {{Citation|formation}} des membres de sa famille : ceux-ci sont relâchés une fois qu’ils atteignent un certain nombre de points, et ils perdent des points en cas de désobéissance des étudiants. Ces derniers ont également droit à un appel vidéo<ref name=":1" />. En cas d’insistance de la part des étudiants, les policiers leur répondent que leurs proches ont été {{Citation|infectés}} par le virus de l’extrémisme islamiste et doivent en être guéris avec une quarantaine<ref name=":1" />.

Une étude de juin 2017 publiée dans les journaux nationaux chinois affirme que la majorité des personnes enfermées ne comprennent pas ce dont on les accuse au moment de leur arrestation ; il ajoute que la quasi-intégralité des personnes libérées (98,8 %) dit avoir compris son erreur et changé de mode de vie à la sortie des camps<ref name=":0" />.

En dehors des camps, les autorités chinoises du Xinjiang effectuent un contrôle très poussé de la vie personnelle des musulmans : des fonctionnaires sont envoyés vivre dans des familles musulmanes pour y vérifier ce qu'elles mangent, leurs prières, l'éducation de leurs enfants ou encore leurs codes vestimentaires<ref name=":6" />. Des voitures de police patrouillent dans les grandes villes en appelant via un haut-parleur à dénoncer les extrémistes aux autorités<ref name="orientxxi.info" />. Les Ouïghours vivant à l'étranger sont souvent suivis par la police chinoise, qui leur demande des informations sur le reste de la diaspora en menaçant leurs proches restés en Chine<ref name="orientxxi.info" />. Le Xinjiang concentre 21 % des arrestations chinoises, pour 2 % de la population du pays<ref name=":7">{{Lien web |langue=en |titre=China Secretly Built A Vast New Infrastructure To Imprison Muslims |url=https://www.buzzfeednews.com/article/meghara/china-new-internment-camps-xinjiang-uighurs-muslims |site=BuzzFeed News |consulté le=2020-08-28}}.</ref>.

=== Premières réactions internationales ===
En septembre 2017, [[Radio Free Asia]] devient le premier organe de presse de langue anglaise à dévoiler l'existence des camps de rééducation au Xinjiang<ref>{{Lien web|langue=en-US|titre=How the world learned of China’s mass internment camps|url=https://www.icij.org/investigations/china-cables/how-the-world-learned-of-chinas-mass-internment-camps/|site=ICIJ|consulté le=2019-12-27}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=en|titre=China Runs Region-wide Re-education Camps in Xinjiang for Uyghurs And Other Muslims|url=https://www.rfa.org/english/news/uyghur/training-camps-09112017154343.html|site=Radio Free Asia|consulté le=2019-12-27}}.</ref>.

En avril 2018, une commission américaine estime qu’il s’agit de la plus grande incarcération de masse en cours d'un peuple minoritaire<ref name=":0" />. En 2018, le nombre des détenus est estimé à un million par [[Amnesty International]]<ref name=":2" /> et par l'[[Organisation des Nations unies]]<ref name=":3" />, et on estime qu'il y a environ {{Unité|1200|camps}}<ref name="TWP" />. Le [[département d'État des États-Unis]] propose une estimation basse de plusieurs dizaines de milliers de personnes, tandis qu'une station de télévision turque tenue par des anciens détenus cite le chiffre de {{Unité|900000|prisonniers}}<ref name=":0" />. Les appels d'offre et offres d'emploi laissent entendre que les camps ont coûté plus de {{Unité|100|millions}} de dollars au gouvernement chinois entre 2016 et 2018<ref name=":0" />. Face à ces affirmations, la Chine reconnaît qu'elle envoie les petits délinquants dans des écoles visant à leur enseigner une spécialité professionnelle<ref name="TWP" />, mais le ministre des affaires étrangères affirme ne pas avoir entendu parler de camps de concentration. À la remarque que des citoyens naturalisés par d'autres pays ont été enfermés, il affirme que le gouvernement chinois protège ses visiteurs, à condition qu'ils respectent la loi<ref name=":0" />.

Le 10 septembre 2018, un rapport de [[Human Rights Watch]] regroupe des entretiens avec des ex-détenus et leurs proches, racontant la torture et les dures conditions de vie dans les camps d'internement. L'ONG indique que la Chine {{Citation|compte sur le fait que cela ne lui coûtera rien sur le plan politique en partie grâce à son influence au sein du système des Nations unies}}. Le même jour, [[Michelle Bachelet]] dénonce les camps et demande {{Citation|au gouvernement de permettre à l'ONU d'avoir accès à toutes les régions de la Chine}}. Le lendemain, Geng Shuang, porte-parole de la diplomatie chinoise, demande à l'ONU de respecter la souveraineté de la Chine et justifie la répression par la lutte contre le terrorisme islamiste et le séparatisme d'une partie des Ouïghours<ref name=":6" />.

La Chine finit par admettre officiellement l'existence de camps de rééducation par le travail le {{date-|9|octobre|2018}}<ref name="TWP" />{{,}}<ref>Stéphane Lagarde, [http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20181010-chine-reconnait-camps-reeducation-xinjiang Ouïghours : la Chine reconnaît le recours à des camps de rééducation au Xinjiang], [[Radio France internationale|RFI]], 10 octobre 2018.</ref>. Les camps sont décrits comme des centres de formation professionnelle spécifiques aux musulmans<ref name="Cnews">[https://www.cnews.fr/monde/2018-10-24/chaise-tigre-dents-de-loup-matraques-electriques-linquietant-arsenal-des-centres « Chaise tigre », « dents de loup », matraques électriques... : L’inquiétant arsenal des centres éducatifs pour musulmans en Chine] - [[CNews]], 24 octobre 2018.</ref>, qui utilisent des méthodes douces de déradicalisation islamiste<ref name=":1" />. Pour [[Shohrat Zakir]], le numéro deux du [[Parti communiste chinois]] dans la province, {{citation|l'objectif de ce programme était de se débarrasser de l'environnement et du terreau qui nourrissent le terrorisme et l'extrémisme religieux<ref>[http://www.lefigaro.fr/international/2018/10/16/01003-20181016ARTFIG00169-la-chine-defend-son-programme-d-internement-de-musulmans.php La Chine défend son programme d'internement de musulmans] - ''[[Le Figaro]]'', 17 octobre 2018.</ref>}}. Pour [[Chen Quanguo]], chef du Parti communiste de la région, les camps doivent {{citation|enseigner comme des écoles, être gérés comme à l'armée et défendus comme des prisons<ref name="LC24102018">{{Lien web|url=https://www.la-croix.com/amp/1300978233|titre=Chine : l'étrange arsenal des centres éducatifs pour musulmans|périodique=[[La Croix]]|date=24 octobre 2018}}.</ref>}}.

La télévision d'État explique que l'admission dans les camps est facultative. Elle montre des images d'étudiants apprenant le chinois et des métiers dans l'alimentation et le textile<ref name="Cnews" />. La Chine présente donc les camps comme des sortes d'écoles. En 2018, le magazine en ligne [[Bitter Winter]] a toutefois publié des vidéos qui auraient été tournées à l’intérieur des camps, et ils apparaissent plutôt comme des prisons<ref>[https://fr.bitterwinter.org/camps-for-uyghurs-schools-or-jails/ Les camps de Ouïghours, « écoles » ou prisons ?], [[Bitter Winter]], 14 novembre 2018.</ref>{{,}}<ref>[https://fr.bitterwinter.org/video-exclusive-camp-de-reeducation-pour-ouighours-decouvert-au-xinjiang/ "Nouvelle vidéo exclusive : un nouveau camp de « rééducation » pour les Ouïghours découvert au Xinjiang"], [[Bitter Winter]], 26 novembre 2018.</ref>. Pour le sociologue [[Massimo Introvigne]], les raisons ultimes de l'internement d'un grand nombre d'Ouïghours sont aussi controversées. D’après la Chine, certaines mesures de « rééducation » s'imposent pour prévenir la radicalisation et le terrorisme. Des chercheurs occidentaux pensent que le gouvernement craint plutôt une renaissance religieuse à laquelle il ne s’attendait pas<ref>[[Massimo Introvigne]], [https://fr.bitterwinter.org/pourquoi-ouighours-sont-ils-persecutes/ Pourquoi les Ouïghours sont-ils persécutés ?], [[Bitter Winter]], 22 novembre 2018.</ref>.

En mars 2019, Michelle Bachelet demande à nouveau l'accès au Xinjiang pour l'enquête de l'ONU, une demande qui ne reçoit pas de suite<ref name=":9">{{Article |langue=fr |auteur1= |titre=Répression des Ouïgours : à l’ONU, la Chine s’offre un soutien diplomatique massif |périodique=[[Le Monde]] |date=2019-10-31 |issn= |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/31/repression-des-ouigours-a-l-onu-la-chine-s-offre-un-soutien-diplomatique-massif_6017619_3210.html |consulté le=2019-11-29 }}.</ref>.

En {{date-||avril|2019}}, la [[Banque mondiale]] ouvre une enquête pour déterminer si un prêt de {{unité|50|millions}} de dollars effectué en 2015 par la Chine, officiellement pour financer cinq collèges locaux, aurait été utilisé pour financer les camps d'internement du Xinjiang. L'enveloppe faisait partie d'un plus gros prêt de {{unité|1,5|milliard}} de dollars prêtés par la Banque à la Chine cette année<ref>{{lien web|titre=Ouighours : «Aucune indication» que Pékin a détourné des fonds de la Banque mondiale|url=http://www.lefigaro.fr/flash-eco/ouighours-aucune-indication-que-pekin-a-detourne-des-fonds-de-la-banque-mondiale-20190830|périodique=[[Le Figaro]]|date=30/08/2019|consulté le=}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|langue=en|auteur=Alan Rappeport|titre=World Bank launches investigation into whether £40m loan to China funds Muslim persecution in detention centres|url=https://www.independent.co.uk/news/world/asia/world-bank-loan-china-xinjiang-uighur-muslim-detention-camps-a9086491.html|périodique=[[The Independent]]|date=31 août 2019|consulté le=}}.</ref>.

==== Xinjiang Papers ====
{{Article détaillé|Xinjiang Papers}}Les [[Xinjiang Papers]], documents internes [[Chine|chinois]] transmis au ''[[The New York Times|New York Times]]'' en novembre 2019<ref>{{Lien web|langue=fr|auteur=Laurence Defranoux|titre=Ouïghours opprimés dans le Xinjiang : « Soyez sans pitié », a dit Xi Jinping|url=https://www.liberation.fr/planete/2019/11/17/ouighours-opprimes-dans-le-xinjiang-soyez-sans-pitie-a-dit-xi-jinping_1763891|éditeur=[[Libération (journal)|Libération]]|date=2019-11-17|consulté le=2019-11-20}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|auteur=Brice Pedroletti|url=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/11/18/chine-le-new-york-times-publie-des-documents-secrets-chinois-sur-le-xinjiang_6019522_3210.html|titre=« Ne montrer absolument aucune pitié » : des documents secrets chinois éclairent la répression contre les Ouïgours|périodique=[[Le Monde]]|date=2019-11-18}}.</ref>, documentent la répression contre la [[minorité]] [[Musulman|musulmane]] et la nature des camps<ref>{{Article |langue=en-GB |prénom1=Lily |nom1=Kuo |titre='Show no mercy': leaked documents reveal details of China's Xinjiang detentions |périodique=[[The Guardian]] |date=2019-11-17 |issn=0261-3077 |lire en ligne=https://www.theguardian.com/world/2019/nov/17/show-no-mercy-leaked-documents-reveal-details-of-chinas-mass-xinjiang-detentions |consulté le=2019-11-20 }}.</ref>{{,}}<ref name=":1">{{Article |langue=en-US |prénom1=Austin |nom1=Ramzy |prénom2=Chris |nom2=Buckley |titre=‘Absolutely No Mercy’: Leaked Files Expose How China Organized Mass Detentions of Muslims |périodique=[[The New York Times]] |date=2019-11-16 |issn=0362-4331 |lire en ligne=https://www.nytimes.com/interactive/2019/11/16/world/asia/china-xinjiang-documents.html |consulté le=2019-11-20 }}.</ref>. Ces {{nobr|403 pages}} de documents incluent {{nobr|96 pages}} de discours de Xi Jinping, {{nobr|102 pages}} de discours d’autres personnalités politiques, 161 pages de directives et de rapports sur le contrôle de la population ouïghoure dans le Xinjiang, et {{nobr|44 pages}} d’enquêtes internes sur des fonctionnaires locaux<ref name=":1" />.

Les documents sont envoyés par une personne anonyme au sein du parti communiste chinois, qui déclare que le gouvernement, y compris Xi Jinping, doit être tenu pour responsable des camps<ref name=":1" />.

Geng Shuang répond immédiatement qu'après {{Citation|plusieurs milliers}} d'attentats terroristes de 2013 à 2016, les violences ont cessé grâce aux camps d'internement. Il accuse les documents d'être sortis de leur contexte et présentés comme des documents officiels secrets, alors qu'ils ne le seraient pas réellement<ref name=":5" />.

==== ''{{lang|en|texte=China Cables}}'' ====
{{Article détaillé|China Cables}}
Dix-sept médias révèlent le {{date-|24 novembre 2019}} l'enquête du [[Consortium international des journalistes d'investigation|Consortium international des journalistes d’investigation]] sur la politique de répression et de détention menée par l'État chinois au [[Xinjiang]] envers la population [[Ouïghours|ouighoure]]<ref>{{Article |auteur1=Harold Thibault |auteur2=Brice Pedroletti |titre=« China Cables » : révélations sur le fonctionnement des camps d’internement des Ouïgours |périodique=[[Le Monde]] |date=2019-11-24 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/international/article/2019/11/24/china-cables-revelations-sur-le-fonctionnement-des-camps-d-internement-des-ouigours_6020358_3210.html |consulté le=2019-11-24 }}.</ref>. En décembre 2019, [[Shohrat Zakir]] affirme que tous les anciens apprentis des centres de rééducation sont désormais {{Citation|diplômés}}, libres et heureux, et ajoute que le nombre d'internés est {{Citation|dynamique}}, mais très loin en dessous du million estimé par les États-Unis<ref name=":8">{{Lien web |titre=China claims everyone in Xinjiang camps has 'graduated' |url=https://apnews.com/27f00e4feaa2755f25ab514cecda7add |site=AP NEWS |date=2019-12-09 |consulté le=2020-08-28}}.</ref>.

=== Augmentation de la répression ===
En 2020, plusieurs nouveaux camps sont construits, dont plusieurs pouvant héberger au moins {{Unité|10000}} personnes. L'État serait donc passé de l'utilisation de bâtiments publics à la création de bâtiments conçus pour interner les minorités musulmanes<ref name=":7" />.

Interrogé par [[BuzzFeed]], le consulat de Chine à New York affirme que les camps ne sont {{Citation|pas une question de droits humains, de religion ou d'ethnicité, mais de combat du terrorisme violent et du séparatisme}} et ajoute qu'il est complètement faux que des millions de Ouïghours soient détenus dans la région. Le consulat affirme que les droits humains sont respectés dans les programmes de rééducation et que les {{Citation|apprentis}} sont libres de leurs mouvements. Il mentionne l'existence de programmes obligatoires dans le cadre de l'[[antiterrorisme]] au Royaume-Uni et aux États-Unis<ref name=":7" />.

=== Sortie des camps ===
En décembre 2020, Adrian Zenz indique que les Ouïgours qui sortent des camps d'internement ne sont pas libérés. Ils doivent travailler dans des usines à proximité des camps mais peuvent aussi être contraints d'aller cueillir le coton dans les fermes d’État de la région. Un demi-million de Ouïgours travaillent dans les champs de coton<ref name="UG">{{Lien web|auteur=[[Ursula Gauthier]]|url=https://www.nouvelobs.com/monde/20210302.OBS40875/exclusif-un-rapport-chinois-confirme-la-volonte-de-detruire-les-structures-sociales-ouigoures.html|titre=Un rapport chinois confirme la volonté de détruire les structures sociales ouïgoures|périodique=[[L'Obs]]|date= 3 mars 2021}}.</ref>.

== Caractéristiques des camps ==

=== Nombre de camps et de détenus ===
En 2018, le nombre de détenus est estimé à un million par [[Amnesty International]]<ref name=":2">[https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2018/09/china-xinjiang-families-of-up-to-one-million-detained-demand-answers/ Chine. Les familles d’un million de personnes détenues dans le cadre d’une campagne massive de « rééducation » demandent des réponses], ''Amnesty International'', 24 septembre 2018.</ref> et par l'[[Organisation des Nations unies]]<ref name=":3"/>. En 2018, au Xinjiang, un musulman sur six serait concerné <ref name="AZ">[https://www.liberation.fr/amphtml/planete/2019/03/20/chine-au-xinjiang-un-musulman-sur-six-serait-en-detention_1715891 Chine: «Au Xinjiang, un musulman sur six serait en détention»] ''Libération ''</ref>. En mai 2019, le gouvernement américain estime le nombre de détenus à {{unité|3|millions}}<ref name="rfi20190808">{{Lien web|auteur=Heike Schmidt|titre=Harcèlements, menaces, disparitions: les Ouïghours de France vivent dans la peur - RFI|url=http://www.rfi.fr/emission/20190808-chine-ouighours-france-surveillance-totalitaire-harcelements-menaces-disparitions|éditeur=[[Radio France internationale|RFI]]|date=8 août 2019|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>. De 2017 à 2020, plus de {{Unité|260|camps}} fortifiés sont construits, soit au moins un par comté de l'Ouest du Xinjiang ; certaines constructions mettent moins de six mois à être finalisées. Elles ont généralement des murs de béton épais et des [[Mirador (surveillance)|miradors]], et de nombreuses usines sont rattachées à des bâtiments d'internement existants, ce qui soutient la thèse du travail forcé dans les camps. Sur ces 260 camps, 92 sont confirmés comme étant des camps d'internement et 176 ne sont identifiés que par observation satellite. 121 des camps sont dotés de miradors. Les plus grands commencent leur construction début 2018 et certains sont prêts dès octobre 2018, avec la majorité en 2019 et quelques camps toujours en construction en août 2020<ref name=":7" />. Une cinquantaine de camps construits à côté d'anciennes prisons sont démilitarisés, avec un retrait des barbelés et des miradors. Certains experts supposent qu'il s'agit d'une transition vers des camps à basse sécurité, pendant que les autres prisonniers sont transférés vers les nouveaux camps plus sécurisés<ref name=":7" />.

Le plus grand camp est à [[District de Dabancheng|Dabancheng]] ; long de deux kilomètres, il gagne encore un kilomètre de largeur fin 2019<ref name=":7" />.

Les camps contiennent une majorité de citoyens chinois, mais également des Kazakhs détenus pendant leur voyage en Chine<ref name=":0" />. Les détenus sont classés en trois catégories : d'abord, des personnes illettrées dont le seul crime est de ne pas parler chinois. La seconde catégorie est composée des musulmans pratiquants, arrêtés pour possession de document religieux ou considérés comme pro-indépendance, par exemple des livres sur la culture ouïghoure. Le dernier groupe est composé des personnes ayant un proche à l'étranger ou ayant eux-mêmes vécu à l'étranger : ce sont ceux aux détentions les plus longues, atteignant souvent {{nombre|10|à=15|ans}}<ref name=":0" />.

Les rapports chinois des Xinjiang Papers notent qu'en conséquence de l'internement d'une partie de la population certaines zones agricoles doivent être laissées en friche dans la région, par manque de main-d’œuvre<ref name=":1" />. De nombreux enfants dont les parents sont emprisonnés sont placés en orphelinat<ref name="orientxxi.info" />.
[[Fichier:Number of re-education related government procurement bids in Xinjiang.svg|centré|cadre|Nombre d'appels d'offre par mois en rapport avec les camps de rééducation au Xinjiang.]]

=== Conditions de détention ===
En détention provisoire, une cellule carrée de dix mètres de côté fait tenir dix-huit hommes. On y compte des uniformes bleus pour les crimes classiques et des uniformes orange pour les crimes politiques. Les détenus sont ensuite envoyés dans les camps<ref name=":0" />. Les camps séparent les hommes et les femmes<ref name="orientxxi.info" />. Dans certains camps, une usine est attenante aux bâtiments de vie : on y fait travailler les détenus<ref name=":6" />.

Les personnes internées se réveillent avant l'aube, chantent l'hymne chinois et célèbrent le lever du drapeau chinois à 7h30 chaque matin. Ils ont ensuite cours en blocs de deux heures et demie minimum, apprenant des chants communistes et étudiant l'histoire et la langue chinoises. Le midi, ils mangent de la soupe de légumes et du pain<ref name=":0" /> ; ils ont aussi du riz, mais très peu de protéines<ref name=":7" />. Les douches sont rares et surveillées : se laver les mains ou les pieds est considéré comme une ablution musulmane, et donc très contrôlé. Des fonctionnaires leur font des discours sur les dangers de l'intégrisme religieux et de l'indépendantisme, puis leur font passer des tests sur les dangers de l'Islam : en cas de réponse fausse, ils reçoivent un châtiment corporel<ref name=":0" />. Souvent, on compte deux personnes par lit ou certains camps peuvent organiser des tours de sommeil pour limiter le nombre de lits nécessaires<ref name=":7" />.

Selon une directive de 2017, les participants aux camps passent leur temps {{citation|à crier des slogans, chanter des chants révolutionnaires et apprendre par cœur le [[Classique des trois caractères]]}}<ref name="Cnews" />, une tâche particulièrement difficile pour les détenus qui ne parlent pas chinois ou sont illettrés<ref name=":0" />. Dans certains camps, les prisonniers sont obligés de remplacer la bénédiction musulmane habituelle dite avant de manger, [[Basmala|bismillah]], par des remerciements à Xi Jinping<ref>Léa Polverini [https://www.slate.fr/story/169770/delire-divin-xi-jinping-chine-culte-personnalite%3famp Le délire divin de Xi Jinping] ''Slate'', 24 novembre 2019</ref>. Les détenus sont forcés à manger du porc et à boire de l'alcool<ref>[http://www.gentside.com/chine/du-porc-et-de-l-alcool-pour-punir-les-detenus-le-scandale-des-camps-de-reeducation-pour-musulmans-en-chine_art85331.html Du porc et de l'alcool pour punir les détenus : le scandale des « camps de rééducation » pour musulmans en Chine], ''Gentside'', 19 mai 2018.</ref>{{,}}<ref>[https://www.rtbf.be/info/monde/detail_d-ex-detenus-temoignent-des-conditions-atroces-de-camp-de-reeducation-en-chine?id=9920818 D'ex-détenus témoignent des conditions atroces de « camp de rééducation » en Chine], ''RTBF.be'', 17 mai 2018.</ref>. Les prisonniers doivent aussi faire leur [[autocritique]] et la critique de leurs proches<ref name=":0" />. Les personnes internées doivent également apprendre le chinois et ses caractères d’écriture [[Langues turciques|turcophones]]<ref name=":1" />.

Selon des témoignages, des femmes musulmanes sont stérilisées via des injections<ref>{{lien web|url=https://www.independent.co.uk/news/world/asia/uighur-muslim-china-sterilisation-women-internment-camps-xinjiang-a9054641.html|site=independent.co.uk|langue=en|titre=Muslim women ‘sterilised’ in China detention camps, say former detainees|auteur=Peter Stubley|date=12 août 2019|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref name=":7" /> et victimes de violences sexuelles<ref name=":4">{{lien web|url=https://www.independent.co.uk/news/world/asia/uighur-muslim-china-mihrigul-tursun-torture-reeducation-camps-a8656396.html|site=independent.co.uk|consulté le=2 septembre 2019|langue=en|titre=Muslim woman describes torture and beatings in China detention camp: ‘I begged them to kill me’|auteur=Harry Cockburn|date=28 novembre 2018}}.</ref>. La sinologue [[Marie Holzman]] signale que 80 % des stérilets posés en Chine concerne le Xinjiang<ref>{{Lien web|url=https://www.francetvinfo.fr/monde/chine/on-attendait-une-reaction-la-prise-de-position-francaise-sur-la-situation-des-ouighours-saluee-par-des-specialistes-de-la-chine_4053059.amp|titre= « On attendait une réaction » : la prise de position française sur la situation des Ouïghours saluée par des spécialistes de la Chine|site=[[France Info]]|date=22 juillet 2020}}.</ref>.

La torture est aussi utilisée. Un homme réfractaire témoigne avoir passé cinq heures debout contre un mur, ou avoir été mis à l'isolement et privé de nourriture pendant 24 heures<ref name=":0" /> ; des femmes, comme [[Mihrigul Tursun]]<ref>{{Lien web |auteur= Claudine Douillet|langue=fr-FR |titre=Le récit d’une détenue ouïghoure torturée dans un camp d’internement en Chine |url=https://www1.alliancefr.com/actualites/le-recit-dune-detenue-ouighoure-torturee-dans-un-camp-dinternement-en-chine-6072535 |site=AllianceFR.com |date=2018-12-5|consulté le=2021-05-26}}.</ref>, racontent avoir subi des électrochocs<ref name=":4" />. Les nouveaux détenus sont gardés dans des postures douloureuses<ref name=":0" />. La violence n'est pas systématique, mais chaque témoignage de personne arrêtée l'inclut à un moment ou à un autre<ref name=":0" />.

De nombreux camps sont également accusés d'organiser un [[Travaux forcés|travail forcé]]<ref name=":7" />, en particulier pour l'industrie textile<ref>{{Article |langue=en-US |prénom1=Elizabeth |nom1=Paton |prénom2=Austin |nom2=Ramzy |titre=Coalition Brings Pressure to End Forced Uighur Labor |périodique=[[The New York Times]] |date=2020-07-23 |issn=0362-4331 |lire en ligne=https://www.nytimes.com/2020/07/23/fashion/uighur-forced-labor-cotton-fashion.html |consulté le=2020-08-28 }}.</ref>. Des membres des programmes qui ne sont pas prisonniers affirment qu'ils ont été forcés de signer des contrats de travail et interdits de quitter les usines pendant la semaine, travaillant des longues heures à très bas salaire<ref name=":8" />.

Les personnes internées seraient généralement relâchées après avoir atteint un certain nombre de points, qui note sur leur comportement quotidien et celui de leurs proches vivant en liberté<ref name=":1" />. Les points permettent également de bénéficier de meilleures conditions de vie : ils sont entre autres obtenus via les résultats aux tests et la critique des autres détenus. À leur libération, les anciens détenus reçoivent un papier affirmant qu'ils ont été détenus provisoirement pour soupçon de compromission de la sécurité nationale et relâchés sans sanction<ref name=":0" />.

En {{date-||août|2019}}, une ancienne détenue affirme que des agents du gouvernement chinois se sont rendus chez elle pour détruire son dossier de détenue, afin de recréer un faux dossier montrant qu'elle n'a jamais été détenue mais qu'elle était restée chez elle sous la surveillance du PCC<ref>{{lien web|auteur=Chang Xin|titre=Un survivant des camps du Xinjiang révèle les fausses informations du PCC|url=https://fr.bitterwinter.org/un-survivant-des-camps-du-xinjiang-revele-les-fausses-informations-du-pcc/|éditeur=[[Bitter Winter]]|date=29/08/2019}}.</ref>.

De nombreuses sources parlent de [[camp de concentration|camps de concentration]]<ref>{{lien web|langue=en|auteur=Alexia Fernández Campbell|titre=China’s reeducation camps for Muslims are beginning to look like concentration camps|url=https://www.vox.com/2018/10/24/18018282/china-reeducation-camps-uighur-muslims|site=vox.com|date=24 octobre 2018|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|langue=en|titre=China is creating concentration camps in Xinjiang. Here’s how we hold it accountable|url=https://www.washingtonpost.com/opinions/china-is-creating-concentration-camps-in-xinjiang-heres-how-we-hold-it-accountable/2018/11/23/93dd8c34-e9d6-11e8-bbdb-72fdbf9d4fed_story.html|périodique=[[The Washington Post]]|date=23 novembre 2018|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref>{{lien web|langue=en|titre=Q&A with Dolkun Isa, president of the World Uyghur Congress|url=https://www.dw.com/en/qa-with-dolkun-isa-president-of-the-world-uyghur-congress/av-47870479|éditeur=DW.com|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|titre=«Camps de concentration» au Xinjiang : Pékin dément l’accusation des États-Unis|url=http://www.leparisien.fr/international/camps-de-concentration-au-xinjiang-pekin-dement-l-accusation-des-etats-unis-06-05-2019-8066556.php|périodique=[[Le Parisien]]|date=6 mai 2019|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|auteur=Heulard Mégane|titre=Chine : privé de médicaments, un écrivain meurt dans un camp de « rééducation »|url=https://www.actualitte.com/article/monde-edition/chine-prive-de-medicaments-un-ecrivain-meurt-dans-un-camp-de-reeducation/95446|éditeur=actualitte.com|date=21 juin 2019|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Chine : Ouïgours, un peuple en danger|url=https://www.arte.tv/fr/videos/087898-000-A/chine-ouigours-un-peuple-en-danger/|éditeur=[[Arte]]|date=10/05/2019|consulté le=2 septembre 2019}}.</ref>{{,}}<ref name="rfi20190808" />. Le gouvernement chinois utilise parfois le mot {{Traduction|langue=zh|''集中''|concentration}} pour décrire ce qu'il appelle ailleurs les {{Citation|écoles d'éducation}}<ref name=":7" />.

=== Transport entre les camps ===
Une vidéo datée de 2018 semble montrer des détenus acheminés vers des camps<ref>{{lien web |auteur2=Liselotte Mas |titre=Chine : une vidéo documente le déplacement massif de prisonniers ouïghours au Xinjiang |url=https://observers.france24.com/fr/20190924-chine-ouighours-video-deplacement-prisonniers-xinjiang-camps?ref=tw |site=France24.com |date=24-09-2019 |consulté le=23-07-2020}}.</ref>. En septembre 2019, une vidéo filmée par drone montre des centaines d'hommes aux yeux bandés, avec le crâne rasé et les bras attachés dans le dos, portant des vestes indiquant {{Citation|centre de détention de Kashgar}} ; il s'agirait d'un transfert de prisonniers d'avril 2019, plusieurs mois après que le gouvernement chinois a affirmé que le système ne servait qu'à la formation professionnelle. Le déplacement fréquent d'un camp à l'autre pourrait être une tactique contre la surpopulation des premiers camps, avec des centaines de personnes arrivant chaque jour au début de la campagne d'internement<ref name=":7" />.

=== Prélèvements d'organes ===
En juin 2021, certains médias évoquent la possibilité que des organes soient prélevés sur les prisonniers des camps<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=La Chine vend les organes de ses prisonniers Ouïgours aux riches |url=https://www.vice.com/fr/article/bv8m3q/la-chine-vend-les-organes-halal-de-ses-prisonniers-ouigours-riches |site=[[Vice Media|Vice]] |consulté le=2021-06-21}}.</ref>. Des experts mandatés par l'[[Organisation des Nations unies|ONU]] indiquent avoir reçu des « informations crédibles » selon lesquelles des prisonniers issus de minorités ethniques, linguistiques et religieuses, dont les [[Ouïghours]], sont soumis à des prélèvements forcés d'organes en Chine<ref>{{Lien web |langue=fr-FR |titre=La Chine accusée par l’ONU de prélever de force des organes sur les minorités |url=https://www.charentelibre.fr/2021/06/15/la-chine-accusee-par-l-onu-de-prelever-de-force-des-organes-sur-les-minorites,3756816.php |périodique=[[Charente libre]]|consulté le=2021-06-21}}.</ref>. Une accusation similaire avait été formulée en 2019 par l'[[organisation non gouvernementale]] {{Lien|langue=en|trad=China Tribunal}}<ref>{{Lien web |langue=en |prénom=Will |nom=Martin |titre=China is harvesting thousands of human organs from its Uighur Muslim minority, UN human-rights body hears |url=https://www.businessinsider.fr/us/china-harvesting-organs-of-uighur-muslims-china-tribunal-tells-un-2019-9 |site=[[Business Insider]] France |date=2019-09-25 |consulté le=2021-06-21}}.</ref>.


== Réactions ==
== Réactions ==
=== États ===
=== États ===
[[File:Xinjiang reactions.png|vignette|Positions des États en 2019<br>Vert : critique la Chine<br>Rouge : soutient la Chine]]
[[File:Xinjiang reactions.png|vignette|Positions des États en 2019<br>Vert : critique la Chine<br>Rouge : soutient la Chine]]

En juillet 2019, vingt et un pays occidentaux et le Japon demandent à la Chine de cesser les détentions de masse au [[Xinjiang]]. Trente-sept pays répondent rapidement en faveur de la Chine. Ces pays incluent notamment la [[Russie]], l'[[Arabie saoudite]], le [[Qatar]], la [[Corée du Nord]], l'[[Algérie]], le [[Nigeria]], les [[Philippines]] et la [[Syrie]]. Leur lettre insiste sur la gravité du terrorisme : {{Citation|Face au grave défi du terrorisme et de l'extrémisme, la Chine a pris une série de mesures de lutte contre le terrorisme et de déradicalisation dans le Xinjiang, notamment la création de centres d'enseignement et de formation professionnels}}, disent-ils en soulignant que les attentats ont cessé depuis 2016. Elle ajoute que les visites des diplomates au Xinjiang contredisent les propos des médias occidentaux<ref name=":9" />{{,}}<ref>{{Lien web |langue=en |auteur=Ben Blanchard |titre=Syria says up to 5,000 Chinese Uighurs fighting in militant groups |url=https://www.reuters.com/article/uk-mideast-crisis-syria-china-idUSKBN1840UP |site=[[Reuters]] |date=11 mai 2017}}.</ref>.

Le 29 octobre 2019, cinquante-quatre États menés par la [[Biélorussie]] soutiennent la Chine, à laquelle la commission de l'ONU des affaires sociales demande une nouvelle fois un accès total de [[Michelle Bachelet]] à la province, refusé depuis un an. En réponse, vingt-trois pays, menés par le [[Royaume-Uni]] et les [[États-Unis]], dénoncent la répression du peuple ouïghour. Certains diplomates occidentaux font remarquer que parmi les {{nombre|54|pays}} figurent {{Unité|28|pays}} africains dont la Chine est un partenaire commercial majeur. La représentante cambodgienne fait valoir que {{Citation|la situation au Xinjiang tombe sous la juridiction interne de la République populaire de Chine}}. Des pays ne figurant pas dans la liste des 54 s'élèvent quand même en faveur de la Chine : c'est le cas du Vietnam, de la Tunisie et du Kirghizistan<ref name=":9" />{{,}}<ref name="soutient_express">{{Lien web |titre={{nombre|37|pays}} soutiennent la Chine, accusée de détentions arbitraires dans le Xinjiang |url=https://www.lexpress.fr/actualite/monde/37-pays-soutiennent-la-chine-accusee-de-detentions-arbitraires-dans-le-xinjiang_2089412.html |périodique=[[L'Express]] |date=12 juillet 2019}}.</ref>{{,}}<ref name="Diplomat">{{Lien web |langue=en |auteur=Catherine Putz |titre=Which Countries Are For or Against China’s Xinjiang Policies? |url=https://thediplomat.com/2019/07/which-countries-are-for-or-against-chinas-xinjiang-policies/ |site=[[The Diplomat]] |date=15 juillet 2019}}.</ref>.

[[Fichier:People of Xinjiang protesting against the chinese government.jpg|vignette|Manifestation contre les violations des [[droits de l'homme]] au Xinjiang à [[Berne]] en [[Suisse]].]]

=== Associations, corps religieux, personnalités ===
* En juillet 2020, le corps religieux [[France|français]] a officiellement soutenu pour la première fois la minorité [[musulman]]e [[Chine|chinoise]], les [[Ouïghours]]. Le [[Conseil français du culte musulman]] a appelé à une enquête internationale sur la situation des Ouïghours<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Le Conseil français du culte musulman prend la défense des Ouïgours |url=https://www.la-croix.com/Religion/Le-Conseil-francais-culte-musulman-prend-defense-Ouigours-2020-07-28-1201106720 |périodique=[[La Croix]] |consulté le=28 juillet 2020}}.</ref>.
* Le footballeur [[Mesut Özil]] a condamné le traitement des Ouïghours, exhortant les musulmans à ne pas « garder le silence » sur leur répression par la Chine, alors qu'elle renforce le secret autour de ses camps d'internement controversés<ref>[https://www.courrierinternational.com/article/ouigours-quand-arsenal-sacrifie-sa-star-mesut-ozil-pour-faire-plaisir-la-chine Ouïgours. Quand Arsenal sacrifie sa star Mesut Özil pour faire plaisir à la Chine].</ref>{{,}}<ref>James Rothwell, [https://www.telegraph.co.uk/news/2019/12/15/china-cancels-screening-arsenal-match-star-player-mesut-ozil/ China cancels screening of Arsenal match after star player Mesut Ozil condemns treatment of Uighurs], 15 décembre 2019.</ref>.
* [[Joe Biden]] affirme qu'il s'agit d'un génocide<ref name=":7" />.
* Le pape [[François (pape)|François]] qualifie les Ouïghours musulmans de peuple « persécuté » dans un livre rédigé en collaboration avec son biographe anglophone [[Austen Ivereigh]], paru le {{date-|2 décembre 2020}}, rompant son silence sur le sujet<ref>{{Lien web |langue=en |auteur=Tenzin Dharpo |titre=Pope Francis breaks silence, calls Uyghur Muslims “persecuted” |url=https://www.phayul.com/2020/11/24/44813/ |site=[[Phayul.com]] |date=24 novembre 2020}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=Livre : le monde de l’après-Covid selon le pape François |url=https://www.lavie.fr/christianisme/eglise/livre-le-monde-de-lapres-covid-selon-le-pape-francois-68924.php |périodique=[[La Vie]] |date=2020-11-24}}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=L'égoïsme des « anti-masques », la « saine indignation » contre l'assassinat de George Floyd écrit le pape |url=https://www.franceinter.fr/l-egoisme-des-anti-masques-la-saine-indignation-contre-l-assassinat-de-george-floyd-ecrit-le-pape |site=[[France Inter]] |date=2020-12-1}}.</ref>.

== Notes et références ==
{{Références | références=

<ref name="orientxxi.info">{{Lien web|auteur1=Jean-Michel Morel|titre=Ouïghours. « Un système de détention préventive » des musulmans chinois|url=https://orientxxi.info/spip.php?action=ia_nojs&retour=%2Fmagazine%2Fouigours-un-systeme-de-detention-preventive-des-musulmans-chinois%2C2665|périodique=Orient XXI|date=11 octobre 2018|consulté le=29 novembre 2019}}.</ref>

}}

== Bibliographie ==
* [[Gulbahar Haitiwaji]] et Rozenn Morgat, ''Rescapée du goulag chinois'', éditions des Équateurs, 2021.


== Voir aussi ==
== Voir aussi ==

Version du 9 octobre 2021 à 01:25

Camps d'internement du Xinjiang
Présentation
Nom local Camps de transformation par l’éducation
Type Camp d'internement
Gestion
Date de création 2014
Créé par Xi Jinping
Géré par Parti communiste chinois
Victimes
Type de détenus Musulmans ouïghours et kazakhs
Nombre de détenus 1 million (estimation de l'ONU)[1]
Morts Plusieurs (nombre inconnu) [2],[3],[4],[5],[6]
Géographie
Pays Drapeau de la République populaire de Chine Chine
Région Xinjiang


CIA PROPAGANDA


Réactions

États

Positions des États en 2019
Vert : critique la Chine
Rouge : soutient la Chine

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

  1. Liselotte Mas, « ONG et ONU dénoncent les camps d’internement pour Ouïghours en Chine », sur France 24, .
  2. (en) « Uyghur Human Rights Project Condemns Death in Custody of Scholar Muhammad Salih Hajim », sur uhrp.org (consulté le ).
  3. (en) « Uyghur Exile Group Leader’s Mother Died in Xinjiang Detention Center », sur Radio Free Asia (consulté le ).
  4. (en) « Elderly Uyghur Woman Dies in Detention in Xinjiang ‘Political Re-Education Camp’ », sur Radio Free Asia (consulté le ).
  5. (en) « Uyghur Teenager Dies in Custody at Political Re-Education Camp », sur Radio Free Asia (consulté le ).
  6. (en) « Uyghur Man Buried Amid Strict Security After Latest Xinjiang Reeducation Camp Death », sur Radio Free Asia (consulté le ).